TVA sociale : l’expression d’un expert

Photo L’expression TVA sociale est utilisée pour désigner deux réformes différentes :

– d’une part, celle qui est proposée par le Président de la commission des finances du Sénat. Elle est bien connue et c’est la seule qui ait été expertisée et envisagée.

– d’autre part, la TVA sociale « originelle » qui a été imaginée en 1985 à la suite de l’arrêt de la Cour de justice européenne de Luxembourg du 27 novembre 1985. En quoi consiste-elle?

Il ne s’agit plus, ici, de réduire ou supprimer les charges sociales et de compenser les pertes de recettes par une augmentation du – ou des taux – de la TVA fiscale. Il s’agit d’un prélèvement distinct de la TVA normale, dont les recettes, collectées par les entreprises, sont versées directement aux organismes sociaux concernés. En fait, il s’agit simplement de réformer le mode de calcul des cotisations, qui restent comme telles, en s’inspirant de celui de la TVA.

A priori, il semblerait qu’il n’y ait guère de différence notable entre ces deux projets de réforme. En réalité, c’est une erreur évidente si on veut examiner les avantages apportés par cette proposition.

L’arrêt de la Cour de Luxembourg cité ci-dessus stipule que: «Cette disposition [la sixième directive européenne] ne peut donc avoir pour objet d’interdire aux Etats membres le maintien ou l’introduction de droits et taxes qui n’ont pas de caractère fiscal mais qui sont instituées spécifiquement pour alimenter des fonds sociaux». Nous avons donc toute liberté pour légiférer dans ce domaine et, notamment, de fixer les taux qui nous paraissent opportuns. La réforme peut donc être appliquée à la totalité des charges sociales, quelque que soit leur nature – patronales ou salariales – et leur objet – indemnisation du chômage, allocations familiales, santé…

Appliquée à taux plein, il ne fait pas de doute que la compétitivité de nos entreprises serait grandement et instantanément améliorée. Soulignons qu’à la différence des gains de productivité qui sont souvent obtenus par diminution de la part de la main d’œuvre dans la production, elle n’entraînerait aucune diminution des effectifs. Au contraire, notre commerce extérieur serait considérablement amélioré et l’augmentation des exportations jointe à la diminution des importations créerait des emplois nouveaux et des ressources supplémentaires.

On sait que l’une des mesures couramment utilisées pour relancer une activité anémiée consiste à dévaluer la monnaie. Notre intégration à la zone euro nous l’interdit. Mais les économistes s’accordent pour considérer qu’un transfert sur une TVA a les mêmes effets qu’une dévaluation. L’adoption de la TVA sociale « originelle et spécifique  » permet donc de contourner cet obstacle.

Les modalités de prélèvement des cotisations sociales actuelles sont à l’origine d’un cercle vicieux bien connu : augmentation des besoins financiers — augmentation des charges — perte de compétitivité, diminution des ventes — augmentation des besoins financiers etc.

La TVA sociale y substitue un cercle vertueux. En effet une augmentation des ressources et par conséquent du taux de la TV A sociale, n’affecte en rien les prix à l’exportation. Par contre, l’augmentation des prix des importations améliore l’aspect défensif de la TVA sociale à l’égard de la compétition internationale en supprimant l’effet « droit de douane à rebours ».

Sachant qu’un solde du commerce extérieur déficitaire se traduit par une perte de pouvoir d’achat national, son amélioration diminuerait cette perte. Puis, le retour à un solde excédentaire provoquerait une augmentation du pouvoir d’achat de la Nation.

On peut allonger la liste des conséquences bénéfiques pour l’activité et l’emploi.

Avec un impact incontesté sur la compétitivité globale, la préconisation se justifie par des aspects de clarté, de simplicité, d’équité.

L’artifice illusoire des charges dites patronales et salariales, versées globalement par l’entreprise est une différenciation purement symbolique et comptable qui n’est justifiée par aucun impératif, si ce n’est idéologique. C’est un effet d’optique constitutif de complexifications et d’incompréhensions dans les discussions. Pour présenter leurs revendications, les salariés n’ont qu’un critère essentiel, le salaire net perçu, constitutif de leur pouvoir d’achat.

Afin de conforter la récente avancée dans la négociation entre les représentants des salariés et du patronat au niveau des Confédérations Nationales, avec la flexi-sécurité, il convient de clarifier la notion de salaire net, seul critère de référence de la négociation à la base, dans l’entreprise entre patrons et salariés au sein des PME et PMI et surtout des TPE.

Prétendre que les cotisations sont à la charge des entreprises est une supercherie.

Les entreprises répercutent sur leurs prix de vente la totalité de leurs charges et coûts, c’est au final le consommateur qui paie.

Le dialogue actuel Employeur salarié biaisé : les critères d’évaluation sont différents.

Pour les salariés, toutes les discussions et négociations relatives à leur pouvoir d’achat se concrétisent par le montant NET qui figure au bas de leurs bulletins de salaires. Pour les employeurs, au contraire, l’évaluation de leurs coûts salariaux pour la détermination de leurs prix de revient et de leurs marges sont les salaires bruts, y compris les charges dites salariales car elles sont aussi incluses dans les décaissements de leurs coûts de main d’œuvre.

La TVA fiscale est hors de la comptabilité d’exploitation, pourquoi ne pas faire de même pour la TVA sociale.

Les assurances, cotisations aux mutuelles, compléments de retraites, tickets restaurants et autres avantages conventionnels ou contractuels qui n’entrent pas dans les budgets globaux nationaux de péréquation doivent conserver leurs autonomies d’adhésion et de gestion.

Le texte qui admet le principe de la rupture conventionnelle instaure aussi la portabilité de certains droits des salariés. Ce doit être un facteur décisif pour réactiver les négociations directes à l’intérieur des entreprises de toutes tailles particulièrement les plus petites.

Réduction des coûts de gestion dans l’artisanat et les PME

L’élaboration des feuilles de paie, du fait de leur complexité constituent un frein à l’embauche et un surcoût. Elles sont généralement établies par un expert-comptable pour une moyenne de 9 €uros par mois soit 100 €uros par an et par employé. On décompte globalement 20 millions de salariés, cela représente près de 2 milliards d’Euros.

Chez nos voisins anglais une fiche de paie comporte simplement trois lignes : le salaire brut, moins le pourcentage global des retenues sociales pour obtenir le salaire net versé.

N’importe quel employeur devrait pouvoir établir une fiche de paie avec une calculette sur un chantier, devant un salarié, dans une négociation d’embauche ou d’augmentation de sa rémunération.

Favoriser les circuits courts de proximité et assainir la concurrence par la réduction des marges des intermédiaires dans la distribution :

S’agissant d’une TVA pour l’emploi, si elle n’était pas déductible sur les achats, contrairement à la TVA fiscale, elle devrait handicaper les intermédiaires qui se contentent uniquement de prélever des marges sans apporter de valeur ajoutée par un service réel, par transformation ou valorisation matérielle. Il ne s’agit pas d’avantager de pénaliser tel ou tel produit, ou branche professionnelle, de faire payer les robots ou les investissements productifs mais d’inciter à la relocalisation par la consommation donc inciter la production et les emplois locaux. L’objectif étant de contrarier la globalisation marchande, de préserver notre milieu, notre qualité de vie, nos échanges de proximité.

Les producteurs de fruits et légumes n’arrivent plus depuis des années à vivre dignement de leur travail, les coûts de collecte avec charges sont trop élevés et les consommateurs peinent à acheter leurs productions saisonnières en se rabattant sur des légumes et fruits importés. Ce n’est pas avec des autorisations de vente au déballage boudées par la grande distribution que l’on inversera la tendance.

Lutte contre le travail dissimulé et la fraude

Les services de contrôles des URSSAF connaissent et suivent régulièrement toutes les entreprises en ce qui concerne les entrées et sorties de personnel, mais aussi les chiffres potentiels d’activités. Ils disposent de prérogatives qui leurs permettent de procéder à des investigations aussi poussées que celles des inspecteurs des services fiscaux. La complémentarité de leurs missions de suivi et de vérifications avec les services fiscaux est évidente et très fructueuse.

La suppression de l’ensemble des aides et primes à l’emploi :

Elles sont l’objet de polémiques permanentes, leur efficacité n’est pas démontrée. Elles sont une entrave déloyale à la concurrence dans de nombreuses activités de prestations de services. Elles ont favorisé le travail à temps partiel et les bas salaires.

Leur multiplicité a engendré un maquis de circulaires et de procédures.

Elles engendrent des effets sectoriels et de distorsions de concurrence, ainsi que des effets d’aubaine dénoncés par les organisations syndicales de salariés.

Pour l’Etat la ponction n’est pas négligeable surtout si l’on intègre les frais de distribution et de contrôle diligentés par les agents de l’administration.

La gestion de la protection sociale des travailleurs et de leurs familles doit rester dans le domaine des prérogatives des partenaires sociaux. Les structures paritaires de collecte, d’administration et de gestion sont opérationnelles, il ne s’agit nullement d’en modifier les missions, elles doivent conserver leurs autonomies. ( URSSAF, CPAM, CAF, Caisses de retraites). Les mandats sociaux restent un témoignage permanent de la représentativité.

Avec la concrétisation de cette proposition, sans évincer les partenaires sociaux des organismes paritaires de gestion, la représentation parlementaire nationale disposerait d’un véritable pouvoir d’orientation et de décision sur les résultats et les perspectives des budgets sociaux annuels de la nation. Depuis sa création l’UNEDIC a bien adapté ses prélèvements en fonction des nécessités d’indemnisation.

Les budgets globaux du Trésor Public et des Comptes de la protection sociale au niveau de la nation doivent rester distincts dans leur collecte et dans leur gestion.

L’objectif exclusif de réduction des budgets globaux de la couverture maladie et des retraites est un fourvoiement, comme en témoignent tous les plans antérieurs. C’est indisposer de nombreux citoyens électeurs. C’est priver la nation d’un potentiel de services non délocalisables, facteurs essentiels d’activités donc de réduction du chômage par le maintien ou la création de nombreux emplois. Les protestations relatives à l’instauration récente de franchises sur les médicaments en sont l’illustration récente.

La TVA sociale est un prélèvement équitable.

Son assiette n’est pas uniquement basée sur le travail des salariés, mais sur la totalité des coûts de production et de distribution dans lesquels sont inclus les marges, donc les profits des capitalistes. Les consommations individuelles et familiales sont proportionnelles aux revenus. Seront pénalisés les gaspilleurs et les frimeurs ainsi que les fraudeurs et profiteurs de l’économie souterraine. Suivant l’utilité ou la nécessité. La polémique sur les caractères inégalitaire et inflationniste de la TVA sociale qui répondait à une stratégie politique ont suscité un tabou. Exciter un antagonisme entre les intérêts du consommateur et ceux du citoyen, tous deux bénéficiant de la couverture maladie depuis l’instauration de la CMU, est une manipulation partisane qui doit être expliquée et dénoncée.

Il ne reste plus qu’une question: Combien de temps, de crises et de manifestations de rue faudra-t-il pour que les pouvoirs publics se décident enfin à adopter une réforme qui s’impose à l’évidence ?

VINCENT Jean augustin

 

BIen comprendre la TVA Sociale

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