Tribune de NDA et Rama Yade : « La fin de l’envoi postal du matériel électoral constituerait-elle une atteinte à la démocratie ?»

A travers trois tribunes distinctes, Marc Dolez, député du Front de gauche, Philippe Vigier,président du groupe UDI à l’Assemblée nationale et le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan avec Rama Yade expriment leur opposition à ce projet. Les députés ont massivement repoussé la semaine dernière le projet du gouvernement de supprimer l’envoi postal des professions de foi et des bulletins de vote pour les législatives 2017. L’exécutif avait déjà tenté le coup au sujet des dernières élections départementales et régionales, sans succès. Il conserve néanmoins le droit de supprimer par décret l’envoi du matériel électoral pour la présidentielle de 2017.
  • Nicolas Dupont-Aignan (président de Debout la France) et Rama Yade. « Quand le Gouvernement n’arrive plus à convaincre les Français, il restreint leur liberté de choix ! »

« La crise de la représentation politique est désormais maximale et plus personne n’en conteste sérieusement la réalité. Dégoûtés par les « affaires » à répétition, exaspérés par les fausses alternances sans lendemain, aux prises avec un profond marasme économique et social, les Français se réfugient massivement dans l’abstention. La situation empire d’année en année, qui voit notre démocratie sombrer sous le poids des lassitudes, des déceptions, des rancœurs et des peurs accumulées.

Refusant de s’amender, nos gouvernants ne savent plus que manipuler pour se maintenir au pouvoir. Après son offensive de décembre 2015 qui a durci les modalités d’organisation des élections présidentielle et législative au détriment des candidats indépendants (pour eux, complication du recueil des 500 signatures et temps de parole médiatique réduit durant la précampagne), le gouvernement est reparti à la charge sur une autre mesure du même genre sur laquelle il avait alors dû reculer : la suppression de la « propagande électorale » papier – reçue par chaque électeur à leur domicile.

Marc Dolez, député du Front de gauche (groupe GDR). « Il s’agit d’une rupture d’égalité entre les candidats et d’une atteinte au pluralisme. »

Les députés ont heureusement refusé une nouvelle fois mardi 8 novembre dernier cette dématérialisation. Une première bataille a ainsi été gagnée, mais rien n’est encore joué car le gouvernement pourrait toutefois passer outre ce vote. En effet, les règles d’organisation de la présidentielle sont définies par décret, non par la loi. Le projet de budget examiné par les députés ne visait ainsi que les élections législatives.

Dans le système actuel, tous les candidats sont soumis à une égalité stricte, leurs documents de campagne obéissent aux mêmes standards de format et de poids et la charge financière est intégralement et directement supportée par l’Etat. La suppression de l’enveloppe envoyée par courrier à chaque électeur introduira en revanche une inégalité foncière entre les candidats, au bénéfice des grosses écuries du PS, de LR et du FN : en effet, assurés de dépasser le seuil requis de votants donnant accès au remboursement des frais de campagne (fixé en France à 5% au premier tour de la présidentielle), leurs candidats continueront à envoyer par la poste leur profession de foi aux électeurs et à donc à bénéficier du financement intégral de ces envois, ce que ne pourront pas se permettre des candidats indépendants aux moyens financiers plus limités. Concrètement il y aura réduction de l’offre politique par abus de position dominante.

Et ce n’est pas la diffusion sur internet qui compensera l’avantage de notoriété exorbitant que se paieront les candidats du système tri partisan avec l’envoi de documents papier. Ce seront non seulement leurs programmes qui seront surreprésentés dans l’offre électorale, mais aussi leurs personnalités, qui apparaîtront mécaniquement comme « naturelles », sinon officielles.

Philippe Vigier, président du groupe UDI de l’Assemblée nationale. « La vie démocratique n’est ni un luxe ni un privilège, et ne doit jamais le devenir.

»Toutes les études montrent ainsi qu’un lecteur n’apporte pas la même attention à un support numérique qu’à un document papier. L’expérimentation de la dématérialisation de la propagande officielle, lors des dernières élections départementales et régionales, l’a d’ailleurs amplement démontré : seuls 2% des électeurs ont consulté le site internet mis à leur disposition ! Enfin, n’oublions pas qu’un Français sur cinq – selon les chiffres 2015 de l’ARCEP – ne dispose d’aucun moyen de connexion numérique et donc d’aucune adresse courriel usuelle et identifiée… Bref, cette mesure bouleversera l’habitude qu’ont nombre d’électeurs d’examiner rituellement les papiers électoraux à tête reposée, en les comparant parfois dans tous les sens, selon leur propre fantaisie. Ce, au seul détriment des candidats indépendants et du pluralisme qu’ils portent, cibles manifestes de cette réforme anti-démocratique, rétrograde et hypocrite.

Mais qu’en est-il de l’argument financier, principale justification avancée par le gouvernement en faveur de la dématérialisation ? Il ne vaut pas mieux : non seulement il exagère le soi-disant gaspillage que constituerait le système actuel, mais surtout il néglige le surcoût pour les deniers publics que risquent d’entraîner les effets pervers de la dématérialisation.

En effet, selon le système actuel, l’envoi à chaque citoyen de la propagande électorale – présidentielle et législative – coûtera en 2017 environ 150 millions d’euros, soit environ 4€ par électeur et moins de 0,05% du budget de l’État. C’est aussi le coût de la réserve parlementaire. Alors que la démocratie n’a pas de prix, on ergote sur le coût, inévitable des deux rendez-vous électoraux majeurs de la Ve République, et ce au détour d’une loi technique, en catimini, loin des yeux de nos concitoyens ! Mais c’est d’autant plus malhonnête que, comme l’ont démontré des expériences faites à l’étranger (en Allemagne par exemple), le prétendu argument du moindre coût par la dématérialisation ne tient pas une seconde.  Ainsi, l’inégalité de traitement entre les candidats voulue par le Gouvernement n’est pas seulement injuste et attentatoire au pluralisme électoral, elle est aussi dispendieuse…

Des élections moins ouvertes, plus coûteuses et, au total, dévalorisées… Incapable de convaincre, sentant venir le vent du boulet, le Gouvernement, lancé dans une stratégie de prise en otage de notre démocratie, cherche assurément à restreindre la liberté de choix des électeurs. C’est un déni démocratie ! Parlementaires, militants et simples citoyens, mobilisons-nous tous pour l’en empêcher et préserver notre démocratie, saine et bien vivante ! »

Nicolas Dupont-Aignan et Rama Yade

 

 

11 commentaires sur Tribune de NDA et Rama Yade : « La fin de l’envoi postal du matériel électoral constituerait-elle une atteinte à la démocratie ?»

  1. Edmond Romano // 21 novembre 2016 à 16 h 59 min //

    Le tout informatique est une hérésie! Nous avons, en France, des personnes âgées qui ne savent pas utiliser internet mais qui sont électrices ou électeurs. Nous avons certains de nos concitoyens qui par choix ou par nécessité n’ont pas de connexion internet. Deviendront-ils des électeurs de seconde zone qui n’auront pas les mêmes informations que les autres. Quant à l’argument qui consiste à dire que les « professions ne sont pas lues » et que cela peut justifier ce projet, cela revient à dire que puisque la presse papier est de moins en moins lue il faut supprimer les journaux.

  2. A Jean Paul Delaisse…..vous n’avez pas tort, mais hélas plus il y a de moyens de s’informer plus il y a de gens qui disent ne pas savoir….lire, entendre ,voir peut-être devient difficile pour de plus en plus de sinistrés intellectuels précoces. A confondre buts et moyens on en arrive là…..comme vous dites : « au désintéressement de nos règles de vie »….alors pourquoi ne pas supprimer les allocs, les aides , les subventions à celles et ceux qui profitent du « système » sans se mouiller en allant voter après s’être informés ?

  3. JEAN-PAUL DELAISSE // 19 novembre 2016 à 11 h 32 min //

    Sauf erreur, je crois que ce système de diffusion papier a été destiné, à l’origine, pour que justement, personne ne puisse dire qu’il ne savait pas.
    Cela étant, il est sur que actuellement, les moyens de diffusion sont tout autre, sauf que beaucoup n’ont pas les moyens des les avoir, ou tout simplement (cela du à notre système éducatif depuis deux générations) ils ont perdu la curiosité et/ou les moyens intellectuels d’apprécier (sens propre) objectivement la politique (déjà dur pour nous !), les professions de foi, que ce soit sur papier personnels, ou diffusés par un média quelconque….

  4. A Alain Kerhervé…;A quoi servent donc les multimédias et pas seulement Internet…la « téloche », les smartphones, la presse papier, les panneaux d’affichage Municipaux, les panneaux à affichage variable des municipalités (celles qui en ont installé)….celui qui veut s’informer le peut sans obligation !Mais vous avez peut-être raison il y en aura toujours qui diront n’avoir pas été mis au courant!

  5. Vous allez trop loin. Bientôt, choisirons-nous le corps électoral en fonction des diplômes, de l’accès à internet…. ?

  6. Faire des économies, certes, mais l’accès à Internet n’est pas une obligation, n’est pas aussi facile qu’on peut l’imaginer, vous et moi faisant partie de ceux qui l’utilisent régulièrement. Les documents papier ont au moins le mérite de mettre chacun des électeurs en mesure de connaître les candidats et leur programme.

  7. Encore une occasion manquée pour faire des économies d’autant qu’il n’est pas certain que les professions de foi soient lues par chaque destinataire. Quant à l’excuse du non accès à Internet en raison de zones blanches, de non maîtrise de l’informatique ou de non disponibilité de matériel il existe de nombreux moyens existants pour s’informer enfin pour celles et ceux qui sont déterminés. Enfin avec ou sans matériel électoral adressé à domicile il restera à se déplacer au bureau de vote et ce quelque soit le temps…..et là ce n’est pas gagné pour faire reculer l’abstention.

  8. Des profession de foi de candidats(e)s pour la plupart sans foi ni loi^(Merci Anne Marie de ne nous avoir ouvert aux menteurs et aux hypocrites), voilà des économies qui seraient les bienvenues d’autant que celles et ceux qui ne savent pas lire ni comprendre sortent de plus en plus nombreux dus système éducatif totalement défaillant et que les trop âgés ou en zone blanche, devront de toute façon être en bonne condition physique pour se déplacer jusqu’au bureau de vote.
    Voilà à quoi on consomme notre énergie en France à confondre buts et moyens et face à cet écueil la gauche et la droite s’enlisent et nous avec !!!!!

  9. JEAN-PAUL DELAISSE // 16 novembre 2016 à 18 h 30 min //

    On n’est plus à une co..ie près ! mais là, le déni de Démocratie vient des élus issue de la Démocratie. On n’est plus non plus à une fourberie de plus.
    Et d’aucun souhaiterait reconduire ces bandes de charlots ???
    Ils ne rêvent même plus, ils ne sont plus parmi nous, donc inutile de prendre des gants avec ces gens là.

  10. ARNAUDON Anne Marie // 16 novembre 2016 à 16 h 20 min //

    Bonjour, je ne suis pas pour que tout se fasse sur l’ordinateur. Je pense tout bêtement aux personnes qui n’en ont, ne savent pas suffisamment s’en servir. De plus la lecture est plus difficile sur l’écran que sur papier. Vous me répondrez, justement, que l’on peut l’imprimer, oui bien sûr, seulement pourquoi serait-ce à nous contribuables à supporter leurs frais de campagne ? Sont-ils tellement fauchés qu’ils n’ont plus les moyens de faire appel à un professionnel ?? Je me pose la question ? Oui c’est également un autre moyen pour que des milliers de gens, voire davantage, ne puissent pas lire la « profession de foi »…donc pour faire un choix compliqué. J’avoue que je ne comprends pas du tout ce gouvernement NUL comme jamais je n’en ai vu….Ils sont menteurs, hypocrites, hier encore Mme BELKACEM a répondu qu’elle continuait son travail jusqu’aux prochaines élections à venir, puis pendant encore un quinquennat tant elle est certaine que les français étaient ravis de leurs réformes !!!!!! Il y a des rêveurs ou rêveuses…

  11. S’il n’y avait que cela mais c’est tout le système électoral devenu quasiment censitaire pour réserver aux grandes formations le monopole de la représentation nationale et de l’expression publique.

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