Turquie : Que diable viendrait-elle faire dans l’UE ?
Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis… toujours tient chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il commente très librement l’actualité politique.
Il y a près de trente ans, le 14 avril 1987, la Turquie se portait officiellement candidate à l’entrée dans la Communauté économique européenne, forme institutionnelle, à l’époque, de ce qui est devenu l’Union européenne.
Arguant de leur bonne volonté, les dirigeants de la République fondée par Atatürk avançaient quelques arguments qui n’étaient dénués ni de force ni de valeur. N’étaient-ils pas restés fidèles à l’intransigeance laïque du grand homme qui n’avait pas hésité, bottant les fez des traditionalistes et dévoilant le visage des femmes, à imposer par la force la modernisation de son pays ? Alliée des États-Unis, d’Israël, membre de l’OTAN, la Turquie ne s’était-elle pas comportée depuis la fin de la deuxième guerre mondiale en fidèle sentinelle aux avant-postes de l’Occident face au bloc soviétique ? Ne pouvait-elle se prévaloir d’une tradition démocratique qu’avaient à peine interrompue à quelques reprises depuis 1920 quelques interventions d’une armée profondément kémaliste et aussi prompte à rendre le pouvoir aux civils qu’à le leur confisquer de temps à autre pour le salut de la patrie ? Si plus des neuf dixièmes du territoire turc se situaient en Asie, le reste, et en tout cas la moitié d’Istanbul, l’ancienne Constantinople, bâtie sur les rives du Bosphore ne se situait-il pas en Europe ? Au demeurant, si la légitimité géographique de la demande d’adhésion turque pouvait faire débat, l’attachement du pays, de son gouvernement, de sa population, à ses alliances, ses liens politiques, militaires, économiques et culturels avec les démocraties occidentales étaient hors de doute.
Ainsi en allait-il du moins avant l’arrivée au pouvoir de Recep Tayip Erdogan et du Parti de la Justice et du Développement, l’AKP, en 2002. Légalement élu, mais sur une base confessionnelle, le militant islamiste, nationaliste et conservateur que n’avait jamais cessé d’être l’actuel président de la République turque, n’a que peu à peu tombé le masque démocratique dont il s’était affublé pour séduire l’électorat et révélé le sens et l’ampleur du programme de régression dont il était le porteur. C’est un grand bond en arrière que M. Erdogan a fait accomplir à son peuple, à travers une série parfaitement cohérente de mesures et d’orientations qui font revivre, en ce début du XXIe siècle, les mœurs, les intrigues et les ambitions de l’ancien empire ottoman.
M. Erdogan, au fil des années, a soit imposé soit autorisé soit encouragé le réencapuchonnement des femmes dans la rue, dans les administrations, dans les écoles et jusque dans l’Université. M. Erdogan, sous couleur de mettre au pas l’armée et la justice, a intimidé, limogé, écarté, traduit devant les tribunaux les militaires et les magistrats qui s’opposaient à la reprise en main de la société par l’Islam. La Turquie de M. Erdogan est à ce jour le pays au monde qui a incarcéré et condamné le plus grand nombre de journalistes.
Affaires intérieures, dira-t-on. Venons-en donc au plus grave, c’est-à-dire au virage sournois de la politique étrangère d’Istanbul.
Nominalement toujours membre de l’OTAN, la Turquie de M. Erdogan a sous ce rapport la consistance et la fiabilité d’une planche pourrie. Elle ne s’est pas bornée, pendant la guerre d’Irak, à interdire l’utilisation de ses aéroports par l’aviation américaine, puis à en différer le plus longtemps possible l’usage face à Daech. La Turquie de M. Erdogan est ce pays qui jusqu’à ces derniers mois laissait transiter par son territoire les volontaires qui rejoignaient l’État islamique. La Turquie de M. Erdogan est ce pays qui, de mèche avec les monarchies du Golfe, acharné à précipiter la chute de Bachar el Assad, a financé et armé les organisations regroupée dans le Front al Nosra, filiale d’Al Qaida. La Turquie de M. Erdogan, officiellement partenaire de la coalition constituée par Washington pour lutter contre le terrorisme sunnite, est officieusement partie prenante de la coalition sunnite qui sabote la lutte contre Daech et fait la guerre aux chi’ites. La Turquie de M. Erdogan, bien loin de lutter contre Daech, consacre le plus clair de son énergie à réprimer, à bombarder, voire à assassiner, chez elle ou en dehors de ses frontières, les combattants kurdes qui luttent en première ligne pour leur indépendance et contre la barbarie. La Turquie de M. Erdogan, qui a pratiquement rompu sa vieille alliance avec Israël, interdit son espace aérien à l’aviation russe désormais engagée contre les islamistes. La Turquie de M. Erdogan joue en permanence un double jeu conforme à la tradition de la Sublime Porte et soutient dans l’ombre ceux mêmes qu’elle est supposée combattre au grand jour. La Turquie de M. Erdogan excite sur son propre sol et à travers toute l’Europe le nationalisme de son propre peuple et poursuit le rêve anachronique d’un nouvel empire touranien. Dans ces conditions, que diable viendrait-elle faire sur la galère de l’Union européenne ? La Turquie de M. Erdogan a choisi son camp, et ce n’est pas le nôtre.
Dominique Jamet
Sans entrer sur le sujet ou la question , trop brûlants il est vrai en ces temps où la moindre parole peut-être déformée ou se muer en étincelle dont d’ autres d’ Orient ou d’ailleurs pourraient faire les frais , il n’y a pas , il n’ est pas de pays-de-quelqu’un et c’ est aussi la leçon tirée d’un jour et de la reconnaissance de la Chine par la France . Car faudrait-il ainsi plus largement résumer la Russie à M. Poutine , l’ Allemagne à Mme Merkel , les Etats-Unis d’hier à M. Bush , et faut-il envenimer à résumer hâtivement et jeter toujours et encore l’ anathème , et quand on se réclame des nations , et quand d’ici ou là on se réclame du gaullisme et de gouvernement ? Ou faut-il , appuyés sur les réalités et échappant à la seule logique des intérêts et liens du commerce mais gardant une autre logique politique et de diplomatie , d’ espérance aussi , s’ en tenir , en nommant les pays , à respecter d’hier , aujourd’hui et demain , à travers leurs noms car au nom de leurs peuples , les peuples et les nations dans leur indépendance ? Les murs ou les murailles ne sont pas que de pierres , les mots blessants sont pire que ciment ou béton , ils entretiennent ou préfigurent querelles et murs de jets de pierres . De politique imprégnée de culture , la diplomatie est aussi un art de faire des ponts . Les accords aux accords se succèdent , les efforts aux efforts se répondent ou s’ appellent , souvenirs d’ un pont et par Charles de Gaulle et Konrad Adenauer , ou d’ autres ponts , cultures aussi , de Menuhin et Furtwängler , de citronniers en oliviers aussi . Des ponts ou des murs ?
Nos »amis yankees » depuis des années veulent faire rentrer ce pays dans l’union E. La FRANCE DOIT SORTIR DE CE MACHIN comme elle DOIT SOTIR DE l’OTAN. la messe sera dite.
Que diable viendrait faire la Turquie dans l’UE ? Mais profiter de l’UE cher Dominique Jamet comme la Grèce, par exemple, ennemi héréditaire d’Ankara !
Pourquoi ce que l’on accorde à Athènes ne l’accorderait-on pas à Ankara alors que Grecs et Turcs sont dans l’OTAN ?
La constance de la pensée turque c’est de brouiller les cartes à plaisir à la manière d’un derviche tourneur dont on a peine à discerner les traits du visage.
Oui İstanbul n’est plus Constantinople depuis des siècles et nous peinons à en prendre conscience dans ce monde nouveau des tentatives de retour aux anciens empires pour nombre de responsables politiques de pays nostalgiques des grandeurs du passé de toutes les formes de nationalismes.
Dans une optique gaullienne et non gaulliste il est ou était envisageable d’intégrer la Turquie au sein de l’UE dans le cadre d’une Europe qui serait clairement une confédération d’états et de nations pour rééquilibrer l’Europe vers le sud. Comme les « gaullistes » n’ont plus aucune considération géopolitique ils sont contre mon avis, comme un parti de droite classique.