Il y a 50 ans : De Mai 68 à Avril 1969
De Mai 68
L’année 68 est marquée par une série de révoltes étudiantes un peu partout dans le monde. Ainsi, successivement, dès février, Prague puis Rome, en avril les Etats-Unis, la Pologne, l’Allemagne sont agités par les émeutes estudiantines.
Février, début du printemps de Prague en Tchécoslovaquie, mais aussi occupation de l’Université de Rome (occupation de la villa Borghèse). C’est la « bataille de valle giulia ». Aux Etats-Unis, en Pologne, en Allemagne en avril « émeutes de Pâques ».
En France, le calendrier et les événements concernent en 3 périodes et domaines
Origine Étudiante
Le « mouvement du 22 mars », organisation étudiante de la faculté de Nanterre, menée par Daniel Cohn-Bendit, peut être perçu comme le détonateur des événements de mai 68. Organisation étudiante (moins de 150 membres) gauchiste, libertaire, le mouvement multiplie les manifestations :
– revendication pour l’accès libre des garçons dans les chambres des filles de la résidence universitaire,
– opposition à la guerre du Vietnam, soutien à un militant du Comité Vietnam arrêté quelques jours avant,
– occupation des locaux administratifs de la Faculté,
– assemblées générales pour l’expression d’une auto-organisation de la démocratie directe,
– contestation de l’Université, de son mode d’enseignement
– pour l’établissement d’un contrôle continu, entre autre…
Le 3 mai 1968, , un meeting organisé dans la cour de la Sorbonne auquel participent des étudiants de Nanterre provoque l’arrestation de quelques 600 manifestants…et entraîne les premiers affrontements dans le Quartier latin. « Libérez nos camarades ! » devient le slogan des étudiants. Des confrontations entre le « Mouvement du 22 mars » d’extrême gauche et « Occident » d’extrême droite dégénèrent dans les locaux universitaires.
Le doyen suspend les cours à la Sorbonne le lendemain 4 mai.
Les manifestations étudiantes gagnent les villes de province. Les émeutes à Paris embrasent le Quartier Latin dans la nuit du 11 mai.
Economie et Sociale – A compter du 11 mai, le monde économique emboîte le pas aux étudiants. A l’appel des syndicats, les occupations d’usines, d’entreprises publiques et privées, des services de la fonction publique se multiplient. Les défilés et manifestations animent les rues des villes.
Le mouvement de contestation s’étend à tous les secteurs de l’économie, dans une France quasi paralysée, du fait des grèves, du non-approvisionnement des stations service.
Le nombre des grévistes est estimé à 8 millions au soir du 21 mai. Aux revendications économiques et sociales, s’ajoutent des slogans à caractère politique : « 10 ans ça suffit » Le général de Gaulle s’invite dans les cortèges !
Commence alors le Grenelle social – 25-27 mai.
Malgré la confusion ambiante, le gouvernement engage des contacts avec les confédérations syndicales et le patronat. Après deux jours et deux nuits de concertations, ces négociations débouchent sur les « accords de Grenelle« , siège du ministère du travail. Ces accords débouchent essentiellement sur :
– une revalorisation de 35% du SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti),
– une augmentation moyenne des salaires de 10%
– une réduction de la durée du travail (vers les 40 heures hebdomadaires)
– l’abaissement de l’âge de la retraite
– une reconnaissance des sections syndicales d’entreprise,
Tous ces domaines entraînent une révision des conventions collectives (accords de branches)
Politique. 28 mai : Dans une conférence de presse, François Mitterrand, leader de la gauche socialiste, considérant qu’il y a vacance du pouvoir, se déclare candidat à la Présidence de la République alors qu’il n’y a nullement de démission du Chef de l’État et de son gouvernement. De son côté, Waldeck Rochet réclame, au nom du parti communiste, un gouvernement populaire d’union avec participation communiste ( Il s’inspire du Front Populaire de 1936 ).
24 mai A la TV, le Président Charles de Gaulle propose l’organisation en juin d’un référendum portant sur la participation dans les entreprises et les universités.
29 mai : disparition de De Gaulle à Baden-Baden. De retour de chez Massu à Baden-Baden en Allemagne, Charles de Gaulle affirme : je me suis mis d’accord avec mes arrières pensées » … et dans un discours vigoureux qu’il délivre à la radio.
« Étant le détenteur de la légitimité nationale et républicaine, j’ai envisagé, depuis vingt-quatre heures, toutes les éventualités, sans exception, qui me permettraient de la maintenir. J’ai pris mes résolutions. Dans les circonstances présentes, je ne me retirerai pas. J’ai un mandat du peuple, je le remplirai. Je ne changerai pas le Premier ministre, dont la valeur, la solidité, la capacité, méritent l’hommage de tous. Je dissous aujourd’hui l’Assemblée nationale.. »
31 mai, partout en France et notamment à Paris, des manifestations de soutien à de Gaulle sont organisées. A Paris, un million de personnes défilent sur les Champs-Élysées.
L
les 23 et 30 juin, les Français sont appelés aux urnes pour élire les députés. C’est un raz de marée gaulliste pour les candidats qui soutiennent le Général. (294 sièges UDR sur 485 députés qui siègent à l’Assemblée nationale, soit 60% des sièges)
Le départ de Charles de Gaulle
Malgré cette large victoire électorale, le Général souhaite aller plus loin dans les réformes qu’il juge indispensables. Il veut achever la décentralisation politique et administrative, développer le volet social-économique de la « participation ».
Après la nomination de Maurice Couve de Murville à Matignon le 13 juillet 68, le Général communique aux membres du gouvernement une note explicite sur le référendum qu’il envisage pour le printemps suivant.
« Il s’agit d’organiser sur trois plans différents mais conjugués, la participation des intéressés à la marche des activités qui les concernent. » précise-t-il.
Cette note du 30 juillet 1968 détermine toutes les composantes du projet de loi référendaire :
- L’institution d’un Sénat économique et social,
- La création des conseils régionaux,
- La participation du personnel à la vie de l’entreprise, et la réforme de la représentation syndicale.
En visite à Quimper le 2 février 1969, il annonce officiellement le référendum
Mais sachant que la participation dans les entreprises ne peut figurer dans le texte référendaire, le référendum de 1969 traitera que de deux points : la régionalisation et la réforme du Sénat.
Régionalisation axée sur la décentralisation
- Les collectivités territoriales sont bien définies : commune, département, région. Promoteur de la décentralisation, il rappelle avec force que cela n’est possible que si l’ensemble du territoire évolue dans la cohérence… En conséquence, il réaffirme, et avec toujours autant de détermination, le rôle du Plan quinquennal. (Cette « ardente obligation » ainsi qualifiée par le Général.)
Réforme du Sénat
- Le général de Gaulle souhaite dans le cas de la réforme du Sénat y inclure la représentation syndicale des salariés et du patronat.
- Le Sénat ainsi bien identifié se voit attribuer ses domaines de compétences : collectivités locales et activités économiques, sociales et culturelles
Une véritable conspiration et coalition anti de Gaulle s’organise alors, incluant
- La gauche et les syndicats de salariés,
- Les centristes et Valéry Giscard d’Estaing,
- Et une large partie du patronat
Charles de Gaulle perd son référendum du 27 avril 1969 (Oui : 47.52%, Non : 52.41%) et donne immédiatement sa démission le 28 avril 1969 à 0h11 : « Je cesse d’exercer mes fonctions de Président de la République. Cette décision prend effet aujourd’hui à midi. »
Il reste le seul exemple d’un chef d’État qui se retire suite à une défaite qu’il assume totalement alors qu’il pouvait sans aucune crainte s’appuyer sur la majorité parlementaire la plus forte à l’Assemblée Nationale jamais enregistrée sous la Ve République. C’est la décision d’un « chef », d’un visionnaire, d’un guide désavoué.
Respectueux de la démocratie, fidèle à la parole donnée et à son engagement, Charles de Gaulle s’éclipse et s’éloigne de la France pour ne pas gêner, ni être impliqué dans la campagne électorale présidentielle à venir, celle de sa propre succession.
« Si c’est non, je m’en vais. Il s’agit d’un sujet essentiel. Si les Français me désavouent, c’est qu’ils ne sont pas d’accord avec ma politique ».
Charles de Gaulle
Mais que le rejet de ce référendum à fait perdre de temps à la France !
Ce doit être très beau mais c’est loin , l’Irlande . Ce n’est pas l’Irlande , ici . C’est très joli la France aussi . Et puis du Gorse ou d’ une baie de Lampaul aussi . Le granit face à la vague
Le long récit de 50 ans de descente aux enfers et de malheurs exemplaires!
J’ai, d’instinct, l’impression que la Providence l’a créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires. S’il advient que la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, j’en éprouve la sensation d’une absurde anomalie, imputable aux fautes des Français, non au génie de la patrie. Mais aussi, le côté positif de mon esprit me convainc que la France n’est réellement elle-même qu’au premier rang ; que, seules, de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de dispersion que son peuple porte en lui-même ; que notre pays, tel qu’il est, parmi les autres, tels qu’ils sont, doit, sous peine de danger mortel, viser haut et se tenir droit. Bref, à mon sens, la France ne peut être la France sans la grandeur. »
Nous sommes le dernier carré ! tenons bons pour passer le relai.
Difficile . De multiples chemins , de vie , de vies , d’efforts , sinon qu’est ce que vivre ?
Pour finir c’est toujours elle qui gagne.
Du référendum sur la régionalisation et la réforme du Sénat, fixé au 27 avril 1969, de Gaulle veut faire le couronnement de son oeuvre politique. Six mois auparavant, lors d’un séjour à Colombey, il avait confié à Jacques Vendroux : « Quand cela sera en place, je pourrai me retirer satisfait de ce que nous aurons accompli. Il ne me restera plus alors qu’à terminer mes mémoires. Et ce ne sera pas non plus un mince traval ».
Dans les semaines qui suivent l’ annonce de cette consultation nationale, le Général aime s’enquérir de l’état d’esprit des Français. Jacques Vendroux, en sa qualité de beau-frère, n’hésite pas à lui part du climat franchement mauvais des partis politiques qui spéculent déjà sur le départ du Général. Valery Giscard d’Estaing est hostile. Les déclarations de Georges Pompidou à Rome ( « j’aurai si Dieu le veut un destin national ») n’inquiète pas de Gaulle. Mais il se rend compte rapidement qu’il aura du mal à faire triompher son point de vue. Il se refuse pourtant à intervenir. De Gaulle écoute son beau-frère sans dire un seul mot. Et enfin, pour toute réponse, il confirme qu’il partirait si le non l’emporte au référendum.
Aprés l’échec et la démission Jacques Vendroux rapporte cette conversation et ces paroles du Général. j’en cite un extrait:
… Bien sûr la stabilité du gouvernement qu’assure la constitution que j’ai imposée permettra à Pompidou de poursuivre tant bien que mal son petit bonhomme de chemin. Mais les paroles et les compromis redeviendront vite une habitude. Alors le pays retombera dans la médiocrité…Les gens seront surtout préoccupés de leurs vacances, de la troisième chaîne, du stationnement, du prix des huitres; ils renâcleront bien entendu à consentir des efforts et les disciplines nécessaires à notre maintien au rang de grande puissance… Nous dépendrons plus ou moins des Américains, des Russes ou des Allemands, jusqu’au jour où des événements graves remettront tout en question. Quand une génération a usé de tout son courage pour gagner une guerre épuisante, elle est fatiguée et n’aspire plus qu’à, la facilité…Il faut attendre la génération suivante, ou celle d’aprés pour faire à nouveau de grandes choses. c’est pour cela que la France a connu des hauts et des bas tout au long de son histoire. Mais, pour finir, c’est toujours elle qui gagne.
Solitude irlandaise
« Dans le tumulte des hommes et des événements, la solitude était ma tentation. Maintenant elle est mon amie …
j’ai trouvé ce que je cherchais : être en face de moi-même.
Rassurez-vous, un jour je ne manquerai pas de mourir »
Rf 21.4.2019
Merci de nous faire revoir ce discours de Quimper, vu à l’époque à la tv !
le combat continue
Aujourd’hui, que devons nous voter pour remplacer le Général De Gaulle ?
Je n’avais pas le droit de voter (- 21 ans), je suis restée triste de le voir partir le Général De Gaulle qui fut un grand homme politique. Regrets.
Quelle alternative à la démocratie représentative ?
En réponse à des décisions considérées comme injustes et déconnectées des réalités, de plus en plus nombreux sont ceux et celles qui manifestent leur volonté de prendre en mains leurs problèmes.
Si l’on ne peut actuellement envisager d’abandonner totalement la démocratie représentative, il est concevable de la conduire à cohabiter avec une démocratie directe et participative.
Que peut-on proposer quand l’antinomie entre les citoyens et l’élite représentative rend totalement improbable le désir de conjuguer la transversalité des activités avec la verticalité du pouvoir.
Il faut bien reconnaitre que la démocratie représentative est synonyme d’immobilisme entre deux élections représentatives.
C’est pourquoi je demeure convaincu qu’il faut que notre République française facilite la création d’agoras citoyennes au sein de bassins de vie en les incluant dans la loi. Afin que ces structures puissent se regrouper et présenter des requêtes communes à l’échelon régional. Ceci implique de conférer globalement aux porte-paroles des bassins de vie un pouvoir comparable à celui d’un président de région. Chaque demande devrait faire l’objet d’une réponse répondant à l’intérêt du plus grand nombre. Dans le but d’éviter une autre forme de délégation représentative, les négociations devraient se situer au niveau régional. Charge au président de région de solliciter l’instance compétente pour donner des réponses acceptables et négociables.
Lire « de Gaulle, 1969 » le remarquable livre d’Arnaud Tessier paru ces Perrin offre une vision de l’après Mai 68 en France sous l’angle gaullien.