Luc Ferry : « Individualisme mou, communautarisme dur »
CHRONIQUE – Face à un individualisme qui infiltre tous les recoins de la société, les quartiers sont restés attachés à des communautarismes ethnico-religieux dont la dureté contraste avec notre « ouverture à l’autre ».
Laxisme de gauche contre fermeté de droite ? Depuis des décennies que le débat dure sans jamais déboucher sur autre chose que des dépenses aussi ruineuses qu’inefficaces, il finit par lasser. La vérité, c’est qu’au fil des gouvernements qui se sont succédé depuis les années 1980, c’est l’idéologie de gauche qui l’a emporté sans faille sur le réalisme de droite, et ce même quand la droite était au « pouvoir » (en vérité largement dans l’impuissance…).
Nicolas Sarkozy avait promis de « passer le Kärcher », c’est tout juste si on a vu sortir un mince filet d’eau d’un tuyau crevé. La question qu’il faut désormais se poser est donc la suivante : pourquoi le surmoi idéologique de la gauche l’a-t-il systématiquement emporté sur les exigences de lucidité qui venaient de la droite ? La réponse porte un nom : individualisme.
En 1950, plus de 90 % des Français étaient baptisés, ils ne sont plus que 30 % !
Dès le début des années 1980, nous fûmes quelques-uns à publier des livres qui diagnostiquaient l’inexorable montée en puissance de l’individualisme démocratique dans le sillage de Mai 68, une notion qui éclaire comme nulle autre ce que nous venons de vivre dans les quartiers et que nous vivrons sans cesse davantage si nous continuons à nous voiler la face. De fait, en quelques décennies, alors qu’une autre religion gagnait les banlieues, nous avons vécu au nom de cet individualisme démocratique un véritable effondrement du catholicisme en même temps que des grands récits, patriotisme et communisme, portés par des causes transcendantes. J’ai souvent cité ces chiffres, mais il faut les rappeler dans ce contexte tant ils disent tout sur la situation actuelle : en 1950, plus de 90 % des Français étaient baptisés, ils ne sont plus que 30 % ! 45.000 prêtres diocésains prêchaient dans nos églises, ils ne sont plus que 4500, tandis que l’électorat communiste passait de 25 % à 2,5 % ! En réalité, Mai 68 ne fut guère que le symptôme délirant d’une lame de fond déconstructrice qui prenait sa source véritable dans le capitalisme d’innovation, d’hyperconsommation et de rupture avec les traditions.
Un tsunami moral et spirituel
Les conséquences de ce tsunami moral et spirituel au terme duquel il n’y a plus d’après, plus de transcendance, plus d’au-delà de l’individu sont abyssales. Elles impactent toutes les formes d’autorité qu’un individu désormais fou de son autonomie ne peut que rejeter. Paradoxe suprême : c’est au nom de cette hostilité à l’autorité (à « l’hétéronomie ») qu’on a laissé s’installer dans les quartiers les visions du monde les plus autoritaires et les plus haineuses à l’égard de la France, nos démocraties gentillettes rejetant au passage toute volonté d’intégration, pour ne rien dire de cette assimilation que la gauche n’a cessé de dénoncer comme « fasciste » et négatrice de « l’altérité de l’autre ».
Ces grands récits qui donnaient du sens à la vie et plaidaient pour l’obéissance aux lois, aux valeurs et aux principes d’une nation, d’un parti ou d’une église, sont aujourd’hui concurrencés par les discours de la psychologie positive et des théories du développement personnel qui nous promettent le bonheur en quinze leçons. De fait, s’il n’y a plus de deuxième vie après la mort ou après la Révolution, c’est ici et maintenant qu’il s’agit d’être heureux, en quoi nous vivons le passage de l’acceptation d’un bonheur différé à l’exigence du bonheur immédiat.
Le problème, c’est qu’en face de cet individualisme pétri de bons sentiments, de quête d’autonomie et de bonheur qui infiltre tous les recoins de la société et alimente le wokisme dans nos universités, dans de nombreuses jeunes entreprises, mais aussi dans une bonne partie de la presse et de la classe politique, les quartiers sont restés attachés à des communautarismes ethnico-religieux dont la dureté contraste avec notre « ouverture à l’autre ». Répéter en boucle que tout vient de leur pauvreté, que l’exclusion est notre faute, c’est se coller des écailles sur les yeux. Rappeler que 90 % des jeunes arrêtés pendant les émeutes de ces derniers jours sont Français, que ça n’a donc rien à voir avec l’immigration, est certes une vérité, mais qui ne sert paradoxalement qu’à cacher la réalité, à savoir que les émeutiers cassent tous les symboles de la France en prétextant la mort d’un jeune homme tandis que pour celle d’un septuagénaire tué par un adolescent, la société des individus ne lève pas le petit doigt. Tant que nous n’aurons pas compris que nos démocraties molles font face à des communautarismes durs qu’il faut cesser d’alimenter par une immigration folle associée à des politiques de bisounours, nous continuerons d’aller dans le mur en klaxonnant.
Il n’y a pas que l’extrême droite… et l’ultra gauche ?
IL FAUT FAIRE LA UNE SUR LA COLONISATION DE LA PRESSE PAR L’EXTRÊME DROITE : https://www.telerama.fr/debats-reportages/les-journalistes-du-jdd-n-ont-pas-gagne-et-jettent-l-eponge-apres-quarante-jours-de-mobilisation-7016654.php?utm_medium=Social&utm_source=Facebook&at_medium=slsponsos&fbclid=IwAR1m6UykNL4bfFEcon29kSzL_f_NxdUkXUHq3VD2KAK5ez46kioW0i1zZi8#Echobox=1690903265
MERCI
nota bene : la lucidité en politique étrangère , sans cynisme ni pragmatisme softement cynique , c’est d’admettre que le chant ou nombrilisme professoral des dites valeurs même des dites lumières et érigé en bannière jusqu’en idéologie devient aussi un empire ou un mur de spirales et conflits
Le problème , c’est que nous sommes dans cette Europe qui n’est plus politique en nations , qui s’étend ou s’exprime en chefferie de commissaires européens , et se réarme ici ou là et chercherait encore à s’étendre au prétexte du conjoncturel conflit , et se réarme elle-même en lieux dits de l’ouest et dits de l’ est en la même EU , qui sent bien dans ce conjoncturel conflit que l’ empire américain joue aussi son jeu et dans la perspective d’élections américaines . Le problème , c’est de faire semblant , les missiles et les plages à côté en même temps . Le problème , c’est de négliger le sens du multipolaire ou d’effacer les mots tels que droit constitutionnel ou subsidiarité . Le problème , c’ est l’ absence de vue ou le naviguer à vue de ( en particulier ) la politique étrangère de France . Le problème , c’est que la question ukrainorusse est interdite en questions comme en interviews , ou critiques . Le problème , c’est aussi il est vrai le jeu du je et en-marche constitutionnellement en place . Le problème , c’est le piège intriqué en politique intérieure des tiraillements ou crises ou dysfonctionnements et qu’ il ne faut pas verser non plus en extrémismes . En tout respect constitutionnellement
« Paradoxe suprême : c’est au nom de cette hostilité à l’autorité (à « l’hétéronomie ») qu’on a laissé s’installer dans les quartiers les visions du monde les plus autoritaires et les plus haineuses à l’égard de la France, » Mr Luc FERRY, homme du troisième millénaire, semble oublier que depuis l’origine des temps , la société humaine est soumise en permanence aux coups de boutoir du trio infernal : l’Argent, le SEXE et la Drogue. Hélas malgré tous les efforts accomplis par tous les peuples depuis l’Homme des cavernes, l’Homme qui entend diriger les autres se trompe régulièrement en luttant désespérément contre les conséquences de ces poisons sociétaux et nul à ce jour n’est parvenu à lutter efficacement contre ce trio infernal cause de bien des malheurs, en France comme ailleurs. Si donc l’individualisme mou s’oppose au communautarisme dur, assurément l’intelligence humaine s’est faite portée pâle depuis des siècles pour trouver des solutions efficaces à ces tensions existentielles.
Je suis ravi par la clarté,l’engagement, le courage politique de ce texte. Je doutais de cette capacité, pour d’autres raisons, de la part de Luc Ferry, à franchir le rubicon, aussi c’est rassurant et j’espère que cela fera tache d’huile, surtout chez les jeunes.
C’est une bonne analyse de l’individualisme total généré par le capitalisme anglo saxon, ou le marché est un absolu avec l’argent!