Les enfants de M. Séguin

Seguéniste = Gaulliste

Par Alexandre Devecchio, journaliste au Figaro
Un livre, Philippe Séguin, le remords de la droite, vient de paraître sur cet homme politique atypique et singulier. L’ancien président de l’Assemblée nationale a influencé toute une génération, et sa philosophie continue de hanter la famille gaulliste.

Il y avait comme un «un écho lointain et assourdi de la mort du général de Gaulle», dira Jean-Louis Bourlanges. Ce 11 janvier 2010, un cercueil recouvert du drapeau tricolore entre dans la cour d’honneur des Invalides, au son de la Marche funèbre. Malgré le froid polaire, les plus hauts dignitaires de l’État ont fait le déplacement. Trois présidents de la République – Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac, Valéry Giscard d’Estaing -, cinq premiers ministres – François Fillon, Jean-Pierre Raffarin, Alain Juppé, Laurent Fabius et Pierre Mauroy. Tous sont venus rendre hommage à l’homme du «non» à Maastricht, décédé subitement d’un arrêt cardiaque le 7 janvier.

Quelque part là-haut, dans un brouillard de fumée, Philippe Séguin enchaîne les gauloises. Avec ses yeux de Droopy, le colosse à la barbe mal taillée observe la scène. L’enfant de Tunis, l’orphelin dont le père est mort en héros à la guerre ne peut être que bouleversé par les honneurs de la République. Mais, comme toujours avec ce sentimental atrabilaire, la colère chasse l’émotion. Soudain, le volcan entre en éruption : son cendrier vole dans les nuages, sa voix caverneuse fait trembler le ciel. Sa rage est d’abord dirigée contre lui-même. Est-il passé à côté de son destin ? Par ses faiblesses, a-t-il privé la France de sa stature d’homme d’État ? Elle est aussi dirigée contre ses pairs qui le célèbrent après avoir combattu et marginalisé ses idées. «La politique est comme la vie: chacun porte sa part de mauvaise conscience. Et Philippe Séguin, assurément, était la mauvaise conscience de la droite. En mourant, il est devenu son remords», écrit Arnaud Teyssier dans une biographie appelée à faire référence, qui vient de paraître aux Éditions Perrin : Philippe Séguin, le remords de la droite . Avec empathie et distance, il y dresse le portrait contrasté d’une personnalité hors du commun. Aussi massif physiquement qu’il était fin d’esprit. Aussi incommode et impétueux qu’il pouvait être doux et chaleureux. Orateur de génie qui emportait les foules et intellectuel de la politique capable de percées conceptuelles.

Philippe Séguin était «une voix, un ton, un style». Mais derrière la figure d’exception, Arnaud Teyssier fait également le récit et le bilan de trente ans de vie politique française. À travers le destin inachevé de Séguin, il nous raconte la «dégaullisation», puis la décomposition de la droite française. Et, plus largement, la dégénérescence de nos institutions et de notre démocratie. Sept ans après la mort de Séguin, la question est désormais de savoir s’il était le dernier homme politique de son espèce, l’ultime représentant d’un monde ancien ou si son héritage est encore fécond, sa vision, souvent jugée prophétique, susceptible d’éclairer l’avenir. «Philippe n’a pas écrit de Petit Livre rouge. Le séguinisme, c’était d’abord une tempête», avait déclaré son ami Jean de Boishue, peu après sa mort.

«Il aimait le football, mais ce n’était pas un avant-centre»

«Séguin était un astre solitaire comme aurait pu le rester Clemenceau ou le général de Gaulle s’il n’y avait pas eu la guerre», analyse aujourd’hui l’essayiste Nicolas Baverez, qui fut son stagiaire à l’ENA, puis l’un de ses plus proches collaborateurs. Pourtant, entre 1990 et 1997, il y eut «un moment Séguin». Malgré son aversion pour les courtisans et les «écuries», le maire d’Épinal avait su entraîner et inspirer toute une génération de jeunes gens brillants qui s’étaient rangés spontanément derrière son panache. Parmi eux, des militants et des politiques, mais aussi des journalistes et des intellectuels. On peut citer, parmi beaucoup d’autres, Henri Guaino, François Fillon, Roger Karoutchi, Paul-Marie Coûteaux, Jean-Christophe Comor, Éric Zemmour. Tout a commencé le 11 février 1990, dans l’immense hall bondé du Bourget, lors des assises du RPR. Le discours de Séguin ce jour-là a fait date. David Desgouilles, aujourd’hui chroniqueur politique, s’en souvient comme si c’était hier. Il avait 18 ans. «J’ai tout de suite senti que c’était derrière cet homme-là que je devais me battre», explique-t-il.

Cependant, c’est un autre discours qui fera entrer Séguin dans l’histoire. Celui du 5 mai 1992, à la tribune de l’Assemblée nationale. Pendant près deux heures trente, Séguin va se battre pour convaincre les députés des risques économiques, sociaux et politiques liés au traité de Maastricht. Vingt-cinq ans plus tard, pour la France du «non», ce discours sonne comme une prédiction d’oracle. «C’est la plus belle campagne que j’ai faite de ma vie. C’était celle qui avait le plus de signification, qui ressemblait le plus à la politique à laquelle je crois, se souvient Henri Guaino, qui a contribué à la rédaction du discours de Maastricht, son premier. Il ne s’agissait pas du destin des uns ou des autres, mais de gagner ou de perdre pour une idée que nous nous faisions de notre pays.» Le 3 septembre 1992, Séguin, sans doute trop respectueux du vieux président très malade, rate son face-à-face avec François Mitterrand. La campagne se termine néanmoins en apothéose le 12 septembre, avec le meeting du Zénith de Paris. Devant 6 000 personnes, les «trois conscrits de Maastricht» – Villiers, Pasqua, Séguin – se succèdent à la tribune comme des rock stars. Le 20 septembre, le «oui» l’emporte à 51 %. C’est, malgré tout, un succès inespéré pour Philippe Séguin qui, l’année suivante, est élu président de l’Assemblée nationale. Il devient une personnalité politique incontournable.

«Il avait tout pour finir dans la cour des grands, il a fini à la Cour des comptes» Philippe de Villiers

Puis, entre la nomination de Juppé à Matignon en 1995 et le discours d’Aix-la-Chapelle en faveur de la monnaie unique, la démission fracassante de Séguin du RPR et sa campagne «sacrificielle» pour la mairie de Paris, ses fidèles se découragent un par un. Jean-Christophe Comor, fondateur du mouvement des jeunes séguinistes, le RAP (Rassemblement pour une autre politique), qui a compté jusqu’à 1 500 adhérents de moins de 25 ans, se souvient du jour où il a claqué la porte. Séguin était venu annoncer, sur le plateau du dernier «7 sur 7» d’Anne Sinclair, qu’il allait «mettre de l’eau de son vin». «Moi qui suis vigneron je peux vous dire que ce n’est pas possible!», s’amuse celui qui a aujourd’hui troqué la politique pour les vendanges. Dans sa lettre de démission, il rappelle à Séguin l’une de ses propres formules : «Ne transigez sur rien.» En 2002, Philippe Séguin fait ses adieux à la politique et retourne à la Cour des comptes, son corps de sortie de l’ENA, dont il deviendra le premier président en 2004. Il n’adhérera jamais à l’UMP qu’il considère comme une coalition d’intérêts dépourvue de toute vision. «Il avait tout pour finir dans la cour des grands, il a fini à la Cour des comptes», se désole Philippe de Villiers. Pour Paul-Marie Coûteaux, Séguin est l’homme des occasions manquées. «Il aimait le football, mais ce n’était pas un avant-centre», ironise-t-il.

Orphelins, comme leur père spirituel, les enfants de Séguin ont fini par tracer leur propre chemin. Dans un best-seller écrit au scalpel, La France qui tombe, Nicolas Baverez a analysé avec une précision d’entomologistes les conséquences du traité de Maastricht. Henri Guaino est resté l’un des plus fidèles à la philosophie politique de Séguin. Mais, comme le souligne Arnaud Teyssier, le président de l’Assemblée nationale était un vrai homme politique tandis que Guaino, malgré diverses aventures électorales, est resté avant tout un intellectuel. Ironie du sort, il a achevé, comme Séguin, sa carrière politique dans une élection parisienne qui a viré à la farce. Lui aussi est retourné à la Cour des comptes.

François Fillon et Philippe Séguin – Crédits photo : Elodie GREGOIRE/REA

François Fillon a réussi là où Séguin avait échoué: devenir premier ministre. Cela s’est fait au prix d’une nette prise de distance avec les idées sociales et souverainistes de son mentor. En 1995, il avait choisi Balladur contre Chirac et Séguin. En 2017, le candidat des Républicains à la présidentielle s’est davantage inscrit dans la filiation de Thatcher que dans celle de Séguin. «Si Philippe Séguin avait vu le débat de la primaire où François Fillon et Alain Juppé ont débattu un long moment pour savoir s’il fallait supprimer 500.000 ou 300.000 fonctionnaires, il aurait probablement été hors de lui, analyse Teyssier. Bien qu’il fût président de la Cour des comptes, il considérait que lorsque la France était dans une situation difficile sur le plan de la solidité de la société, ce qui est le cas aujourd’hui, les discours comptables n’étaient pas primordiaux.» Cet économisme sans âme a peut-être coûté son élection à François Fillon. Car les catégories populaires lui ont préféré Marine Le Pen qui se présentait comme une candidate souverainiste.

La dernière figure du monde d’hier

«La droite et la gauche sont deux détaillants qui ont le même grossiste, l’Europe»

S’il a combattu Jean-Marie Le Pen durant toute sa carrière, Séguin avait pressenti très tôt que la «dégaullisation» du RPR conduirait le FN à recueillir jusqu’à 40 % des suffrages. Il ne se doutait pas, en revanche, qu’il deviendrait lui-même une référence pour ce parti longtemps antigaulliste. «Il y a eu le piratage d’un héritage gaulliste dont Séguin était le représentant le plus brillant depuis de Gaulle, analyse encore Teyssier. Lorsqu’il y a piratage, il y a les pirates et ceux qui se laissent pirater. Quand vous laissez vos trésors sur la plage, les pirates n’ont pas besoin de prendre d’assaut le vaisseau.» L’effondrement de Marine Le Pen lors du débat de l’entre-deux-tours montre que l’appropriation de l’héritage gaullo-séguiniste par le FN reste superficiel. Cependant, l’élimination des Républicains dès le premier tour et la relative percée du Front national marquent un tournant inédit dans le paysage politique.

La victoire de Macron dans le lexique séguiniste signifie «la disparition pure et simple de la politique diluée dans la gouvernance». «La droite et la gauche sont deux détaillants qui ont le même grossiste, l’Europe», prédisait-il, bien avant la victoire du candidat En marche!. Marie-France Garaud abonde dans ce sens : «Dans une démocratie, le pouvoir appartient au peuple. On s’imagine aujourd’hui qu’on peut façonner le peuple de manière extérieure à sa propre volonté.» Dans le nouveau monde, Séguin serait condamné à n’être qu’une nostalgie. La dernière figure du monde d’hier. À moins qu’un néo-séguinisme ne soit précisément le négatif du projet économico-européen d’Emmanuel Macron. Arnaud Teyssier note que, dans la nouvelle génération, «les 25-30 ans, qui ne l’ont pas connu, sont fascinés par lui». Nés après la chute du mur de Berlin, ces enfants de la globalisation «sont orphelins d’un certain gaullisme ou d’une certaine conception de la nation et de l’histoire». Rien à voir avec ces barons de la politique qui invoquent la figure de Philippe Séguin comme un signe extérieur de gaullisme populaire et social.

«La doctrine gaullienne n’a probablement jamais été aussi actuelle depuis la fin des années 1950-1960. C’est sans doute dans cette philosophie politique qu’il faut aller chercher les réponses aux défis de notre temps, veut croire Henri Guaino. C’est tout le paradoxe de cette famille politique qui s’est dissoute dans l’UMP et qui a complètement disparu au moment où ce qu’elle portait était le plus en accord avec les circonstances : l’époque, les désordres du monde et les défis du moment.» Ce que résume Louis de Bonald, cité par Arnaud Teyssier au début de son ouvrage : «Il y a des hommes qui, par leur sentiment, appartiennent au temps passé et, par leurs pensées, à l’avenir. Ceux-là trouvent difficilement leur place dans le présent.»

Alexandre Devecchio

Lire aussi sur Gaullisme.fr : Séguin et la référence européenne

Discours prononcé par M. Philippe Séguin le 5 mai 1992 (exception d’irrecevabilité en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement) Transferts de compétences nécessaires à l’établissement de l’Union économique et monétaire européenne (en vue de l’application du traité de Maastricht) – Cliquez ici pour le format PDF


Le dernier homme d’Etat de la Ve République ?

Pourquoi la personnalité et le destin inachevé de Philippe Séguin continuent-ils de fasciner, comme si sa mort brutale en 2010 laissait un vide dans la vie politique française, à gauche comme à droite ? Le petit Français venu de Tunisie, orphelin de guerre, délaissa vite ses premiers engagements, classiquement de gauche, pour rallier De Gaulle. A 20 ans, il adhérait à l’idée d’une France fidèle à ses rêves d’enfance, mais plus indépendante et plus respectée dans le monde. Député des Vosges à 35 ans, maire hyperactif d’Épinal pendant 14 ans, ministre remuant des Affaires sociales sous la cohabitation Mitterrand/Chirac, président hors norme de l’Assemblée nationale, enfin candidat sacrifié et trahi à la mairie de Paris, son indépendance d’esprit et de comportement le laissèrent toujours en marge de son parti, le RPR, et de la politique traditionnelle, dont il réprouvait les compromis trop faciles. En 1992, conduisant la bataille contre le traité de Maastricht, il fut, véritable Cassandre, l’homme capable de dire non.

Aujourd’hui, il fait figure de visionnaire, qu’il s’agisse de l’Europe devenue purement économique et financière, des effets néfastes de la mondialisation, de la dégénérescence du gaullisme en une force conservatrice invertébrée, de l’absence d’un grand projet collectif éclairé et conduit par un Etat digne de ce nom. Le destin de cet homme tempétueux, exigeant, solitaire, parfois décourageant, s’identifie à la crise de notre démocratie, dont il avait compris très tôt les ressorts profonds. Avec son talent coutumier, Arnaud Teyssier raconte l’homme et l’époque en puisant à des témoignages et des sources inédites, en particulier ses archives.

Cette première biographie post mortem d’un homme dont le nom est si souvent invoqué est ainsi une analyse des ressorts de la Ve République et une réflexion sur la conception de l’Etat en France.

14 commentaires sur Les enfants de M. Séguin

  1. Philippe Séguin n’en déplaise à bon nombre de bien pensants fut le dernier résistant des gaullistes de la cinquième république , c’est pour ça que sa disparition laisse tellement de vide et d’amertume !!!

  2. Vous allez vite en besogne. Il y a des gaullistes aussi ailleurs. Et le gaullisme est incompatible avec le FN… donc !

  3. Nicolas Dupont Aignan est tout ce qu il reste du gaullisme…

  4. «Séguin était un astre solitaire comme aurait pu le rester Clemenceau ou le général de Gaulle s’il n’y avait pas eu la guerre»

    Et pourtant, il était prêt à la mener, cette guerre contre l’Empire statophage qu’il dénonçait si bien dans son discours pour le « non » à Maastricht en 1992 !

    Si peu l’ont suivi, qu’ils n’ont pu empêcher que ce long réquisitoire, contre la tournure antidémocratique décisive que prenait la construction européenne, ne soit aussi son suicide politique…

    https://m.youtube.com/watch?v=_oN-DxnGPZQ

  5. Edmond Romano // 17 septembre 2017 à 14 h 47 min //

    Cher Alain, merci de nous le dire souvent: le gaullisme n’est ni de droite, ni de gauche mais il est incompatible avec le Front National. Je partage à 300% cet avis qui, plus qu’un avis, est une évidence.

  6. Edmond Romano // 17 septembre 2017 à 14 h 43 min //

    Un rendez-vous manqué avec l’Histoire, telle est la conclusion que l’on peut tirer en regardant le parcours de Philippe Seguin. Pourquoi? les raisons sont sans aucun doute multiples et les raisons personnelles autant que les raisons politiques. Une chose est certaine ce rendez-vous manqué est regrettable pour la France. Aujourd’hui beaucoup se réclament de lui mais ce sont des héritiers pour le moins indignes! Certains se sont fourvoyés sur les chemins d’une Europe supranationale quand d’autres font des clins d’œil au FN. Les uns et les autres sont bien indignes de lui!

  7. Michel Chailloleau // 17 septembre 2017 à 10 h 07 min //

    Mr Philippe de Villiers n’a jamais été ni prétendu être gaulliste, il faut lui reconnaître cette honnêteté car au moment de la présidentielle pratiquement tous les candidats étaient gaullistes!!!
    Quant aux différents dirigeants, candidats… de l’ex UMP, LR actuellement (en attendant le prochain changement de nom peut être, il serait bien qu’ils définissent une fois pour toutes, leur programme car changer d’opinion sur des sujets graves de société (GPA,PMA, Mariage pour tous, suppression du code du travail,etc.) selon les sondages et l’évolution annoncée dans les medias, cela ne fait pas sérieux et surtout n’a pas de rapport avec les idées gaullistes.

  8. Louis de Bonald, cité par Arnaud Teyssier au début de son ouvrage : «Il y a des hommes qui, par leur sentiment, appartiennent au temps passé et, par leurs pensées, à l’avenir. Ceux-là trouvent difficilement leur place dans le présent.»…Il a tout compris de cette réflexion qui le dépasse le « chérubin du palais », aucun passé, aucune pensée…..vive le présent ….et pas d’avenir.
    Aux citoyen(ne)s d’apprécier la République en marche de travers !!!!!!

  9. Un gaulliste de conviction ne peux, ne doit pas avoir la moindre « copinerie » avec le FN. Le gaulliste est tout sauf extrémiste.

  10. JF MOSCATELLI // 15 septembre 2017 à 20 h 16 min //

    Pas mal …….!!

  11. L’Histoire d’un échec politique. D’un renoncement à se battre pour ses idées après 1995, et l’élection de Jacques Chirac à la présidence en liquidant son R.A.P. ou Rassemblement pour une Autre Politique dont je fis partie à l’époque.

  12. Le fonds de cet article est malheureusement bien réel, et je n’ai pas toujours compris l’attitude de Philippe Séguin ! Quant à la famille « Gaullo-séguiniste », je regrette qu’à aucun moment vous n’ayez cité le nom de Nicolas Dupont-Aignan. Si je me suis trouvé en désaccord avec lui après le 1er tour de la dernière présidentielle, je lui garde mon amitié, et reconnaissez qu’il a porté haut le discours gaulliste, et qu’il a malgré lui mis le doigt sur les contradictions de cette famille. Henri Guaino en est une preuve éclatante, lui qui est resté sourd aux appels de NDA et est resté jusqu’au bout chez les « boutiquiers » de l’UMP, alors que NDA et DLF avaient enfin mis sur pieds une organisation gaulliste active, présente sur le terrain, composée de plusieurs leaders tout à fait valables.
    Quelles qu’aient été mes divergences avec NDA entre les deux tours, je suis en colère contre tous ces gaullistes de pacotille, un Philippe de Villiers aussi, qui n’ont pas su mettre leur égo de côté pour le rejoindre, alors que leur soutien officiel et affirmé aurait permis à NDA de dépasser cette fameuse barre des 5% qui lui a manqué de si peu … et peut-être évité ce qui s’est passé !

  13. J’ai eu l’occasion de rencontrer Philippe Seguin lors de meetings, ce qu’au RPR on appelait « les grands-messes. »

    Quand on observe le monde politique aujourd’hui on ne peut s’empêcher de penser qu’il doit être un des derniers à avoir eu de vraies convictions, un des derniers de qui on peut dire qu’il défendait des valeurs et des idées.

    Au cours de sa carrière politique Philippe Seguin subira trois revers. Le premier en 1992 lorsqu’il s’oppose violemment mais de façon courtoise à François Mitterrand sur le traité de Maastrich, il défend le non avec beaucoup de conviction. Le second en 1999 lorsque pour les élections européennes il fait une alliance avec Ch Pasqua, Ph de Villiers et Alain Madelin, une alliance contre nature qui le fera exploser en vol et qui entraînera sa démission à la fois de la tête de liste mais également de la tête du RPR. Le troisième aux élections municipales de Paris en 2001, défaite imputable au clan Tibéri et au manque de soutien de Chirac qui n’a jamais voulu trancher entre les deux hommes. Dans les trois cas, il sera grand, très grand face à la défaite comme le fut en son temps le général de Gaulle .

    Il incarnait ce que d’aucun nomme « le gaulliste social » et c’est à ce titre qu’il s’est opposé à Edouard Baladur lors d’un célèbre discours de l’ancien Premier ministre. Seguin est allé voir Balladur et lui a dit « très bien ton discours, mais où sont les chômeurs. » Il était un véritable homme politique et il sentait les choses. Lorsque Chirac a nommé Balladur premier ministre Seguin l’a prévenu qu’il le trahirait : » Si tu laisses Balladur aller à Matignon, la première fois il te prendra au téléphone, la deuxième fois il te fera attendre et la troisième fois il te fera dire qu’il n’est pas là . » En 1997, il s’est opposé à la dissolution de l’Assemblée Nationale qui disait-il était une « dissolution de confort. » Dans les 2 cas,on connaît la suite.

    Il aura été un très grand premier président de la cour des comptes, n’hésitant pas à dénoncer les abus de son propre camp politique et un remarquable président de l’Assemblée Nationale. Peu le savent, mais c’est lui qui a mis fin aux « délégations générales de vote » afin de lutter contre l’absentéisme de nos députés. Il amené un combat pour permettre aux députés de garder leur autonomie face au gouvernement.

    Philippe Seguin représentait tout ce que j’aime en politique. il avait des convictions et les défendait, Il avait les compétences, et, j’en reste convaincu il a sacrifié une carrière dans un unique but : celui de servir la République.

    Philippe Seguin a toujours été un grand républicain au service de la République. C’est probablement l’un des tous derniers.

  14. …et il ne restera plus que les chèvres de M. Seguin, qui, comme des automates, iront se faire croquer chez le même grossiste européen, là-bas, où, paraît-il, l’herbe est plus grasse.

    RF 15.9.2017

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