Henri Guaino : «Le droit de vote des étrangers achèvera de détruire l’unité de la nation»

Gaullisme.fr vous invite à lire cet excellent plaidoyer d’Henri Guaino. Ce texte s’inscrit dans le dossier “le droit de vote des étrangers” que Gaullisme.fr met à votre disposition sur le site. (voir encart ci-après)
Pour ma part j’adhère totalement à cette prise de position d’Henri Guaino. Un regret cependant : il n’aborde pas les conditions d’approbation de la révision constitutionnelle qu’un tel projet nécessite… Dans la logique de la Ve République, seule la voie référendaire est souhaitable. Mais chacun sait que la démocratie directe ne figure pas dans les pratiques politiques du PS.

Alain Kerhervé

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FIGAROVOX/ENTRETIEN – François Hollande l’a annoncé : la question du droit de vote des étrangers reviendra en 2016.
Pour Henri Guaino, cette proposition pourrait se révéler destructrice du pacte républicain, alors que le pays traverse une grave crise identitaire.

o Par Alexandre Devecchio


Ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino est député des Yvelines.


FigaroVox : François Hollande l’a annoncé lors de son allocution du 14 juillet: la réforme du droit de vote des étrangers aux élections locales pourrait faire son retour en 2016. Alors que le pays traverse une grave crise économique et sociale, mais aussi identitaire, le moment vous parait-il bien choisi ?

Henri Guaino: Cette annonce est une faute morale et politique. Morale, parce qu’elle ne peut qu’aggraver des divisions qui sont déjà inquiétantes et que le pouvoir instrumentalise dangereusement depuis le début du quinquennat. Politique aussi, parce que ce droit de vote ne pourrait qu’encourager le clientélisme communautariste.

D’un point de vue politicien et cynique, le moment est parfaitement bien choisi. La meilleure stratégie pour un président de la République et un gouvernement en plein naufrage est évidemment de détourner l’attention par tous les moyens, de susciter tous les débats possibles qui permettent de brouiller les cartes et de nourrir les tensions, comme ce fut le cas avec le mariage. Ce n’est absolument pas un hasard si François Hollande remet ce débat sur la table. Il est certain qu’il y en aura d’autres: la PMA, la GPA, l’euthanasie, la théorie du genre….

D’un point de vue politicien et cynique, le moment est parfaitement bien choisi. La meilleure stratégie pour un président de la République en plein naufrage est de détourner l’attention par tous les moyens.

En revanche, s’il s’agit de savoir si c’est le bon moment pour le pays, je vous répondrai qu’il ne saurait y avoir aucun bon moment pour une réforme pareille. Dans un pays qui souffre d’une aussi profonde crise identitaire, sur un continent où l’idée de nation est à ce point en crise, où la question des droits et des devoirs du citoyen est posée avec une telle acuité comme elle ne l’a peut-être jamais été dans l’histoire européenne, quand le communautarisme apparaît aussi menaçant pour l’unité nationale, cette proposition est destructrice: elle ne peut que nourrir tous les extrémismes. Face à la dislocation sociale, à l’anomie, nous avons à reconstruire en priorité un sentiment national, un sentiment d’appartenance, à redéfinir les droits et les devoirs de chacun par rapport à son pays. On ne répond pas à cette impérieuse nécessité politique et morale de reconstruction en portant un nouveau coup à la nationalité.

– Sur le fond, faut-il remettre en cause le lien entre citoyenneté et nationalité ? Le risque n’est-il pas de créer une citoyenneté à deux vitesses ?

Disons plutôt que ce serait destructeur de la citoyenneté! Qu’est-ce que serait une citoyenneté détachée de la nation? La citoyenneté doit toujours être fondée sur des liens très profonds de solidarité, le sentiment d’une destinée commune. C’est la nation qui fait la citoyenneté qui la justifie et qui la défend. Quelle vision de la nation nous propose cette dissociation entre la nationalité et la citoyenneté? Une citoyenneté qui ne repose plus que sur une adresse! Mais appartenir à une nation, ce n’est pas seulement avoir une adresse, cela procède d’un engagement profond, osons les mots d’un amour, d’une fidélité, d’une fierté. Dès lors que la citoyenneté se détache de la nationalité, que devient l’engagement civique?

– Peut-on voir dans cette nouvelle proposition, une tentative de réponse, même maladroite, à la crise de l’intégration que traverse la France actuellement ? Pourquoi a-t-on de de plus en plus de mal à «fabriquer des Français» ?

Si l’on a de plus en plus de mal à fabriquer une conscience nationale, à la faire partager n’est-ce pas d’abord parce que nous n’attachons plus assez d’importance à la nationalité. A l’origine de notre échec, il y a une forme de reniement. Si nous considérons collectivement qu’être Français est devenu quelque chose d’anecdotique dans le monde d’aujourd’hui, comment pouvons-nous faire partager à quiconque, et d’abord à nos propres enfants l’amour de la France? Si nous laissons détruire l’unité et l’indivisibilité de la Nation, comment éviter le communautarisme et les tribus?

Si nous laissons détruire l’unité et l’indivisibilité de la Nation, comment éviter le communautarisme et les tribus ?

Le reniement s’exprime dans les mots eux-mêmes. La faute intellectuelle et morale que nous avons commise, a été d’abandonner l’idée d’assimilation, idée profondément républicaine dans laquelle le nouveau venu, tout en conservant sa propre histoire, tout en ayant le souvenir de ses racines et l’amour de ses origines, accepte de prendre en partage une autre histoire, une autre culture, une autre langue, une autre façon de vivre et d’être avec les autres. A partir du moment où nous avons renoncé à cette dimension culturelle et morale de l’appartenance à la nation française, au profit d’une logique d’intégration qui exprime simplement une dimension économique, sociale et matérielle, nous avons renoncé à faire une nation. Car comme le disait Renan, une nation est «une âme, un principe spirituel» et «un plébiscite de tous les jours». Si vous enlevez la culture et la morale partagées, une langue, une pensée, des mœurs, une politesse, la conscience d’une destinée commune, vous détruisez les fondements de la nation et la nationalité n’est plus qu’une formalité administrative. Que reste-t-il alors de la solidarité, de la fraternité, du sentiment que ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise? Qui est prêt à défendre la liberté des autres? Et que veut dire alors le mot égalité?

– Faut-il revoir les conditions d’accès à la naturalisation ?

La naturalisation doit être l’effet d’un acte de la volonté. Il faut donc la demander et prouver que l’on est non seulement intégré, mais aussi assimilé, que cette assimilation, on la veut tellement que l’on ne relâchera jamais ses efforts pour l’approfondir. La nationalité française est la récompense de cet effort et ne saurait être autre chose. Et pour les enfants qui ont vocation à obtenir la nationalité française parce qu’ils sont nés sur le sol français de parents étrangers, ça ne peut pas être non plus d’une automaticité totale, il faut qu’il la demande, que ce soit un souhait de leur part. Trop de gens aujourd’hui ont obtenu la nationalité française sans la demander et ne se considèrent donc en rien engagés par celle-ci. La réforme Pasqua du code de la nationalité qui avait été précédée d’une vaste consultation était une bonne chose et on a eu tort d’y renoncer. Il faut une manifestation de la volonté.

– Dans un contexte de mondialisation et de forte pression migratoire, doit-on remettre en cause le Droit du sol ?

J’y suis hostile car celui-ci est aussi un antidote contre le terrible poison des généalogies, de la pureté du sang et de la race. On peut discuter des aléas du Droit du sol en France depuis 200 ans. Je pense malgré tout qu’il est consubstantiel à une certaine idée française de l’Homme et de la citoyenneté.

Mais comme tous les principes, il ne peut pas être mis en œuvre sans aucune limite, sans aucun encadrement, sans aucune règle, sans aucune condition. Ce n’est déjà pas un principe absolu car il faut avoir vécu un certain temps sur le territoire français pour l’exercer. Il faut mieux l’encadrer. Lorsque les parents sont en situation irrégulière, cela pose un problème et quelqu’un qui a été condamné plusieurs fois avant d’avoir atteint l’âge où il peut obtenir la nationalité, doit-il se voir accorder le droit d’être français automatiquement? Pourquoi quelqu’un qui ne respecte aucune règle, aucune loi, qui ne respecte pas ceux avec lesquels il prétend vouloir vivre serait-il accueilli dans la communauté nationale les yeux fermés.

Sans remettre en cause le principe du droit du sol, il faut revoir les conditions d’acquisition de la nationalité. C’est exactement la même chose pour le principe de libre circulation à l’intérieur de l’Union européenne. Cela ne peut pas être un principe absolu dégagé de toutes règles, de toutes conditions. Ce n’est pas possible. La France est une société en crise qui a atteint un niveau de vulnérabilité qui rend aujourd’hui plus réduites ses capacités d’assimilation. Elle ne peut pas ouvrir sans aucune règle, sans aucune condition, sa porte à tout le monde.

Le citoyen français n’a de devoir aux yeux de la République française qu’envers la France. La France n’a pas à connaître, à tenir compte d’autres devoirs.

Après les incidents qui ont émaillé les matchs de l’Algérie lors de la Coupe du monde, Marine Le Pen a proposé de supprimer la double nationalité. Est-ce une piste qui pourrait être étudiée?

Humainement ce serait très compliqué. Les gens ont des histoires particulières et vous ne pouvez pas les couper d’une partie de leur histoire qu’ils viennent d’Algérie, des Etats-Unis ou d’ailleurs. Il n’y a rien de pire que les réponses à l’emporte-pièce parce qu’elles ne prennent pas en compte la complexité humaine, morale, ou sociale de la vie. Cela nous enfermerait de manière mortifère.

En revanche, la République française n’a à connaître qu’une seule nationalité: la nationalité française. Elle doit exiger de chacun de ses citoyens exactement les mêmes devoirs sans se préoccuper de ce que peut exiger l’autre nationalité. Le citoyen français n’a de devoir aux yeux de la République française qu’envers la France. La France n’a pas à connaître, à tenir compte d’autres devoirs. La France autorise les doubles nationalités mais n’en reconnaît qu’une seule. Le citoyen français respecte les lois françaises, les mœurs françaises, le drapeau français et les obligations françaises. Appliquons sans dureté mais avec fermeté les principes qui sont les nôtres, qui fondent notre manière de vivre, notre civilisation. Personne n’est obligé d’être Français. Si vous êtes citoyen français, vous êtes citoyen français à part entière, vous ne l’êtes pas à moitié. Vous n’avez pas la moitié des devoirs et la totalité des droits!

11 commentaires sur Henri Guaino : «Le droit de vote des étrangers achèvera de détruire l’unité de la nation»

  1. Le terme polémiquer est entre guillemets dans mon message de 16/09/2014 3h40 .Ce qui signifie qu’on peut lui trouver une meilleure signification que celle qu’il évoque. La seule question font il faudrait débattre demeure : Pourquoi faire voter les étrangers dans un pays souverain ? La confusion entre conséquences et causes est patente. Chacun constate parfaitement ce que vous dites cher Alain Kerhervé, donc chacun se pose des questions graves….sur des conséquences de nos politiques intérieures et antérieures, mais rares sont celles et ceux qui se plongent dans l’analyse de ces phénomènes ou sur le pourquoi nationalité et citoyenneté ne forment plus le couple idéal de notre République longtemps considérée comme un modèle démocratique par bon nombre de pays.
    Bien cordialement

  2. A Baertjc : Contrairement à ce que vous pensez, ce thème n’est pas de la polémique. Élu local dans ma commune (voir http://www.quimperle-passion.fr), le droit de vote et d’éligibilité est un débat qui intéresse tous les électeurs dans chaque commune. Et ce n’est pas de la polémique puisqu’il s’agit de défendre le lien entre nationalité et citoyenneté. De plus, si dans certaines petites communes le problème du communautarisme ne se pose pas, il est bien présent dans certaines banlieues des grande villes. Et c’est grave.

  3. Ah que ce thème sent bon la polémique politicienne.
    Pourquoi faire voter les étrangers? Tiens qui pose cette évidente question avant de se lancer dans des justificatifs tous plus idéologiques les uns que les autres ?
    Oui pourquoi faire voter des étrangers en France ? N’a t-on pas assez d’électeurs ,d’électrices pour remplir nos urnes ?Désire-t-on conjurer l’abstentionnisme galopant au lieu et place de mobiliser nos compatriotes « déserteurs »?
    Pourquoi ne pas faire voter les étrangers qui vivent hors de France, comme les français de l’étranger ? C’est surement une idée toute aussi idiote mais qu’il faudrait poser à Monsieur Hollande, initiateur de l’idée dont on débat.
    Allons, allons, ce sujet n’est pas sérieux dés lors que l’on abandonne le sort de nos territoires donc de la France aux votes des étrangers. Le Général de Gaulle doit certainement se retourner dans sa tombe !!!!
    Si donc on ne peut pas se mettre d’accord sur le but poursuivi ,pourquoi « polémiquer » sur le sujet ?
    Encore une fois, la confusion entre but et moyen contamine les idées de nos crânes d’œufs et nous entraine vers le bla, bla,bla stupide qui nous font perdre énergie et bonne humeur !

  4. A FOUCAUD. Je note une contradiction dans vos propos. Vous opposez étrangers communautaires qui ont des droits (Mais attention à la clause de réciprocité liant les pays de l’UE) et les autres (hors UE). Vous prenez l’exemple d’un australien. Bien ! Mais il n’y a pas de réciprocité. Par contre votre conclusion, et ce à juste titre, veut lier nationalité et citoyenneté. C’est ce que nous proposons. Pour voter, il faut, d’une façon ou d’une autre, avoir la nationalité française avec tout ce que cela implique de « désir d’intégration ou même d’assimilation ».

  5. Je dis depuis longtemps que l’abandon des principes républicains nous conduit au Communautarisme déjà bien implanté dans notre pays et bientôt à la guerre civile; si nous n’arrivons pas à gérer nos affaires, d’autres proposeront de le faire à notre place et ils demanderont le pouvoir car ils seront majoritaires..

  6. Flamant rose // 29 juillet 2014 à 9 h 37 min //

    @ Castelin Michel

    J’ignore si il y a un mariage impossible entre gaullistes- droite libérale mondialiste- centre européiste totalitaire (que de mots !), mais ce dont je suis convaincu, c’est qu’il y a mariage impossible entre les gaullistes et les frontistes. Par ailleurs, et sur ce thème, les coulisses de l’histoire c’est quoi ?

  7. Mais comment peut on dire autant de bêtises ??mais que valent tous les arguments développés par M. Guaino et notamment le vote des étrangers qui serait la cause de la mort de la Nation quand on met en paralèlle le vote des résidents européens on se moque de qui ??moi je pense que l’Europe a pour fonction première de tuer la Nation parce que la Nation est l’espace démocratique réel dans laquelle des citoyens qui ont une communauté de valeurs se retrouvent et veulent vivre ensemble en partageant un destin commun . C’est l’espace qui permet de mettre en place des lois sociales qui garantissent à tous les citoyens d’avoir accès à la santé à l’éducation et à la sécurité
    quelle légitimité aurait un lituanien qui vit depuis 10 ans en France de voter aux élections locales quand un australien ne pourrait le faire on a créer sciamment des bons et des mauvais étrangers où alors on se berce d’illusion et on nous fait croire que la nation européenne existe !!!montrez la moi et vite svp M. Guaino je suis curieux Ce refus du vote des étranger n’a qu’un seul argument sous entendu mais caché empêcher les arabes et les noirs de voter au nom d’un hypothétique vote communautariste
    participer aux élections pour des populations qui pour la plupart ne connaissent pas la démocratie dans leur patrie d’origine devrait être une fierté pour la France des droits de l’homme A la 1ere Assemblée constituante de 1792 six étrangers participaient aux travaux et ont voté la constitution française les premiers révolutionnaires ne faisaient pas la confusion entre citoyenneté et nationalité
    je me sens républicain intégriste et je pense que l’on fait fausse route la seule vrai intégration ne sera possible que quand nos étrangers pourront devenir des citoyens français avec des droits et des devoirs garantis mais devenir citoyen c’est adhérer à toutes les valeurs de la République ceux qui ne sont pas d’accord n’auront pas l’honneur d’être  » citoyens français »

  8. Gaullisme et UMP sont des termes antinomiques!!!

  9. CASTELIN Michel // 28 juillet 2014 à 15 h 18 min //

    Un mystère de plus dans le paysage patriote et souverainste .
    M. Guaino parle d’or
    et agit en trahissant ses (nos) convictions profondes …. surprenant ! Non ?

    ‘le vote des étrangers achèvera de détruire l’unité de la nation ‘  »MAIS ! …. je reste à l’UMP ! … Mieux encore ! si NS revient, je me remets à sa disposition ! Ah, çà , oui …. !  »

    En voulant, coûte que coûte, ne pas reconnaître qu’il a fait fausse route avec NS (qui l’a manipulé et l’a utilisé en caution gaulliste) et plus largement avec l’UMP (qui a trahi les français et la France / mariage impossible entre gaullistes- droite libérale mondialiste- centre européiste totalitaire) M. Guaino s’enfonce dans l’illisibilité et les coulisses de l’histoire.

    CASTELIN Michel

  10. « Vous n’avez pas la moitié des devoirs et la totalité des droits!  »
    C’est pourtant , hélas ,ce qui conduit et motive une majorité des françaises et des français plus prompte à revendiquer  » le cas par cas » ,que le cas pour TOUS !
    C’est le règne des minorités agissantes et celui des régimes spéciaux de tous ordres qui fondent la perte d’identité et profitent à celles et ceux qui veulent s’infiltrer dans une République devenue sans foi, ni loi et profiteuse au plus malin !
    Nous avons donc le choix : réagir fermement à l’idéologie méritocratique du moment ou plier les gaulles !
    Avec près de 60% d’abstentions aux différentes consultations électorales, le choix est fait pour les années à venir.
    On ne subit pas l’avenir, on le fait….nous y sommes….on subira, quoi qu’en dise Henri Guaino qui a oublié l’essentiel : qui vote quoi et pour qui !
    Nous sommes ce que vous fûtes….ce sera une dure épreuve.
    JC BAERT

  11. L’impeccable leçon de républicanisme de M. Guaino.

    Principes fermes. Esprit clair. Humaniste, mais sans angélisme.

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