Attentat de Pont sur Seine
8 septembre 61
L’été 1961 voit se préciser de plus en plus ce qui va rapidement tourner à l’obsession. Un membre de la junte des Colonels, Godard, dit que « la seule chose qui compte, c’est de descendre la Grande Zorha » (de Gaulle). Personnellement, Godard n’a pas de but politique, mais d’autres en ont. Le 14 juillet, Marcel Bouyer, clandestin en France, écrit à Susini : « Il nous faut une stratégie de combat : à l’occasion d’événements graves en Algérie, ou à la suite de la disparition de De Gaulle. » L’OAS est très divisée, les clans rivaux qui opèrent en commun sous ce sigle vont se livrer à une véritable course, chacun étant convaincu que le groupe qui abattra de Gaulle acquerra l’autorité nécessaire pour imposer sa vision politique pour le régime futur. Une croyance quasi mystique se propage : tuer le traître et tyran de Gaulle, c’est garantir l’Algérie française à jamais. Pour beaucoup, c’est aussi balayer « le système » responsable de tous les maux et de la décadence de la France : la démocratie. Godard écrit une lettre collective le 3 septembre aux responsables de l’OAS pour les informer des projets « au sujet de l’objectif n° 1 » (Grande Zorha).
L’été 1961 est très chaud
Les vœux de Godard seront rapidement exaucés, mais en partie seulement car cette première tentative d’assassinat du chef de l’État sera le début d’une longue série d’échecs. L’été 1961 est très « chaud » . Aux plasticages OAS, de plus en plus nombreux en Algérie et en métropole, s’ajoutent des manifestations paysannes souvent violentes, les attentats commis par le FLN, divers problèmes internationaux importants, un remaniement ministériel fin août, une demande de convocation anticipée du Parlement. Début septembre, les tensions les plus graves apparaissent. Le vendredi 8 septembre, le Général n’espère pas pouvoir passer le week-end à Colombey : il a donné une conférence de presse le 5, qui provoque des commentaires en France et à l’étranger, les violences s’aggravent, le malaise de l’armée est de plus en plus perceptible. Désireux de méditer dans le calme et de se ressourcer dans cette nature qu’il aime, il se décide pourtant à partir et en avise son aide de camp vers 17 heures.
A 20 h 15, le convoi composé de cinq voitures – le Général est dans la première voiture avec Mme de Gaulle – quitte l’Élysée et prend l’un des quatre itinéraires prévus, par la route nationale 9. Le Général aime rouler vite. Son chauffeur, ce jour-là, est le gendarme Francis Marroux, conducteur d’une exceptionnelle qualité et d’un sang-froid à toute épreuve. A 21 h 35, la DS présidentielle roule à 110 km/h, quand, après avoir traversé Nogent-sur-Seine, alors qu’elle suit une longue ligne droite précédant Pont-sur-Seine, une violente explosion retentit au moment précis où elle passe devant un tas de sable déposé sur la berme par les Ponts-et-Chaussées. En même temps, un mur de flammes barre la route. Le chauffeur accélère, franchit le rideau de flammes pour s’arrêter quelques kilomètres plus loin. La déflagration a causé quelques dommages superficiels à la voiture. « Quels maladroits ! » dit simplement le Général en l’examinant rapidement. Puis il change de voiture et poursuit sa route jusqu’à Colombey.
Source : Objectif n° 1 : tuer De Gaulle ! Par Jacques Delarue
publié dans Les Collections de L’Histoire n° 1 – 02/1998 Acheter Les Collections de L’Histoire n° 1 +
Laisser un commentaire