Electricité : la douloureuse du marché européen
- Jack Dion – Marianne
On pensait qu’elle ferait baisser les prix de l’électricité, mais la concurrence imposée par l’Union Européenne risque au contraire de les faire flamber. Grâce à la loi Norme, le gouvernement pourrait contraindre EDF à vendre une partie de sa production d’électricité à ses concurrents. Un deal qui pourrait coûter chez aux consommateurs français.
A en croire la vulgate qui tient lieu de prêt à penser, la concurrence est une invention merveilleuse qui permet de faire baisser les prix. Pourtant, lorsque ce dogme est appliqué dans le domaine de l’électricité, le résultat est inverse. Les prix flambent. Voilà qui mérite une petite explication afin de comprendre une histoire digne du père Ubu.
Demain mercredi [17 novembre], l’Assemblé nationale devrait entériner la Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité (dite loi Nome). Actuellement, malgré les différentes hausses, EDF produit l’électricité la moins chère d’Europe. Les opérateurs privés qui se sont lancés sur le marché (comme Poweo, GDF Suez ou Direct Energie) sont incapables de s’aligner sur les prix proposés par l’entreprise publique. Du coup, certains d’entre eux, notamment Poweo, sont loin d’engranger les résultats financiers escomptés. Ils se lancent donc dans une opération de chantage en bonne et due forme, afin de contraindre EDF à leur accorder des conditions inimaginables pour n’importe quelle autre entreprise.
Dans le cadre de la loi Nome*, le gouvernement entend contraindre EDF à vendre le quart de sa production d’électricité d’origine nucléaire à ses concurrents à un tarif assez favorable pour qu’ils puissent tailler des croupières à l’entreprise publique. Comme l’écrit Le Figaro : « Pour les nouveaux entrants, c’est la « rente » nucléaire de l’opérateur historique qui sera ainsi partagée ». La belle affaire. Mais pourquoi faut-il qu’EDF offre tout ou partie de sa « rente nucléaire » à ses concurrents ? Toujours dans Le Figaro, Denis Florin, partner énergie au sein du cabinet BearingPoint, répond : « Si aucun opérateur alternatif ne devait survivre, EDF se retrouverait dans la ligne de mire de Bruxelles, accusée de ne faire aucune place à la concurrence ».
Voilà qui en dit long sur l’aveuglement des autorités de Bruxelles et de leurs supporters. En vertu des nouvelles tables de la loi divine, les bons apôtres de la commission de Bruxelles ont décrété qu’il fallait rayer les monopoles publics de la carte. Nul ne sait au nom de quelle logique et de quelle efficacité, mais c’est ainsi. Cela ne se discute pas.
En URSS, il fallait tout Etatiser. Dans l’Europe néolibérale, il faut tout privatiser. Cela s’appelle la « concurrence libre et non faussée ». Au nom de ces préceptes, le marché de l’électricité a été dérégulé en 2007. Et comme cela ne suffit pas, Bruxelles a sommé la France d’inventer la loi Nome, afin d’obliger EDF à faire un peu plus de place à ses concurrents.
Evidemment, il faudra bien que quelqu’un paie la note et le manque à gagner pour EDF. Pas de surprise. Ce sera le consommateur. Les experts de la Commission de Régulation de l’énergie (CRE) ont prévu une flambée des prix de l’électricité de 11,4% après le vote de la loi, puis de 3,5% par an, soit jusqu’à 25% d’ici à 2015. D’ailleurs, c’est un principe de base : partout où le marché de l’électricité a été privatisé, les prix ont augmenté.
Un esprit rationnel se demanderait pourquoi il faut absolument chambouler un secteur fonctionnant sinon très bien, du moins pas mal. Or c’est une question taboue. Quiconque ose la poser se fait traiter au mieux de simplisme, au pire de souverainisme. On ne saura donc jamais pourquoi la loi de la concurrence doit s’appliquer partout, y compris là où elle n’a que des conséquences négatives.
Totalement d’accord avec les commentaires assis sur l’article en référence.Il faudrait aussi ajouter l’absurdité promulguée et renforcée au travers des initiatives de Monsieur Borloo qui a conduit EDF, au prétexte de soutenir l’activité industrielle des énergies éoliennes et photovoltaïques, à payer jusqu’à 8 fois le prix facturé au consommateur des KWh achetés aux particuliers et ce avec des contrats de 20 ans à la clé !
Aujourd’hui EDF dit que cela lui fait perdre de l’argent et justifie la nécessité de relever ses tarifs pour tout le monde. Nous sommes entrés en absurdie totale et en période de grands froids les KWh ainsi récoltés ne suffisent plus et pour adapter la production à la demande EDF doit faire appel à des achats d’électricité hors de nos frontières. Dans ces conditions le coût global de disponibilité en France de l’énergie électrique ne peut qu’augmenter .De même que pour les carburants automobiles et par extension pour toutes les énergies distribuées, l’Etat qui attend à la caisse TVA, ne se mettra jamais formellement en travers de l’apparition de nouveaux distributeurs d’électricité et des hausses de tarif qui en résulteront inexorablement .Penser le contraire serait une vue de l’esprit.
Totalement d’accord avec les commentaires et l’article qui les motive. Le dogmatisme de Bruxelles, que plus par négligence qu’autre chose, la France a laissé se répandre dans des secteurs où il démontre son absurdité- il aurait fallu opposer quand c’était possible un veto formel à ces divagations- va conduire à une dégradation sensible de la situation du marché de l’énergie. De plus, qui peut croire que des opérateurs privés, qui bien souvent vont se contenter de faire du « trading » en achetant et revendant de l’énergie qu’ils ne produiront pas, auront la surface financière suffisante pour investir dans un domaine où la durée de vie des installations se chiffre en dizaines d’années, avec la lourdeur des investissements qui va avec ? C’est du gribouille.
Il s’agit bien du pillage, du vol organisé d’une partie du patrimoine français.
Qui est responsable, j’entends politiquement responsable ?
Parler de concurrence imposée par l’Union Européenne , invoquer comme le fait l’article » l’aveuglement des autorités de Bruxelles », c’est se défausser un peu facilement. Car ces « autorités », sans doute dogmatiques agissent néanmoins dans le cadre d’une légalité (les fameuses Directives) elle-même fondée sur des Traités internationaux ratifiés (volontairement, rien ne les y oblige) par les États de l’Union.
Depuis 1986, ces Traités ont pour nom : « l’Acte Unique », et les traités de « Maastricht », « Amsterdam » et »Lisbonne ».
Qui, en France, a approuvé ces Traités dont on voit qu’ils desservent les intérêts fondamentaux des français ?
Le PS de Mitterrand, Delord et Jospin.
L’UDF de Giscard, Barre et Bayrou.
Et …la Direction politique du RPR conduite par MM.Chirac, Juppé et l’ influent conseiller devenu ensuite Premier Ministre, Dominique de Villepin.
Tels sont les faits. Tristes, mais irréfutables.