L’introuvable politique étrangère de l’Europe.

Aux termes du Titre V du Traité sur l’Union européenne (TUE), l’UE a adopté des « Dispositions Générales relatives à l’action extérieure de l’Union et des dispositions spécifiques concernant la politique étrangère et de sécurité commune »…

par Par JACQUES MYARD

Membre Honoraire du Parlement
Maire de Maisons-Laffitte
Président du Cercle Nation et République
Président de l’Académie du Gaullisme

Ce titre comporte 25 articles divisés en deux chapitres. Cette abondance de dispositions donnerait à penser que la politique étrangère et de sécurité de l’UE est une réalité tangible et non déclaratoire.

La réalité tangible s’est d’abord concrétisée par une mesure protocolaire, le titre d’ambassadeur, conféré aux chefs de missions des représentations de l’Union en poste dans des pays tiers.

En application de l’article 24 du TUE, l’UE met en œuvre sa politique étrangère et de sécurité qui est définie par le Conseil européen – composé des Chefs d’État ou de gouvernement – et par le Conseil qui statuent à l’unanimité ; l’article précise que « cette politique est exécutée par le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et par les États membres… »

L’article 27 du TUE stipule : « Dans l’accomplissement de son mandat, le haut représentant s’appuie sur un service européen pour l’action extérieure», le SEAE.

Le haut représentant Josep Borrell disposait en 2021 de 346 millions d’euros au titre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).

Il effectue de très nombreuses visites diplomatiques, publie autant de communiqués, sans que l’efficience de son action puisse être appréciée au-delà de ses communications médiatiques…

La réalité est simple, l’UE a une politique étrangère de la parole. Elle commente, condamne ou exprime ses regrets sans avoir prise sur les situations au Proche et Moyen-Orient, en Afrique ou en Asie.

En fait l’UE a organisé elle-même sa propre paralysie en raison des forces centrifuges qui la traversent et illustrent son absence parfaite de vision commune, autrement dit d’une « Weltanschauung » partagée.

Cette faiblesse intrinsèque a été posée comme axiome dès la conclusion du TUE lors de la signature du Traité de Lisbonne les 18 et 19 Octobre 2007, dont le TUE constitue la première partie.

En effet l’article 42 du TUE énonce que « La politique de sécurité et de défense commune fait partie intégrante de la politique étrangère et de sécurité commune. »

Pour avoir une politique étrangère un État doit posséder des forces armées pour la soutenir :

« La défense, c’est la première la première raison d’être de l’État. Il n’y peut manquer sans se détruire lui-même» – Charles de Gaulle.

Ce que de Gaulle dit de l’État vaut encore davantage pour l’UE – qui n’est qu’une organisation internationale –. La défense européenne est un projet d’avenir qui le restera longtemps pour une raison simple, formulée à l’article 42-7 alinéa 2 du traité :

« Les engagements et la coopération dans ce domaine (sécurité) demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre. »

Emmanuel Macron a dit de l’OTAN, le 7 novembre 2019, à The Economist, qu’elle était en état de  « mort cérébrale », recevant alors de très vives critiques de la Chancelière Angela Merkel. La guerre en Ukraine l’a revitalisée et a donné tout son sens à l’article 42-7 alinéa 2. Désormais, sous la conduite de Washington, l’OTAN est une machine américaine dont les pays européens sont les serviles vassaux.

Ni la France, ni l’Allemagne ne manifestent une quelconque velléité de secouer cette tutelle américaine qui annihile toute volonté d’indépendance.

La politique étrangère des États de l’UE s’appelle l’OTAN, c’est une évidence. Avec un autre risque en perspective, celui d’être entrainé dans la rivalité sourde mais croissante entre les États-Unis et la Chine.

« Le but de la politique étrangère est de persuader les autres de faire ce que nous voulons ou mieux encore de vouloir ce que nous voulons. » – Madeleine Albright (1937-2022), Secrétaire d’État américaine (1997-2001).

Mais avant de s’interroger sur les risques d’affrontements en Asie et surtout sur les moyens pour la France de s’en préserver, il convient de s’affranchir des naïvetés éculées qui obnubilent la politique européenne française :

  • Il n’y a et il n’y a jamais eu de couple franco-allemand. Heureusement quelques esprits plus réalistes commencent à se réveiller de la béatitude ambiante. L’entretien de l’ambassadeur Claude Martin au Figaro du 24 mars dernier intitulé « La solidarité européenne est illusoire », est un coup de semonce salutaire. Les désaccords sur l’énergie, les projets d’armement, les relations avec la Chine sont patents.
  • Mais il convient aussi de relire avec attention le long entretien du ministre polonais Zbigniew Rau au Figaro (17 mars 2023) qui dénonce la connivence et l’entente permanente de l’Allemagne avec la Russie depuis… la guerre de 7 ans (1756-1763) où le Tsar Pierre III renverse les alliances et sauve la Prusse de Frédéric II ; Il reproche à l’Allemagne « d’avoir acquis une position privilégiée en Europe parce qu’elle s’est entendue avec la Russie.»  Selon lui, la Russie ne peut jamais être fiable, la sécurité en Europe ne peut être organisée avec elle mais doit l’être sans elle.

4 commentaires sur L’introuvable politique étrangère de l’Europe.

  1. « Le haut représentant Josep Borrell disposait en 2021 de 346 millions d’euros au titre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).
    Il effectue de très nombreuses visites diplomatiques, publie autant de communiqués, sans que l’efficience de son action puisse être appréciée au-delà de ses communications médiatiques »….et de même pour le « p’tit » chef de la France avec toutefois une ardoise de peines et soins certainement beaucoup plus élevée!!!!

  2. Bernadet Didier // 31 mars 2023 à 12 h 59 min //

    Ce commentaire pro-domo du Polonais rappelle les propositions Russes, qu’ils craignaient, de collaboration avec l’OTAN (voir les discours de Medvedev, Poutine); les Russes se sentant tout de même plus européens que…Chinois. Proposition repoussée par les US qui y voyaient la création possible de trois pôles qu’ils n’auraient pu contrôler de la même façon. De fait ils ont poussé les Russes à se tourner vers la Chine en les faisant s’assimiler au « deuxième » bloc(l’asiatique)et en les disqualifiant définitivement vis à vis de l’Europe en les poussant à la guerre en Ukraine. La guerre froide convenait en son temps à l’hégémonie américaine et, ne pouvant faire autrement, devant la multiplicité des pôles qui se dessinent dans le monde, ils « construisent » une nouvelle dualité, Chine-US. Chacun de ces deux, comme les Soviétiques et les US à l’époque des années 43 et suivantes, faisant l’inventaire de ceux qui peuvent rentrer dans leur giron. Effectivement comme il est dit ici, l’Europe est déjà quasi-assimilée par les US et les collabos, qui oeuvrent dans ce sens, sont malheureusement très nombreux et de tous bords. Le bourrage de crâne médiatique contre le nationalisme, le patriotisme, la souveraineté, en les assimilant à des positions fascistes,accomplit son travail de sape qui fonctionne bien auprès des jeunes. Toutefois, le grand bloc asiatique n’a pas les mêmes principes philo-géopolitiques que l’Occident. Les BRICS empiètent sur le territoire d’influence américain, l’Inde participe avec la Russie, l’AfSud, à des exercices militaires en mer (Océan Indien). Peut-être le repoussoir d’un mondialisme sous contrôle des grands financiers oeuvrant à travers une oligarchie supra-nationale servira-t-il d’exutoire. Ce siècle sera très perturbé,très dangereux,les évolutions de la technologie sont utilisées trop souvent à des fins de manipulation, de domination et les « progrès » de l’homme ne vont malheureusement pas à la même vitesse…D’ailleurs, on confond allègrement les progrès de la technologie(qui n’est qu’un outil) avec ceux de la société. De ce fait, on dénie l’Histoire, or, lorsque l’on coupe les racines d’un arbre, il en meurt systématiquement. On parle beaucoup d’écologie, de la nature, et curieusement, on en oublie les leçons. Prions pour que s’ouvre une fenêtre par laquelle entrera une lumière salvatrice, sachant que les hommes sont seuls face à leur destin, c’est la grande règle…

  3. Gilles Le Dorner // 30 mars 2023 à 21 h 25 min //

    Nb : et puis , en outre , le non de Mai 2005 était-il conjoncturel ou de mosaïque paradoxale en voix arguant aussi de souveraineté et en même temps de voix fourbissant quelque projet même anti plus qu’ anti de la constitution de la cinquième et haineusement sournoisement antigaulliennes oubliant que en ressenti gaullien c’est inviter oui convier à « la France , c’est vous » . Et puis , même , voyez , la ratification du dit mini traité de Lisbonne par le Congrès n’ était pas au tréfonds strictement anticonstitutionnelle , elle imprima de lourdes conséquences néanmoins . Tout n’est pas parfait , et je ne crois pas aux esprits en mode invoqué mitterrandien ni de politique de com’ de Solutré , il y a des réalités , il manque dans le fatras des textes / seul un référendum peut remettre en choix de votes le choix exprimé par un précédent référendum sur le même sujet/ , et puis le sphinx n’ est pas un apanage de quelque personne ni qui plus est en rue Montpensier un tout en préceptes de droit rigide se voulant éternels , et puis en toute laïcité l’ Espérance n’ est pas interdite

  4. Gilles Le Dorner // 30 mars 2023 à 20 h 26 min //

    Ce sont de grandes questions de réflexions ou débats même lors d’ élections présidentielle comme en mémoire le respect du référendum de Mai 2005 dont les suites sont ce qu’elles sont ; et le problème c’ est que la réalité des faits même actuels est ce qu’ elle est . En tout respect du sens ou des termes d’ une Constitution et en l’ occurence en France

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