La désagrégation d’un service public… Pire, il n’est pas le seul !

Receveur sur le 48 en 1966, ma première ligne.

A compter de 2025, 77 ans après sa naissance[1], et ceci par touches successives pour être indolores, le réseau Ratp éclatera. Ce sera la mort d’un service public indispensable à la vie des Franciliens.

Dès 1991, l’Union européenne donne le ‘la’[2]. La compétitivité devient un dogme et engage l’avenir des services publics vers l’ouverture à la concurrence des entreprises ayant un monopole (SNCF, Ratp, EDF…), entreprises nationales exerçant dans la sphère ‘intérêt général’.

En 2000, un règlement européen soumet chaque État membre à cette orientation ultra-libérale[3].

Référendum européen

En 2009, après le Traité de Lisbonne imposé malgré le référendum de mai 2005 rejeté par 55% des Français, la transposition de la directive européenne se traduit en France par la loi relative à « L’organisation et la régulation des transports ferroviaires ». La région Ile de France et la RATP (donc le gouvernement) font le choix de la concurrence « libre et non faussée ». De plus, sur le fond, et cela s’aggrave encore plus aujourd’hui[4], la cohésion nationale en termes d’aménagement harmonieux des territoires et d’égalité de tous face à l’utilisation des services publics disparait[5].

En 2025, chaque ligne (ou lots !) du réseau bus sera soumis à appel d’offre ; la conséquence : la rupture d’un transport multimodal intégré[6], et n’en doutons pas, une augmentation des prix du transport. Pour autant, je ne l’aborde pas, alors que c’est une question essentielle, le sort du personnel. Les syndicats s’en chargent.

Un renoncement historique depuis la fin des années 70.

Une référence incontournable

Le service public à la française, descendance de la « France libre » et du « Conseil national de la résistance », pilier essentiel de l’État français restauré sous la Ve République, est mis à mort au nom de la rentabilité financière. Pour ma part, c’est intrinsèquement le rejet de la notion de l’intérêt général. Donc inconcevable.

Y’en a qu’ont essayé, ils ont eu des problèmes (Chevalier et Laspalès)

L’exemple le plus significatif nous vient d’outre-Manche. Après la privatisation anarcho-libérale du réseau bus de Londres sous l’ère Thatchérienne en 1986, beaucoup souhaitent, même dans ce pays où la suprématie du capitalisme financier perdure, le retour à une société plus solidaire et responsable.

Le silence face à cette entreprise de destruction massive est un aveu de faiblesse.

Qu’en pense chacun de nos députés ? Posons-leur la question. Interrogeons-les sur les perspectives à long terme ! Je parie qu’ils n’ont rien à dire. Capitulation.

Alain Kerhervé


[1] 1er janvier 1948

[2] Directive du 19 juillet. Gouvernement socialiste d’Edith Cresson, présidence François Mitterrand

[3] Lionel Jospin, premier ministre socialiste

[4] La crise sanitaire nous le montre clairement

[5] Gouvernement Fillion sous la présidence de Nicolas Sarkozy

[6] 2029, les lignes tramway, en 2039, le métro et les lignes du RER.

3 commentaires sur La désagrégation d’un service public… Pire, il n’est pas le seul !

  1. L’intérêt général est l’objectif de toute politique publique. Ne ditons-pas que la sommes des intérêts particuliers ne fait pas l’intérêt général ? Pour y parvenir, l’Etat confie l’exécution d’un service à une entreprise ou tout autre établissement public… qui répond à ces critères d’indépendance par rapport à toute autre autorité (capital, associations, syndicats…) qui ne font, eux, et à juste titre, que défendre des intérêts particuliers.

  2. Pierre DELCOURT // 27 janvier 2021 à 12 h 51 min //

    Il me semble qu’il faut faire la différence entre une mission de service public et l’intérêt général.

    Une mission de service public relève exclusivement de la compétence et de la puissance publique (État, collectivités territoriales).

    L’intérêt général est assumé par une personne privée qui en a pris l’initiative et qui veut en garder la responsabilité. Ce qui caractérise l’intérêt général c’est donc l’initiative privée sinon, on est dans le service public.

    Quoiqu’il en soit chacune de ces 2 missions est en crise. Le service public est à l’abandon et pour ce qui est de l’intérêt général, heureusement qu’il y a encore quelques associations qui sont à son service.

  3. L’organisation d’une entreprise ,publique ou privée, pour être performante repose sur quelques facteurs clés de succès et parmi les plus importants se cache certainement la volonté de bien faire ,la conscience professionnelle, la recherche de l’excellence dans tous les domaines. Rechercher l’excellence suppose donc à tous les niveaux de l’organisation un investissement permanent de tous les personnels dans l’effort d’amélioration des connaissances ,procédés et savoir faire. A ce titre, nos représentants politiques, le nez sur le guidon du faire et défaire pour faire quelque chose , ne sont certainement pas les meilleurs conseillers pour remettre en marche un service public qui prend l’eau du ruissellement des idéologies les plus folles. Si donc il s’agit d’une capitulation des responsables politiques dont ,par exemple aujourd’hui, notre système de santé fait les frais sous les coups de démantèlement voulus depuis plus de quarante ans par des politiques de gauche comme de droite et du centre, on peut légitimement se poser la question de l’irresponsabilité notoirement établie de celles et ceux qui entendent gouverner la France en menant le peuple par le bout du nez, non pas vers plus de solidarité, mais vers un individualisme garanti dans toutes les sphères de la vie sociale et culturelle. Le service public a donc changé de nature sous l’effet pervers d’une démocratie devenue médiocratie par la volonté première de celles et ceux qui se détournent des urnes par une abstention saisissante, lesquels ,le moment venu de la désolation et de l’étonnement face aux désastres du rendu de service acceptent sans trop broncher le sort qui leur est ainsi réservé par le mandat électoralement confié à des gouvernants d’opérette. Le ver est bel et bien dans le fruit d’une représentation politique devenue politicarde sur le front des services à rendre à la nation toute entière.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*