30 mai 1968 – Rémi de Gaulle : « Nous avons demandé au charcutier de nous emmener »

par FRANÇOIS-GUILLAUME LORRAIN

PAR FRANÇOIS-GUILLAUME LORRAIN

Rémi de Gaulle (photo) se souvient : « Mon père avait donné rendez-vous à son plus jeune frère, Pierre-Henri, et ses deux filles aînées, au premier lampadaire de la place. Mais quel était ce premier lampadaire ? »© AFP -/

Il avait 16 ans. Il était le petit-neveu du général, le fils de Bernard, lui-même fils de Jacques, frère de Charles décédé en 1946. Il était aussi pensionnaire au collège la Providence, à Amiens, où il allait rentrer en première, quelques années avant un certain Emmanuel Macron. Mais en mai 68, le collège n’est pas épargné par les grèves et les cours suspendus. Rémi de Gaulle, renvoyé dans ses foyers, passe le mois dans la maison de campagne familiale, au nord de Paris, à Valmondois. « Nous vivions repliés avec ma mère, ma sœur aînée et mes quatre frères et sœurs plus jeunes », se souvient aujourd’hui Rémi de Gaulle, ancien avocat, qui habite aujourd’hui près d’Aix-en-Provence.

Faute d’essence, faute de trains, son père, qui travaille à Paris, finit par acheter une bicyclette pour les rejoindre à Valmondois peu avant le 30 mai. Le jour dit, il faut bien aller à Paris pour manifester son soutien au grand homme de la famille qu’on voit une fois par an, lors d’un déjeuner à l’Élysée. Mais comment rallier la capitale ? « Nous avons demandé au charcutier de Valmondois de nous emmener dans sa camionnette puisque lui aussi allait manifester. »

Et voilà donc Bernard de Gaulle, son fils Rémi, accompagné de sa sœur aînée, débarquant place de la Concorde, ou du moins à ses alentours, dans la voiture du charcutier. « Mon père avait donné rendez-vous à son plus jeune frère, Pierre-Henri, et ses deux filles aînées, au premier lampadaire de la place. Mais quel était ce premier lampadaire ? Eh bien, croyez-le ou non, malgré la foule immense, on s’est retrouvés. » Des de Gaulle, cela se reconnaît toujours, surtout par la taille, qui leur permet de dominer la mêlée. « Nous sommes restés entre nous, avec mes cousins et mes cousines. On reprenait simplement les slogans. Celui qui m’a le plus marqué, c’était : Mitterrand, t’es foutu. Dans la famille, on avait été très choqué par sa déclaration de candidature du 29 mai. »

« Une évidence »

De retour à Vermandois, les « manifestants » sont accueillis comme des héros par la mère, restée avec les enfants les plus jeunes, qui a suivi avec appréhension le récit des événements à la radio.

« J’étais recouvert de calicots bleu-blanc-rouge. J’étais fier d’avoir participé à une manifestation qui avait réussi. Je l’avais vécue comme une évidence. Plus tard, j’ai entendu parler de cousins qui avaient pu être de l’autre côté des barricades. »

Cela n’a pas toujours été facile de porter un tel nom, comme le raconte l’ancien avocat dans un ouvrage paru en mars (De Gaulle comme de Gaulle ? éd Plon) : « Je fais partie de cette génération qui a été enfant, puis adolescent, à l’époque où le général était aux affaires et très attaqué. Ses enfants à lui ont pu grandir normalement, car il n’était pas encore connu. Pour mes enfants, le général, c’est de l’Histoire. Nous, on a été pris dans la tourmente. » Mais le 30 mai 68, pour cet homme qui n’aime pas la foule et qui n’a plus manifesté après, ce fut une tourmente joyeuse et festive.

1 commentaire sur 30 mai 1968 – Rémi de Gaulle : « Nous avons demandé au charcutier de nous emmener »

  1. Chouzenoux // 5 mai 2020 à 22 h 17 min //

    Salut Rémi
    Nous avons fait nos classes à Brest et j’étais ton voisin de bannette !!! Je t’avais même fait te mettre en tenue pour une visite de ton oncle l’amiral !!
    Tu ne peux pas l’avoir oublié !
    Mon nom c’est James Chouzenoux et je vie en Bretagne
    J’espère avoir de tes nouvelles Amitiés. James.

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