L’affaire Irakienne
Jacques CHIRAC ne doit pas céder !
Après s’être déchirés sur la crise irakienne, les chefs d’Etats européens ont décidé de minimiser leurs divergences en adoptant, à l’unanimité, un texte relativement consensuel. Ils affirment que « la guerre n’est pas inévitable » sans l’exclure « en dernier ressort » si Saddam Hussein ne favorise pas le travail des inspecteurs de l’ONU.
Si ce texte n’aboutit pas à l’expression commune d’une stratégie globale, il a au moins le mérite de montrer une certaine évolution des positions et une prise en compte des opinions exprimées avec force lors des manifestations importantes du 15 février. Notre satisfaction vient plus du ton employé par le Président Chirac, toujours poli, mais particulièrement tranchant vis-à-vis des pays candidats à l’Union européenne. A cette occasion, et sans oublier la déplorable affaire des avions F16 américains choisis par la Pologne, nous devons regretter que les conditions requises pour l’adhésion à l’UE ne soient pas plus exigeantes, l’Europe n’étant pas qu’un simple tiroir-caisse. Ainsi, le Président Français rappelle-t-il, dans un style gaullien qu’il avait abandonné depuis fort longtemps, que l’Europe se doit d’avoir une diplomatie européenne, donc indépendante.
En conséquence, et en l’absence d’une telle volonté commune aux membres actuels de l’Union Européenne, la position de la France peut être – en fonction des circonstances, de nos intérêts propres, de nos traditions françaises d’ouverture, de nos convictions anti-impérialistes et de notre refus d’un monde dominé par l’usage de la force – identique, nuancée, différente, voire opposée à celle de nos alliés américains.
La décision du Président Bush d’y aller coûte que coûte est particulièrement grave.
Ou bien les dirigeants Américains veulent obtenir la bénédiction de l’ONU ; dans ce cas ils doivent accepter le principe d’un éventuel vote minoritaire ou d’une utilisation du droit de veto de l’un des cinq membres permanents,
Ou bien, ils se passent du feu vert onusien, et dans ce cas, ceci ressemblerait beaucoup à l’agonie du droit international défini par le Conseil de Sécurité.
Il n’y a point ici d’antiaméricanisme. Il y a seulement la volonté de la France d’être elle-même et de le dire bien haut.
Les menaces de boycott bramées ici ou là, les vexations proférées à l’encontre de la « vieille Europe », les tentatives d’isoler notre pays ne doivent pas nous émouvoir. Il s’agit plutôt, notamment sur ce sujet, de prendre de la hauteur. « Quand tout va mal et que vous cherchez votre décision, regardez vers les sommets ; Il n’y a pas d’encombrements » disait le Général de Gaulle.
Depuis la fin de la cohabitation, la voix de la France redevient audible. Il faut s’en féliciter. Mais cette affaire irakienne peut être un révélateur pour peu que Jacques Chirac tienne bon. Il a choisi la voie la plus difficile : celle de l’indépendance.
Aura-t-il la force de résister aux appels de certains de modérer son ardeur nouvelle ?
Pourquoi le comité directeur de l’UMP tente-t-il d’infléchir sa position en préconisant la non utilisation du droit de veto ? Est-ce le début d’une évolution de la position de la France pourtant appréciée dans le monde entier ?
Alain KERHERVE
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