Pour un démontage concerté de l’euro
Le sommet de Bruxelles, du 9 décembre 2011, s’est attaqué à la dette des Etats, qui concerne tous les pays européens et a presque partout dépassé la barre de 60 % du PIB fixée par le Traité de Maastricht. Or ce n’est pas la véritable cause de la crise de l’euro. Ce qui crée des difficultés grandissantes, c’est la montée inexorable de la dette extérieure dans la moitié des pays de la zone. La nécessité de faire appel à des capitaux étrangers, afin de financer les économies nationales, indique que la question cruciale est, en réalité, celle que leurs ressources propres n’ont pas été utilisées suffisamment pour développer les capacités productives des pays concernés et les rendre compétitives.
Si l’on retranche les créances que possède chacun des pays, une dette extérieure nette touche les deux tiers des membres de la zone euro. Les plus affectés sont les pays les moins compétitifs comme la Grèce, le Portugal et l’Espagne, où elle représente entre 115 % et 73 % du PIB, ainsi que l’Irlande dont la dette de 67 % tient à des opérations spéculatives, ces quatre pays étant les plus visés par la crise actuelle. Un deuxième groupe de pays comprend l’Italie, où la dette extérieure nette est de 27%, et la France, dont les 30 % sont dus pour l’essentiel à une accumulation de sorties de capitaux d’Investissements Directs à l’Etranger (presque deux fois plus qu’en Allemagne) ; pour la Finlande et l’Autriche, la dette nette demeure minime, représentant moins de 8 % du PIB. Non seulement les autres pays de la zone euro ne sont pas concernés, mais ce sont au contraire des créances extérieures nettes qui apparaissent pour les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg, avec plus de 22%, et surtout pour l’Allemagne où elles s’élèvent à 38% de son PIB.
Dans ces conditions, l’obstination des gouvernants à foncer, à marches forcées, dans l’impasse de l’euro, ne peut conduire qu’à une aggravation générale de la situation économique en Europe. Bien que nos concurrents américain et chinois aient intérêt à la survie de la monnaie unique européenne, celle-ci est condamnée, tôt ou tard, à une explosion incontrôlable. C’est pourquoi, afin d’éviter ce désastre, les signataires de ce texte proposent qu’une concertation européenne soit engagée en vue d’aboutir au démontage nécessaire de l’euro. Celui-ci pourra se faire selon les six modalités suivantes.
1) Des monnaies nationales seront recréées dans chacun des pays de la zone. Ceci se fera en échangeant un euro existant contre une unité de cette nouvelle monnaie. Pour les billets, il suffira d’une courte période de transition, pendant laquelle les anciens billets en euros, émis par chaque Banque nationale et portant un signe distinctif (marque U pour la France), seront surchargés d’un tampon, avant qu’une quantité suffisante de nouveaux billets ait été imprimée en vue d’un échange. Pour les pièces, l’échange pourra se faire très vite puisque celles-ci comportent déjà une face nationale. Techniquement, une opération de ce type est plus facile que celle qui avait été effectuée, dans l’autre sens, pour passer à l’euro en 2002.
2) À la date du démontage de l’euro, les parités monétaires des nouvelles monnaies nationales, les unes par rapport aux autres, seront définies d’un commun accord, afin de rétablir des conditions normales d’échange. Là se trouve le seul moyen de résoudre valablement le problème principal qui est celui des dettes extérieures nettes. On tiendra compte de la hausse des prix de chaque pays depuis la création de l’euro et de la situation de ses échanges extérieurs. Les dévaluations ou réévaluations nécessaires seront définies vis-à-vis d’une unité européenne de compte, dont la valeur internationale, en dehors de la zone euro, sera calculée par une moyenne pondérée des taux de change des monnaies nationales, comme c’était le cas pour l’ancien écu.
3) À l’intérieur de chacun des pays resteront inchangés, à la date du démontage, les prix des biens et des services, de même que les valeurs des actifs et des comptes bancaires. La disparition de l’euro fera que la dette publique de chaque État sera convertie dans la monnaie nationale correspondante, quels que soient les créanciers, à l’exclusion de ceux qui détiennent des créances commerciales. En revanche, les dettes extérieures des agents privés, de même que leurs créances commerciales extérieures, seront converties dans l’unité européenne de compte. Bien que cette solution favorise les pays forts et défavorise les pays faibles, elle est la seule réaliste afin d’assurer la pérennité des contrats conclus antérieurement. Ceci implique que le système ne fera pas l’économie d’une défaillance partielle de certains pays.
4) Sans qu’il soit besoin d’établir un contrôle des changes, tous les gouvernements déclareront des vacances bancaires pendant une période limitée (une semaine ou davantage si nécessaire) : comme Franklin Roosevelt, le président des USA en 1933, ils fermeront temporairement les banques pour déterminer celles qui sont viables et celles qui devront faire appel à la Banque centrale. Les cotations seront arrêtées pendant cette période. La solution consistera sur la base d’un principe universel, donc applicable à tous les pays, à décider que la garantie sera supportée par les Banques centrales, qui abandonneront leur indépendance et retrouveront les statuts d’avant les années 70. L’État protègera les épargnants, en prenant si besoin le contrôle d’une partie du système bancaire.
5) Les taux de change nominaux des monnaies nationales resteront fixés, durant cette même période, selon les parités décidées d’un commun accord. Ensuite, ils feront l’objet d’un flottement concerté sur le marché, à l’intérieur d’une marge de fluctuation de + 10 %. La recherche du système européen idéal fera l’objet de négociations ultérieures. Un nouveau système monétaire européen pourrait alors être étudié afin de stabiliser les taux de change réels, compte tenu des divergences constatées des rythmes d’inflation.
6) Cette opération serait facilitée si, préalablement au démontage de l’euro, son taux de change s’était fortement déprécié vis-à-vis des autres monnaies. La fin d’un euro cher ne sera sans doute pas acceptée par tous nos partenaires ni par la BCE, mais la France pourra y contribuer préalablement en abrogeant la loi Giscard de 1973. Celle-ci, qui interdisait le financement de la dette publique par la Banque centrale, avait d’ailleurs été consolidée une première fois dans le Traité de Maastricht, puis une seconde dans le Traité de Lisbonne.
Dans le futur, nous pensons que l’on ne pourra pas faire l’impasse sur les problèmes qui ont été masqués par la crise de l’euro, en particulier l’emballement de la création monétaire privée et la dérive mondiale des systèmes bancaires, conséquence de l’abolition du Glass-Steagall Act.
Signataires : Gabriel Colletis, Alain Cotta, Jean-Pierre Gérard, Jean-Luc Gréau, Roland Hureaux, Gérard Lafay, Philippe Murer, Laurent Pinsolle, Claude Rochet, Jacques Sapir, Philippe Villin, Jean-Claude Werrebrouck
J’ai mis en fin d’article un fichier PDF pour impression.
Les auteurs pourraient-ils préciser de quelle dette ils parlent : s’agit-il de la dette publique ou de la dette globale (état, ménage, entreprises) ? Si nos créances sont dans des pays dont les monnaies se déprécieraont encore plus (Italie, Espagne) notre dette augmentera.
dommage qu’on ne puisse imprimer certains textes intéressant dont celui ci Licorne
Les agissements désordonnés, inefficaces de M. Sarkozy face à la crise, les incantations de M. Hollande, ne me rassurent pas sur l’action de la prochaine législature.
J’écrivais : « Ni Sarkozy, ni Hollande ». Je maintiens. Bayrou est-il un recours possible ? Je ne le pense pas car il fait parti de « l’establishement », de la nomenklatura, c’est à dire à ces élites auto-proclamées qui s’agitent dans une ossature où elles trouvent leur pitance mais sont incapables de résoudre les problèmes rencontrés dans la vie d’une société s’ils sortent du schéma enseigné et appris. « Ils » récitent.
On disait de notre Armée qu’elle était en retard d’une guerre. C’est nos élites, notre administration qui est en retard et incapables de prendre les bonnes décisions, les solutions adéquates.
Nous traitons « la crise » d’après le schéma appris en économie : des prêts avec intérêts à rembourser pour réalimenter…et personne n’ose sortir de cet équilibre, personne n’ose dire à qui les nations doivent de l’argent. Bizarre que les créanciers se taisent, non ?
Les intérêts des prêts font vivre les créanciers. La France a emprunté 172 milliards et paie 50 milliards d’intérêts. Je lisais que nous avons payé plus de 1000 milliards d’intérêts depuis le début.
Pourquoi voudriez-vous que ceux qui tirent leurs ressources des intérêts payés par les peuples voudraient que cela cessât ?
– « Pourvu que ça dure » disait la mère de Napoléon. Eux aussi.
Il faut sortir de cette économie qui s’équilibre et s’enrichit par la guerre, la famine.
Ne cherchez pas un nouveau Messie, l’ancien a ouvert la voie et ce n’est pas celle du « Veau d’or ». G.
PS : Quel parti politique va oser et prendre la révolution à son compte ? G.
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Subject: [quivala] Guerre à la guerre…Pie XII
Je retrouve dans le livre : « Pie XII, nous parle », Denoël éditeur, page 157 « guerre à la guerre », (expression attribuée aux Hippies 20 ans après).
« …Contre la guerre d’agression comme solution des controverses internationales…si jamais une génération a dû entendre s’élever au fond de la conscience le cri : <>, c’est certainement la présente. Elle est passée à travers un océan de sang et de larmes, comme peut-être n’en ont jamais connu les temps passés…comme l’image d’un enfer…dont quiconque conserve au coeur des sentiments d’humanité ne pourra jamais avoir de plus ardent désir que d’en fermer les portes (de l’enfer, NDT), pour toujours…. » 24 décembre 1944 Benitas et Humanitas.