Pour sauver l’euro, la BCE piétine la lettre des traités

La2-euro Laurent Pinsolle, partisan d’une sortie de l’euro, est pourtant persuadé que la monnaie unique ne disparaîtra pas de sitôt. Ce gaulliste proche de Nicolas Dupont-Aignan explique pourquoi. L’une des raisons ? La BCE recourt de plus en plus à une monétisation des dettes des pays en difficulté pour éviter d’activer une nouvelle fois le fonds européen.

 

 

 

Il y a quelques jours, Jacques Sapir et Emmanuel Todd annonçaient la fin probable de la monnaie d’ici à un an, diagnostic confirmé par Jean-Luc Gréau. Le GEAB, toujours aussi sombre, annonce lui aussi un cataclysme pour cette année. Et si cela prenait plus de temps ?

Les raisons pour une crise rapide

A dire vrai, les raisons qui pourraient provoquer une crise rapide sont nombreuses. Après tout, il suffirait que les marchés s’emballent sur les taux des dettes souveraines espagnoles et italiennes pour mettre à bat l’ensemble de l’édifice de défense de l’euro mis en place au printemps 2010. Parallèlement, il suffirait qu’un peuple se rebelle contre les plans d’austérité et décide de porter au pouvoir des alternatifs pour fragiliser le château de cartes monétaire qu’est l’euro.

Quand on constate la grande divergence entre l’Islande (qui a choisi de ne pas sauver ses banques et les créanciers étrangers) et l’Irlande, on se dit que ce dernier pays pourrait bien choisir une voie audacieuse lors des élections qui sont à venir. On ne peut pas négliger la possibilité d’une sortie de l’Irlande de l’euro pour sortir de la tutelle humiliante du FMI et de Bruxelles. Concernant le GEAB, si leurs arguments sont réels, ils prédisent un peu trop souvent une apocalypse imminente.

Enfin, comment ne pas constater à quel point la situation de la Grèce est intenable. The Economist rappelle cette semaine que, du fait de la baisse de 4% du PIB en 2010, le poids de la dette a atteint 140% du PIB en Grèce, ce qui signifie que les intérêts de la dette représentent, la somme extravagante de 7% du PIB ! En 2015, malgré un ajustement budgétaire brutal de 10 points du PIB, elle atteindra 165% du PIB, un montant ingérable que l’hebdomadaire appelle dès aujourd’hui à restructurer.

Et si l’agonie durait plus longtemps ?

Malheureusement, la messe n’est pas dite. Les fédéralistes veulent sauver l’euro coûte que coûte, quel qu’en soit le prix à payer par les peuples. Ils savent bien qu’une fin de l’euro hypothèquerait pour plusieurs décennies le modèle d’une Europe supranationale qu’ils construisent depuis 25 ans. Et les pays de la périphérie de l’Europe sont sans doute retenus par le fait que l’Europe leur a apporté beaucoup de subsides et qu’ils ne veulent pas paraître ingrats aujourd’hui.

Mais cela serait insuffisant sans l’intervention de la BCE. En effet, depuis quelques mois, la Banque Centrale Européenne recourt de plus en plus à une monétisation des dettes des pays en difficulté pour éviter d’activer une nouvelle fois le fonds européen. Comme le raconte la Chronique Agora, ce ne serait pas moins de 90% des émissions de bons du trésor Portugais, Espagnol et Italien des derniers jours qui auraient été achetées par la BCE et réduire la pression sur les marchés.

Bref, les autorités européennes sont prêtes à tout pour sauver l’euro, y compris à contredire la lettre des traités. Du coup, entre les 500 milliards encore disponibles dans le Fonds, la capacité gigantesque de monétisation de la BCE, l’aide de la Chine et la possibilité de restructurations, il est possible que les contradictions de l’euro soient protégées des marchés pour quelques années. Il faudrait alors qu’un pays décide volontairement de partir pour faire exploser la monnaie unique.

Bien sûr, la crise va se poursuivre. Mais comme pour les banques, les autorités européennes semblent prêtes à tout pour sauver l’euro, quelques soient ses carences. C’est pour cela qu’il faudra sans doute attendre un peu plus longtemps pour revenir au franc…

5 commentaires sur Pour sauver l’euro, la BCE piétine la lettre des traités

  1. La monétarisation terme élégant pour désigner l’émission de monnaie papier ou  » de singe  » est une recette employée depuis désormais trop longtemps en particulier par les amméricains, pouur ne pas géérer les fruits amers de la désillusion. Qoique fassent les eurobéats pour sauver leur chateau ce cartes, cela ne résistera pas à la lucidité cynique des marchés. Ceux qui s’intéressent au mondialisme et à ses visées, savent que la faillite du système occidental est programmée et passe passe par celle de l’

  2. Article bien pensé et argumenté.
    Mais l’Histoire réserve bien des surprises…N’est-ce pas M. Ben Ali ?

  3. A structure molle effondrement lent !! Emmanuel Todd et Jacques Sapir peuvent se tromper dans leurs analyses, comme tout le monde. Cependant la lecture quotidienne du blog de Paul Jorion, qui fût l’un des rares à prévoir la crise financière à cause des « subprimes » le laisse penser : l’euro ne survivra pas à ses contradictions tant elles sont fortes et que les autorités tant de la BCE que des dirigeants de l’UE ne réagissent que trop peu et trop tard. On parle déjà de restructurer la dette grecque puis irlandaises, et de la centaine de milliards d’euros qu’aura bientôt besoin l’Espagne pour sauver son système des caisses d’épargne en grave danger pour le financement de la bulle immobilière. C’est donc dire que rien n’est fini, le lent naufrage de l’euro se poursuit.

  4. Le Rouméliote // 23 janvier 2011 à 14 h 15 min //

    L’analyse est très pertinente, car d’une logique rigoureuse : la lettre des traités est opposable aux volontés des nations, mais ne l’est pas face à l’idéologie supranationale dans laquelle les hauts fonctionnaires de la BCE et de la commission sont enfermés. On glisse tout doucement, mais sûrement vers l’abîme, comme dans les années 1930…

  5. La BCE achète de la dette des pays européens, mais ce faisant elle mets davantage de pression sur les autres pays contributeurs en augmentant leurs participations au fond commun, ce qui conduit inévitablement à des prises de plus en plus drastiques d’austérité budgétaire et pressions fiscales.
    En conséquence, les déficits des PIB s’accroissent et propulsent vers des sommets de plus en plus hauts les sources responsables de la monétisation des dettes souveraines.
    Les peuples souffrent de plus ne plus et les ondes de choc des tsunamis maghrébins parviendront un jour ou l’autre sur les rivages européens.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*