La victoire en trompe-l’œil du PS
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Dimanche 21 mars au soir, l’heure était à l’euphorie rue de Solferino. « Le PS, premier parti de France », entendait-on dans la bouche des militants. Il est vrai que la victoire est belle (54,3%) mais, derrière les chiffres, la situation est moins idyllique qu’elle n’y paraît…
L’hégémonie du PS menacée
Le PS est sans conteste le grand vainqueur de ses élections régionales et réalise là sa plus belle performance depuis les élections législatives de 1981. Mais cette victoire est due en grande partie aux voix d’Europe Ecologie.
On assiste aujourd’hui à une véritable modification des rapports de force à gauche. Il semble loin, le temps où le PS dictait sa loi au sein de la gauche plurielle. Cette « gauche solidaire » nouvellement créée devra compter impérativement avec les écolos.
Claude Bartolone confiait d’ailleurs au Point que l’objectif du PS était de créer « un carré magique rose rouge vert » dont les quatre côtés seraient : « le projet, la désignation du candidat à la présidentielle, l’accord avec nos futurs partenaires sur les circonscriptions pour les prochaines législatives et le contrat de gouvernance. »
La question d’une alliance avec le Modem ne se posant plus, c’est Europe Ecologie qui s’impose naturellement comme le premier partenaire du PS. Mais le mouvement écolo est secoué par une crise de leadership entre Cécile Duflot et Dany Cohn-Bendit, et la négociation d’un programme commun en vue de 2012 s’annonce d’ores et déjà compliquée. N’oublions pas qu’en Bretagne, dans le Limousin et en Picardie, les forces de gauche ne sont pas parvenues à mettre leurs différends de coté pour fusionner leurs listes en vue du second tour…
Retour d’une gauche archaïque ?
Avec la crise économique, le centre de gravité politique s’est déplacé. Le Modem n’est plus, le Front de Gauche a réveillé un PC en pleine léthargie et le PS a fini par abandonner sa ligne social-démocrate. Défense des 35h et de la retraite à 60 ans, pas un mot sur la réduction des dépenses de l’Etat alors que les déficits ne cessent de se creuser, le bond en arrière est surprenant…
Il y a un an, Manuel Valls avait fait un constat lucide de l’état du PS, en disant que « loin d’établir la synthèse jaurésienne entre le réel et l’idéal, la gauche française opère au contraire une distinction permanente entre l’exercice des responsabilités (fatalement mâtiné de pragmatisme) et la théorie (merveilleusement préservée dans sa virginité) ». Cette analyse semble plus que jamais d’actualité.
Quand le PS cessera-t-il de laisser à la droite le monopole des thèmes de la sécurité ou de la nation ? Durant combien de temps encore faudra t-il encore attendre pour que les socialistes se remettent à parler d’Europe ?
Lors de cette soirée, en compagnie de Sebmusset et de Vogelsong, nous avons pu interviewer quelques personnalités politiques du PS. La première d’entre elles, Harlem Désir, fait une analyse lucide des fractures de notre société. Mais en ce qui concerne les solutions pour y remédier, H.Désir est moins prolixe et finit par en revenir aux emplois jeunes. Tout ceci manque d’ambitions et d’idées nouvelles. Certes, le problème est de taille et il n’existe aucunes solutions miracles, mais annoncer des conventions programmatiques comme après les régionales de 2004 prête quelque peu à sourire…
Des dissensions qui perdurent
Enfin, le PS demeure un parti hanté par les présidentielles. Dimanche soir, Martine Aubry et Ségolène Royal en ont donné une nouvelle fois le triste exemple. Les blessures sont encore vives et la victoire, aussi belle soit-elle, ne suffit pas à les effacer, même temporairement.
La lecture successive des interviews vidéos de G.Collomb et M.N Lienneman est suffisamment saisissante pour vous en convaincre. Si le Maire de Lyon considère que cette victoire est celle « des élus locaux que la direction doit désormais écouter », l’ancienne députée européenne considère à contrario qu’on assiste au triomphe d’une gauche unitaire qui a pris le pas sur les égos. Bref, l’heure n’est pas encore aux lendemains qui chantent…
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