L’immense scandale des bonus 2009
Pendant que les banquiers sont trop heureux de détourner le débat sur des modalités byzantines qui camouflent en réalité un maintien du système antérieur, un vrai débat est complètement ignoré : le scandale gigantesque que représente tout paiement de bonus en 2009.
Pourquoi des bonus en 2009 ?
Car si le débat porte aujourd’hui sur la manière de moraliser les bonus des traders, presque personne ne se pose des questions sur la justification de l’existence même de bonus en 2009. À première vue, la raison est simple : les banques enregistrent des profits en spéculant, du fait de la forte hausse des marchés cette année. Dès lors, il pourrait sembler justifié que les traders en profitent…
Mais si les marchés boursiers sont en hausse en 2009, gonflant les profits des banques et les bonus des traders, c’est uniquement grâce au krach de 2008. En effet, si le CAC 40 n’avait pas perdu la moitié de sa valeur en 2008, il y a fort à parier que le marché ne serait pas en hausse en 2009… Si le krach financier de 2008 a provoqué un effondrement économique sans précédent, envoyant des millions de personnes au chômage, il permet également un gonflement des bonus des traders l’année suivante !
Bref, le krach boursier engendre du chômage pour les uns et des bonus pour les traders ! Pire, si les banques qui versent ces bonus existent toujours aujourd’hui, c’est grâce à l’intervention publique et l’argent de l’Etat. En clair, les bonus 2009 bien gras que vont toucher les traders de la BNP ou de Goldman Sachs sont la conséquence directe de l’effondrement de la bourse en 2008 et de l’injection massive d’argent des Etats pour réparer les erreurs de ces mêmes banques…
La crème, le beurre, la crémière, la petite sœur de la crémière…
Il est donc proprement incroyable et illégitime que soient payés le moindre bonus en 2009, à moins de les taxer à 90%. La collectivité ne peut pas d’une part donner des milliards aux banques pour les sauver et accepter que ce sauvetage permette, quelques mois après que les banques soient allées dans le mur, de verser des bonus invraisemblables à leurs traders, alors même que des millions de personnes ont été envoyées au chômage du fait de l’éclatement de la bulle spéculative.
L’aléa moral du monde financier devient chaque jour plus choquant. Le système actuel est devenu à ce point pervers que les traders pourraient y trouver une incitation aux comportements les plus spéculatifs. Après tout, ils touchent des bonus extravagants en période de bulle. L’année du krach, les Etats viennent sauver les banques de la faillite, et, s’ils perdent leur bonus une année au pire, ils créent les conditions de bonus gigantesques les années suivantes du fait de l’effondrement de la bourse l’année précédente.
C’est pourquoi la législation sur les bonus, si elle doit être largement transformée (voir la note de mercredi), n’est pas suffisante. Comme le propose Lord Adair Turner, président de l’autorité bancaire en Grande-Bretagne, il faut instituer une taxe Tobin sur toutes les transactions financières. Comme il le souligne et comme je le défends depuis longtemps, il faut dégonfler un secteur devenu trop important par rapport à l’économie réelle. Ceci limitera drastiquement les bonus.
De toutes les façons, les évènements de 2008 rendent complètement illégitimes le versement de bonus aux traders au titre de 2009. Il revient aux Etats, soit de les interdire purement et simplement, soit de les taxer à un très haut niveau, 90% par exemple. Les accepter serait un immense scandale.
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