Il se prend pour Dieu. On lui pardonne !..
Il se dit gaulliste. Là, il va trop loin !
Dans son dernier ouvrage « Témoignage », Nicolas Sarkozy se contente d’empiler ce qu’il a déjà, et très largement, évoqué ces derniers mois. Rien de nouveau, mais une confirmation : sa détermination à surfer sur la vague people qui le porte, comme Ségolène Royal, dans cette pré-campagne Élyséenne.
Ce discours de Sarkozy, puisque c’en est un, est axé sur quelques mots clé qu’il veut présenter comme un programme : effort, travail, mérite et aussi oser, tenter, entreprendre. Car lui a un projet, contrairement aux Chirac, Balladur et Jospin en 2002, affirme-t-il.
L’élection présidentielle
Pour mettre tous les atouts de son côté, Nicolas Sarkozy quitte le Gouvernement (Ministère des finances…), choisissant l’UMP plutôt que l’action gouvernementale. Pourquoi ? Réponse sans ambiguïté : « Il fallait conquérir l’organisation qui serait décisive dans la prochaine élection présidentielle ». Cela a au moins le mérite d’être clair. Il va bientôt annoncer son départ du gouvernement dont il est le vice-Premier ministre pour s’occuper de son destin. La France ne vaut plus une messe !
Sarkozy et le peuple souverain
Pour Sarkozy le peuple doit rester souverain. « La politique a sur tout autre forme d’action et d’engagement cet avantage immense, cet intérêt unique et tellement exigeant de se faire avec le peuple, pas contre lui, ni sans lui ».
Qu’il serait agréable de le croire ! Mais l’Europe le rattrape, et il change de ton[1] : « La seule solution consiste à négocier un traité institutionnel plus court, limité aux stipulations essentielles permettant aux institutions communautaires de fonctionner ; ces stipulations n’ont été contestées par personne durant la campagne référendaire. Ce traité serait ratifié par voie parlementaire ». Ainsi, ce qu’a décidé le peuple souverain le 29 mai 2005 peut être effacé par la seule volonté de nos élites politiques. Bizarre conception de la démocratie ! Quant au processus d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne[2], il convient de rappeler avec force que Nicolas Sarkozy doit en assumer la mise en œuvre en tant que numéro deux du gouvernement.
Sarkozy et l’Europe
Cela s’appelle la solidarité gouvernementale et c’est une vertu, pour peu qu’elle soit respectée, de la constitution mise en place par le général de Gaulle auquel il se réfère en affirmant que l’Union européenne « n’avait pas vraiment les faveurs du Général », contre-vérité qu’il faut dénoncer avec force. Certes, le Général rejetait la structure fédérale, mais il préconisait, afin que les États gardent leur souveraineté, une structure confédérale[3].
Depuis quelques semaines, le discours de Sarkozy sur l’Europe change.
« … il est exact que la construction européenne, et plus globalement l’ensemble de nos obligations internationales, limitent les marges de manœuvre au pouvoir national. Certaines réformes sont impossibles si nous n’avons pas l’accord de nos partenaires ou des institutions communautaires. »
N’est-ce pas ce qui a motivé, pour une part non négligeable, l’expression majoritaire du « non » lors du référendum du 29 mai 2005 ?
Quant à la monnaie unique : « Depuis le passage à l’Euro, nos indices d’inflation sous-estiment l’augmentation des prix » avoue-t-il tardivement. « Les Français ne s’y sont pas trompés ».
Il justifie ainsi son action en faveur d’une baisse des prix qu’il dit avoir quasiment imposée, contre vents et marées, aux grandes enseignes de la distribution. Une nouvelle fois il distribue ses cartons rouges : « Aucune entreprise de l’agroalimentaire n’a fait faillite et la loi stupide votée en 1996[4], qui avait rendu possible cette dérive inflationniste… » précise-t-il en guise de sentence.
Sarkozy et la Vème République
Et puisque tout est mauvais, il condamne nos pratiques constitutionnelles
Sarkozy déplore l’instabilité politique que nous subissons depuis 25 ans.
« Depuis 1981, les Français n’ont jamais reconduit un seul gouvernement[5]en place, une situation ignorée de la plupart de nos partenaires européens…
…En vingt sept ans, la Grande-Bretagne a eu 3 Premiers ministres, la France 12 ».
Quel mensonge !
Si le Chef du gouvernement britannique est désigné par les électeurs (élections législatives), ce n’est pas le cas en France. Par contre, dans la comparaison, il convient de prendre en compte l’élection du Président de la république française au suffrage universel qui octroie au Chef de l’État une légitimité indiscutable lui permettant d’assurer la continuité de l’État et la sauvegarde des intérêts majeurs de la Nation. Le gouvernement qu’il désigne a pour mission de mettre en œuvre les orientations présidentielles.
Oserait-il insinuer que du temps du général de Gaulle, il y a eu 3 gouvernements différents, donc trois politiques distinctes ?
En réalité, l’instabilité politique française qu’il fabule pour justifier sa rupture avec la Vème république n’existe pas. De Gaulle : 10 ans, Giscard d’Estaing : 7 ans, Mitterrand : 14 ans, Chirac : au moins 12 ans.
Bien entendu, la cohabitation est une première verrue aux fondements constitutionnels de la Vème république, la seconde étant, l’instauration du quinquennat. Mais Nicolas Sarkozy ne peut blâmer ces deux verrues ; Il est, au même titre que beaucoup d’autres, responsable et coupable. Il condamne la cohabitation. Ignore-t-il qu’il l’a déjà pratiquée du 29 mai 93 au 11 mai 95 dans le gouvernement Balladur ?
Quant à la constitution, Sarkozy la qualifie d’excellente … en 1958. « Elle a permis au général de Gaulle d’entreprendre de très nombreuses réformes, au premier rang desquelles la décolonisation ». On ne peut être plus laconique !
Et pour justifier les réformes constitutionnelles qu’il préconise par ailleurs, il regrette « la concentration par la constitution de 1958 révisée en 62[6] de tant de pouvoirs entre les mains d’un seul homme, le Président » ainsi que le quinquennat qui a « aggravé l’ascendant du Président de la République sur le Premier ministre ». Je ne me souviens pourtant pas de son engagement contre cette réforme proposée par Valéry Giscard d’Estaing, défendue par Jacques Chirac, votée par le parlement[7], et ratifiée par référendum le 24 septembre 2000[8].
Sarkozy le ministre exemplaire
Sarkozy ne laisse le soin à personne de le juger en tant que ministre. Il s’identifie comme le meilleur. Il n’y en a pas d’autres pense-t-il !.
« Quitter un endroit ou une réunion en fixant tout de suite la date de la prochaine échéance est une méthode que j’utilise très souvent pour forcer mes équipes à rester mobilisées dans la culture du résultat » annonce, très sérieux, Sarkozy dans son dernier ouvrage « Témoignage ».
Réforme essentielle du prochain quinquennat ? Que croit-il avoir inventé ? C’est le B.A.-Ba de toute organisation, qu’elle soit professionnelle, politique, syndicale, associative…
Mais pour le candidat à la magistrature suprême, le temps est compté. « Chaque fois que j’ai exercé une responsabilité, quelle soit nationale, départementale ou locale, je me suis mis à la tâche à la première minute de la première heure du premier jour et je n’ai relâché mon effort qu’à la dernière…
… j’en ai trop connu, là encore, qui, à l’heure de partir en étaient encore à réfléchir sur ce qu’il convenait de faire ! » Merci pour eux.
Sarkozy et la France
Nicolas fait un rêve pour la France : un exemple de démocratie moderne et responsable.
« Le débat au sein d’un même parti n’y sera pas vécu comme une division, mais au contraire comme une richesse ».
Mais qu’attend-il ? Il tient l’UMP par les deux bouts ! Et les courants[9] internes permettant le réel débat, dont l’existence est toujours inscrite dans les statuts, mais jamais autorisés par le seul fait du prince ? Et les votes des militants sur les points importants : promesse non tenue, même sur la position du mouvement relatif au référendum européen. Avant de vouloir « gouverner la France démocratiquement », pourquoi n’instaure-t-il pas une réelle vie démocratique au sein du mouvement qu’il préside ?
Vaste programme !
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