« Populisme », disiez-vous ?

Publié le 2 avril 2019 par maxime tandonnet

 

Publié le 2 avril 2019 par maximetandonnet

1-On assiste à une extension singulière du domaine du populisme dans les accusations de LREM : Marlène Schiappa a ainsi blâmé Cash Investigation et Envoyé Spécial pour avoir encouragé « une forme de populisme ». Dans quelle mesure cette manière de considérer que « le populisme, c’est les autres » empêche LREM d’être lucide sur ses propres méthodes ? Comment expliquer cette incapacité des LREM à percevoir toute forme de populisme en ses rangs, une situation illustrée par la diffusion de Ismaël Emelien de deux vidéos liés à l’affaire Benalla sur des comptes Twitter anonymes ?

La définition du populisme n’a jamais été très claire. En gros, est qualifiée de populiste l’idéologie qui se réclame du peuple contre les élites. Le mot connaît un succès phénoménal en ce moment. Il est utilisé de manière péjorative pour disqualifier toute opinion qui sort des sentiers battus. Les dirigeants français se considèrent comme l’incarnation du bien, de la jeunesse, de la modernité, de l’ouverture internationale, du dépassement des frontières et de la nation par la mondialisation et l’Européanisation. Ils fustigent la peste nationaliste et condamnent les « murs ». Ils se considèrent comme étant dans le sens du progrès. Et dans une vision caricaturale pour ne pas dire manichéenne, ils pointent du doigt l’ennemi populiste, leur antithèse. Ce qui frappe dans ce discours, c’est le retour de l’idéologie: le bien progressiste, dans le sens de l’histoire, en marche vers un avenir radieux, contre la réaction. Tous les régimes totalitaires ont pratiqué cette vieille méthode par le passé. La France n’est évidemment pas un régime totalitaire, mais dans une période de trouble profond, nous voyons resurgir le recours à de vieilles ficelles du passé. Il est normal que LREM se refuse à voir toute forme de populisme dans ses rangs. Cela ne cadrerait pas avec son idéologie qui consiste à se réclamer de la lumière contre les ténèbres.

2-Quelle est la part de populisme dans le mouvement du Président et dans sa victoire ?

Le mot de démagogie me semble préférable à celui de populisme. Le terme populiste, d’un usage commun aujourd’hui, est méprisant pour le peuple. Il renvoie au discours d’Adolphe Thiers en 1850, fustigeant la « vile multitude » pour abroger le suffrage universel. Alors, parlons plutôt de démagogie. Oui, au fond, la vie politico-médiatique française actuelle baigne dans la démagogie. Les méthodes que l’on reprochait jadis aux extrêmes, droite ou gauche, sont totalement banalisées. Le culte de la personnalité et l’extrême personnalisation du pouvoir en est un élément clé. La politique ne doit plus parler des problèmes de fond, qui en appellent à la raison, mais devient une affaire de passion amoureuse autour d’une idole surmédiatisée censée guider le peuple. L’idéologie de LREM est entièrement fondée sur cette mystique. En outre, nous voyons bien ce que devient jour après jour un peu plus la vie politique: une affaire de communication permanente, de postures, de propagande, de manipulation des foules. Les petites phrases polémiques et les provocations quotidiennes servent à capter l’attention des médias. Un voile d’hystérie permanente sert à recouvrir les échecs et les déceptions. La question n’est en aucun cas de réformer le pays mais de donner une image de réformateurs, au prix de toutes les manipulations. La vie politico-médiatique ne cesse de dériver dans l’émotionnel, les mirages, les chimères, le sensationnel et l’indignation. Et plus personne ne parle des vraies questions politiques: le chômage de masse, la pauvreté, la dette publique, l’insécurité, la maîtrise des frontières, la place de la France dans le monde, etc.

3- LREM n’aurait-elle pas finalement intérêt à assumer cette part de populisme ?

C’est difficilement envisageable. Dans l’idéologie LREM, la lumière c’est-à-dire le bien progressiste, est confronté aux ténèbres du mal populiste. Cette idéologie manichéenne recouvre des enjeux électoraux et de pouvoir. L’objectif est de conforter le tête à tête entre macronisme et lepénisme de manière à se maintenir le plus longtemps possible au pouvoir nonobstant les échecs, dès lors qu’une victoire du lepénisme semble à peu près inconcevable compte tenu de l’image de ce mouvement pour 80% des Français. L’élection présidentielle de 2022 est déjà en toile de fond de ce face à face. L’intérêt de la France disparaît anéanti derrière le seul objectif qui compte: la réélection présidentielle. C’est lamentable, mais c’est ainsi. Dès lors, LREM n’a aucun intérêt à opérer un retournement idéologique et à revendiquer une part de populisme. Cela reviendrait à rompre avec ses fondements idéologiques et à entrer dans une logique suicidaire. En revanche, au-delà de LREM, on pourrait imaginer qu’une opposition républicaine se saisisse de la question de l’anéantissement du politique et propose, au cœur de son programme, de réhabiliter les fondements de la politique au sens du gouvernement de la cité: substituer le culte de la vérité et du bien commun au culte de la personnalité, restaurer la notion d’intérêt général et le sens de l’action modeste au service du pays. Les dirigeants politiques ne sont pas des demi-dieux ni les maîtres du pays mais bien au contraire, ses humbles serviteurs le temps qu’il a besoin d’eux. Puissent-ils en prendre conscience…

Maxime TANDONNET

 

4 commentaires sur « Populisme », disiez-vous ?

  1. Le populisme pour le pire et le meilleur

    Tout le monde est, a été ou sera populiste. C’est déjà le cas de Vincent, François, Paul et les autres, des affreux, sales et méchants ou encore des gens sans importance.
    L’emploi du terme « populisme » dans un sens péjoratif a sa raison d’être pour certains provocateurs en fonction des circonstances et des opportunités du moment.
    Pour eux, c’est le dénigrement du camp des crasseux infréquentables mais qu’ils daignent toutefois inviter, comme lors d’un dîner de cons, lorsqu’il manque quelques joueurs sur le terrain pour constituer une équipe.
    Les pensées évoluent. Ainsi naguère, pouvait-on appartenir au camp armé d’un pavé en mai 68, puis plus tard à un autre totalement opposé, celui peut-être d’un bureau ministériel décoré de feuilles de chêne et de dorures d’où partirait un jour l’ordre de matraquer la vile multitude composée de sots qui se distinguent par leur ignorance et leur totale soumission comme le considère l’Etat, ce menteur et ce manipulateur le plus froid des monstres froids.
    Mais bien avant encore, il y eut le camp du soutien ou du combat contre le fascisme italien par exemple. Des destins individuels d’hommes et de femmes bien différents s’entremêlaient par amitié, par idéologie. L’origine sociale était pour certains mise entre parenthèse le temps d’un combat par solidarité.
    Il y eut des séparations tristes, dictées par les circonstances de la vie, avant des retrouvailles parfois hasardeuses et déchirantes paradoxalement. En effet, alors que changer le monde était au départ un leitmotiv commun, ce fut plutôt le monde qui changea l’état d’esprit de vieux amis, soudés autrefois par des passions et des complicités, à tel point d’ailleurs que certains furent méconnaissables comme s’ils eurent subi un lavage de cerveau.
    C’est le constat désarmant, que les amours, les passions, les idéaux meurent comme meurent à petit feu les amis qui abandonnent leur passé au profit d’ un nouveau monde, celui d’une classe sociale supérieure élitiste.
    Les vieux réflexes sociaux ont la vie dure.
    Le coeur d’un témoin survivant en subit une double blessure instantanément qui ravive de vieux chagrins d’amour de toutes natures, venus de l’ancien monde et qu’il croyait engloutis dans les plus profonds abysses.
    Et soudain, le film du grand réalisateur Ettore Scola « Nous nous sommes tant aimés » défile à une vitesse vertigineuse. Toujours aussi prégnant et actuel, il ne prend pas une ride mais nous achève d’un coup de glaive en plein coeur lorsque ressurgit la notion de sentiments et d’engagements partagés au cours d’une période de vie passée.
    Entre le bien ou le mal, entre le pire et le moindre mal, entre la lumière dans laquelle se pressent des hommes non pas pour voir mieux mais pour me briller ou le pouvoir des ténèbres et les ténèbres du pouvoir, entre la raison ou la passion, entre la démagogie et son cortège d’espérances ou le réalisme, il y aura toujours le manichéisme de l’homme pris dans ses contradictions comme le mot populisme qu’il inventera et qui renferme à la fois la diabolisation du peuple qu’il faut mater pour stopper sa critique contre le pouvoir, et celui du dernier recours pour le flatter et attirer ses bonnes grâces ou au pire pour sauver un pays plongé dans le désespoir à cause d’une élite battue et dès lors disqualifiée.

    Quoi qu’on pense du populisme aux multiples définitions, tous les partis politiques alimentent le populisme en surenchérissant surtout en période électorale. C’est un jeu devenu populaire et très dangereux pour qui ne sait pas manier des allumettes avec précaution près d’un baril de poudre. Ce n’est pas forcément le meilleur moyen de servir l’intérêt général…et celui du pays.

    Rf 6.4.2019

  2. Jean-Dominique Gladieu // 2 avril 2019 à 14 h 27 min //

    Insinuer que la « démarche » du chérubin relève du Populisme est insultant pour le Populisme.
    Car historiquement, qu’est-ce que le Populisme ? C’est un mouvement politique né vers le milieu du XIX° siècle aux USA et en Russie (sans aucun lien structurel ou organisationnel entre les deux).
    Dans les deux cas, il s’agit d’un mouvement pour le partage de la terre avec une dimension ouvertement révolutionnaire en Russie.
    On ne voit donc pas en quoi le Populisme serait à bannir…
    Mais le plus drôle, c’est que la connotation péjorative donnée au Populisme ne vient pas des « démocrates » ou prétendus tels mais de Staline qui dans les années 1930 reprochait à ses opposants de vouloir instaurer la démocratie au sein du parti. Et il les trait de « populistes » et de naïfs.
    Messieurs les antipopulistes, libre à vous de marcher sur les traces de Staline (d’ailleurs c’est rigollot : il conchie le populisme et se fait appeler « Petit Père des Peuples » !)… C’est fou le nombre de staliniens qu’on rencontre chez les anticommunistes !

  3. J’aime bien la définition que donne Bernard Henri Levy du le populisme.

    1) Le populisme c’est prendre une catégorie du peuple et dire qu’elle est le peuple.

    2) Cette catégorie du peuple érigée au rang de peuple tout entier pense que son pouvoir n’a aucune limite, qu’il ne doit être borné par rien, qu’il ne doit être représenté par personne, et qu’il doit s’exprimer directement et avoir force de loi.

    En clair le populisme c’est le peuple souverain mais d’une souveraineté qui soudain devient absolue sans contre pouvoir, sans institution , sans médiation sans rien de tout cela.

    je suis tout à fait d’accord avec ce paradigme.

  4. Le « chérubin du Palais » cherche à faire le vide total autour de Lui et de ses sbires. Son Populisme à lui c’est son nombrilisme éhonté !Alors son bonheur n’est pas celui du peuple (Oh que NON) mais de mettre tout le monde à genoux plus bas que terre. A ce petit jeu nous irons bientôt à un enterrement de LREM et de son mentor nombrilistique défaillant, car, comme vous le dites fort justement Maxime Tandonnet « Les dirigeants politiques ne sont pas des demi-dieux ni les maîtres du pays  » et sont donc mortels !!!!

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