Ivan Rioufol : «La France, en attente de preuves d’amour»

Par Ivan Rioufol

La grande braderie de la nation et de sa langue qu’opère Macron est le meilleur carburant du populisme, qui est la voix de ceux qui ne veulent pas que la France disparaisse.

Mener la guerre au populisme, c’est guerroyer contre le peuple pacifique. Emmanuel Macron le démontre: il maltraite la France qu’il dit vouloir protéger. Le chef de l’État voit son pays comme une vieille chose à transformer. Or nombreux sont ceux qui refusent cette orgueilleuse utopie. Candidat à la présidentielle, il avait déclaré en février 2007: «Il n’y a pas de culture française. Il y a une culture de France. Elle est diverse.» Le relativisme adore jeter ses pelletées de terre sur la nation millénaire.

Macron aime-t-il la France ? Oui, il aime la France. Mais cruellement. Il l’humilie quand il la presse d’être une autre

L’autre jour, au sommet de la francophonie à Erevan (Arménie), Macron a récidivé: «Quand je parle de langue française, je parle de nos langues françaises. Son épicentre n’est ni à droite ni à gauche de la Seine. Il est sans doute dans le bassin du fleuve Congo…» Après l’éloge du multiculturalisme, celui de la créolisation des mots. Mais vouloir dissoudre la culture, la langue, le peuple, revient à promouvoir une terre de passage, aux allures de hall de gare ou d’aéroport international.

D’où la question: Macron aime-t-il la France? Oui, Macron aime la France. Mais cruellement. Il l’humilie quand il la presse d’être une autre. Sa détestation des effusions nationales dit tout. Le dégoût que lui inspire le Hongrois Viktor Orban révèle ce qu’il exècre: la défense des territoires fragilisés par l’immigration massive, la protection des nations dans leurs racines chrétiennes, la valorisation des citoyens oubliés.

Or Orban exprime des idées respectables, comprises par beaucoup. Philippe de Villiers, qui admet avoir été «très déçu» par Macron, qui l’avait séduit, fait écho à l’opinion réfractaire quand il prédit (Valeurs actuelles): «On va vers “l’orbanisation” des esprits, à savoir le retour à des choses simples: une frontière est une frontière, un État est un État, une souveraineté est une souveraineté et le peuple est le peuple – on ne peut décider sans lui.» Macron est l’héritier de l’idéologie diversitaire qui faisait titrer au mensuel mitterrandien Globe : «Étrangers, ne nous laissez pas seuls avec les Français!» «J’aime la France. La gauche ne l’aime pas», écrit Benoît Rayski, qui vient de ce temps-là (1).

Le nouveau gouvernement, qui a notamment fait entrer mardi Christophe Castaner à l’Intérieur et Franck Riester à la Culture, confirme le renoncement du macronisme à lutter sérieusement contre l’islamisme et la déculturation. Castaner est la voix fidèle mais sans apprêt de Macron. C’est le nouveau ministre de l’Intérieur qui avait tweeté, en soutien à un raisonnement saugrenu du chef de l’État: «Qui doute que le réchauffement climatique pèse sur la dynamique du djihad?»

Lui qui avait comparé le voile islamique à celui, catholique, «que nos mamans portaient». Son angélisme face à l’islam «religion de bonheur, d’amour» promet des débandades, alors que son prédécesseur, Gérard Collomb, a alerté lors de son départ sur de possibles affrontements face aux cités salafisées. Et constater que la Macronie n’a trouvé que le pâle Riester, politicien ambitieux venu de la droite, pour conduire la politique culturelle de la France, dévoile le désert intellectuel et artistique qui s’est installé chez les experts et technocrates de La République en marche arrière.

Ce qui reste inexplicable est l’incapacité du chef de l’État à s’amender. Prisonnier de sa posture postnationale, il en rajoute dans son mépris des enracinements et des héritages. La semaine dernière, Macron a ainsi approuvé la nomination de la rwandaise Louise Mushikiwabo comme secrétaire générale de la francophonie. Or le Rwanda a, en 2008, remplacé le français par l’anglais comme langue obligatoire à l’école. Ce pays a également rejoint le Commonwealth, qui est le concurrent de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF).

Cette grande braderie de la nation et de sa langue est le meilleur carburant du populisme, qui est la voix de ceux qui ne veulent pas que la France disparaisse. Force est de constater que ce gouvernement, derrière qui rien ne semble repousser, ne se montre pas à la hauteur de son peuple. Il ne suffit pas de venir le plaindre devant les caméras quand il est frappé par des inondations, comme lundi dans l’Aude (14 morts). La France malmenée attend des preuves d’amour. De Macron, elles ne viennent toujours pas.

Macron somnambule

«Je sais toutes les blessures de notre vieux pays», a certes déclaré le président, mardi soir dans une courte intervention télévisée et préenregistrée à la va-vite. Pourtant, quand il s’empresse dans le propos suivant de critiquer les «nationalismes», il confirme qu’il ne veut rien entendre du désarroi qui alimente ce courant réactif d’autoprotection. Il dit aussi: «Nous sommes une nation qui se tient par mille fils tendus.» Cependant, il oublie les alertes de ceux qui constatent, souvent depuis des lustres, le délitement du pays.

Une nation ne se tient plus quand une nation concurrente, rattachée au Coran, s’installe ici et là en rencontrant d’autant moins d’obstacle que l’État ferme les yeux. Macron annonce vouloir «une autre organisation des religions».

Le vide qui envahit la bavarde Macronie l’éloigne du reste de la société qui, elle, phosphore comme jamais sur des améliorations

Mais aucune religion ne pose un problème, sinon l’islam quand il n’entend pas respecter les valeurs et les usages du pays qu’il a rejoint. Aussi, merci, Monsieur le Président, de bien vouloir laisser tranquilles tous ceux qui vivent leur foi dans leur intimité.

L’arrogance que réserve le chef de l’État à la vieille France semble être une attitude qu’il s’autorise aussi avec ses ministres, ses collaborateurs, ses interlocuteurs. C’est en tout cas ce trait de caractère, l’arrogance, qui est noté dans les enquêtes d’opinion. Le nouveau gouvernement en porte aussi les traces: deux semaines de suspens pour en arriver à cette coalition de seconds couteaux font comprendre que le chef de l’État a probablement découragé nombre de ses plus brillants soutiens et épuisé beaucoup de ses troupes. Serait-ce le crépuscule de la politique?

Le vide qui envahit la bavarde Macronie l’éloigne du reste de la société qui, elle, phosphore comme jamais sur des améliorations. C’est dans ce monde d’en face, celui du peuple raisonnable, que s’élabore la nouvelle modernité libérée des gourous millénaristes et autres vendeurs de salades. En fait, Macron est le somnambule qu’il croit voir chez ses adversaires.

Légitime résistance

Légitime est la résistance contre les maltraitants de la France. Mais cette attitude perd tout attrait quand elle s’abîme dans l’outrance et la violence, personnifiées cette semaine par Jean-Luc Mélenchon aux prises avec la Justice et la Police judiciaire. En jouant la provocation, l’extrême gauche se disqualifie.

Ivan Rioufol


(1) «Les Bâtards de Sartre», Éditions Pierre-Guillaume de Roux.


 

3 commentaires sur Ivan Rioufol : «La France, en attente de preuves d’amour»

  1. « Force est de constater que ce gouvernement, derrière qui rien ne semble repousser, ne se montre pas à la hauteur de son peuple  » .
    Mais voyons Monsieur RIOUFOL, qui a propulsé au plus haut sommet de l’Etat cette bande de profiteurs de la République incapable de remettre la France les pieds sur la terre du progrès et donc du bonheur pour le plus grand nombre ?
    Pire ,le peuple s’est contenté d’attendre que le « chérubin du palais » et ses sbires fassent leurs preuves en leur accordant l’excuse d’être nouveaux en politique! !
    On voit ce que cela donne dans un concert international interdépendant où la France affiche ses problèmes internes au lieu de rayonner par son esprit d’avant garde sociale et économique.
    On réinvente les dispensaires sous un nouveau vocabulaire de Maisons de Santé. On ambitionne de gagner beaucoup de médailles aux futurs jeux olympiques et on réduit les effectifs de cadres du sport de haut niveau On fait la promotion de la formation professionnelle ,clé de voûte de la réduction du chômage, et on réduit les effectifs de Pôle Emploi et en fermant les centres de formation de l’AFPA !
    La résistance n’est assurément pas au rendez-vous d’un peuple sinistré intellectuel par les manœuvres d’un pouvoir multicolore bleu rouge rose vert qui ne s’embarrasse plus depuis des décennies à faire prendre des vessies pour des lanternes au plus grand nombre !

  2. Jean-Dominique GLADIEU // 19 octobre 2018 à 15 h 22 min //

    Je serais tenté d’applaudir ce texte. Malheureusement, la dernière phrase vient un refroidir mon enthousiasme.
    Ce n’est quand même pas JL Mélenchon qui est responsable de la politique actuelle du gouvernement. il n’a fait que protester contre l’utilisation intempestive que le chérubin du palais (clin d’œil au passage à Baert) fait de la police et de la justice.

  3. le Général était un nationaliste ,,donc populiste ,tout les peuples sont nationaliste ,,Bruxelles ,ne le comprend pas ,et va bientôt le payer

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*