« Pognon de dingue » : le naufrage du fond et de la forme de Macron

par Laurent Herblay

Le papier de lundi, où j’expliquais que « le macronisme est avant tout un sarkozysme » pouvait-il trouver une meilleure illustration que la vidéo publiée mardi soir par la présidence de la République où l’on voit le Jupiter de pacotille de l’Élysée faire la leçon à ses conseillers. Les macronistes y verront sans doute un entraineur travailleur et exigeant. Mais, au final, l’impression est désastreuse.

La présidence, façon télé réalité

En effet, on imagine bien que si le Sarkozy de 2007 avait été élu dix ans plus tard, au même stade de sa carrière, il aurait parfaitement pu produire une telle séquence, cette mise en scène de lui-même et des coulisses du pouvoir, ce caractère si jupitérien et inconscient du mauvais effet qu’il peut faire sur les Français. La forme est grossière dans tous les sens du terme. Dans les énormes ficelles communicantes utilisées : le président travaille tard et est exigeant. Sur la forme : est-il vraiment digne d’un président de faire publier sur son compte une telle séquence ? La mise en scène ressemble un peu trop à des émissions de télévision bas de gamme pour être véritablement crédible.

Et sur le fond, on touche véritablement le fond. Les propos présidentiels ressemblent davantage à un bistrot du commerce du Medef ou de Davos : on y retrouve le prêt-à-penser superficiel oligolibéral selon lesquels les aides sociales déresponsabiliseraient. Une vision qui oublie que la redistribution a permis de limiter la progression des inégalités et de la pauvreté par rapport aux autres pays européens, et surtout que ce sont les politiques que promeut le président qui provoquent cette pauvreté. La pauvreté en France, c’est le produit d’une monnaie inadaptée, des accords de libre-échange ou du recul de l’Etat et plus globalement des politiques oligo-libérales qui ne servent qu’une minorité.

Et en prenant un peu de recul, on est saisi de vertige devant l’inconscience de la publication d’une telle vidéo. Le président, au pouvoir depuis 6 ans, n’admet-il pas qu’il n’a pas la moindre idée de ce qu’il faut faire pour réduire la pauvreté, et que rien de ce qu’il a fait depuis n’a pas eu le moindre effet, une illustration des plus parlantes du caractère oligarque des politiques qu’il mène ? A minuit, la veille d’un discours majeur, destiné à synthétiser la pensée sociale du président, on découvre qu’elle n’est non seulement pas complexe, mais tout simplement inexistante, Macron en étant encore au stade d’un constat bas de plafond six ans après être arrivé au pouvoir dans les bagages de Hollande

Cette séquence, c’est le président-nu, nu dans le vide de sa pensée, bien plus superficielle que complexe, incapable d’articuler la moindre réflexion sociale, au-delà de quelques cadeaux éclipsés par son attaque en règle des politiques sociales. La mise en scène du caractère jupitérien du président n’en devient qu’encore plus ridicule, comme un mauvais épisode du loft présidentiel.

 

4 commentaires sur « Pognon de dingue » : le naufrage du fond et de la forme de Macron

  1. @ Jacques Payen
    Je partage entièrement votre avis. Ceux qui ont voté Macron, même au second tour, ne doivent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Tout cela était bien prévisible.

  2. A Laurent Herblay…. »Cette séquence, c’est le président-nu, nu dans le vide de sa pensée, bien plus superficielle que complexe »…100% d’accord ,mais ce qui étonne c’est la lenteur avec laquelle des gens sérieux se rendent compte que ce « parvenu » de nulle part ne mène nulle part le peuple de France qui l’a pourtant élu par défaut avec moins de 25% des suffrages exprimés par les électeurs inscrits !!!! Nous ne sommes pas au bout de nos exaspérations puisque finalement « le bon peuple de France » lui accorde un droit à l’erreur que tout  » chérubin du palais » mériterait !!!!

  3. DOMINIQUE BAGUET // 14 juin 2018 à 18 h 09 min //

    Je rejoins totalement cette analyse;au lieu de rassembler, c’est la division quasi permanente…

  4. Jacques Payen // 14 juin 2018 à 17 h 13 min //

    Le candidat Macron est l’homme des banquiers. Ils ont favorisé et financé sa campagne. Il est l’homme des Traités européens néo-libéraux, l’homme de la religion du marché et de la mise en concurrence des hommes à outrance. Il est l’homme de la globalisation.

    Le pognon est son univers mental indépassable. Donner du pognon aux possédants, c’est à ses yeux logique et profitable. Donner du pognon aux déclassés, c’est du gaspillage.

    Il est un peu vain de s’étonner de cette Nième provocation.

    La seule question intéressante me semble être celle-ci : les belles âmes humanistes qui nous ont tant et tant donné de vertueuses leçons de morale lors de la campagne présidentielle finiront-elles par quitter le navire Macron, dans quelle proportion et quand ?
    De la réponse à cette question dépend la suite de la « Croisière Macron s’amuse ».

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