Jusqu’où ira l’affaiblissement de l’État-nation en France ?

La France sans l'Etat n'est plus une Nation

En sens contraire, on assiste de la part des trois grands de ce monde (Chine, Russie, États-Unis) à un renforcement de la puissance étatique.

par Paul BernardDocteur en droit, préfet de région honoraire, ancien préfet de la région Corse

Les « princes » qui nous gouvernent sont censés être cultivés et donc savoir qu’en France, l’État est déterminant parce qu’il a créé et précède la nation depuis 2000 ans et qu’il continue d’en assurer la garde, le pilotage et la protection. En effet, il n’y a pas de France sans son État efficace.

Il est donc légitime de se demander pourquoi, depuis plusieurs décennies, les gouvernements paraissent s’acharner à pousser l’État sur la pente de son effacement. Le peuple a le droit de s’interroger sur l’intention des dirigeants qui n’avouent pas les raisons d’encourager de telles orientations.

Depuis, Mai 1968 ayant fait le procès de l’autorité et proclamé une licence sans limite, après la décentralisation substituée à l’État territorial, après l’abandon au secteur privé des 6.000 kilomètres d’autoroutes, fleurons de l’exceptionnelle compétence des meilleurs ingénieurs de l’État, voilà que, sans présenter une nouvelle stratégie, les gouvernements précipitent la France dans la fusion avec une Europe fédérale, dans un libéralisme économique non maîtrisé, dans une mondialisation offerte au libre jeu du marché et au profit des multinationales, et maintenant dans un train de privatisations pouvant porter atteinte à nos infrastructures territoriales, ferroviaires et aéroportuaires. Nos concitoyens peuvent normalement exiger de connaître les retombées positives dont ils pourraient bénéficier.

Or, en sens contraire, on assiste de la part des trois grands de ce monde (Chine, Russie, États-Unis) à un renforcement de la puissance étatique et à la priorité attribuée à l’intérêt national. L’Union européenne subit à son tour le contrecoup de manifestations nationales, telles que le divorce du Brexit britannique et la montée irrépressible, dans de nombreux pays européens, d’un redouté populisme qui exprime simplement la réaction des peuples refusant de se laisser conduire dans l’inconnu.

De plus, comme s’il s’agissait de mettre en condition le peuple français, toutes les occasions sont bonnes pour culpabiliser nos compatriotes et leur inspirer la repentance pour des crimes d’État dont ils n’avaient pas conscience. Pour dégrader davantage l’état d’esprit collectif, les pouvoirs publics et les médias s’efforcent de faire croire que l’immigration massive, en partie clandestine et dangereusement communautariste, serait une chance pour le pays. Tandis qu’à défaut de mettre en place les moyens du redressement économique et financier, il est proposé, pour sortir de l’ornière, une plongée de la France dans une Europe apatride et pratiquement inopérante.

Les conséquences d’une telle évolution deviennent chaque jour plus sensibles à l’opinion. Les maladies d’un État affaibli se manifestent dans les secteurs régaliens prioritaires : Justice, sécurité, finances et santé publiques. La violence endémique et l’immoralité croissante entraînent une dégradation de l’esprit public et, par mimétisme, font renaître les comportements d’une chienlit détestable. Nos défenses immunitaires s’affaiblissent.

La question qui se pose en démocratie est de savoir si les Français sont informés, s’ils sont conscients et d’accord pour adhérer à la doctrine nouvelle d’un État défaillant, qui apparaît à contre-courant de leur histoire et de leurs besoins. Il n’est pas possible d’égarer un peuple sans lui demander son avis. Il convient d’exiger des gouvernants la loyauté d’avouer la réalité de la situation de notre monde, l’honnêteté de proposer les directions de l’avenir et le courage de consulter le peuple. La France de deux millénaires ne peut pas se voir imposer un virage sans visibilité et sans que les citoyens aient été appelés à trancher les options et à assumer une telle grande cause nationale.


Source : http://www.bvoltaire.fr/jusquou-ira-laffaiblissement-de-letat-nation-france/


 

5 commentaires sur Jusqu’où ira l’affaiblissement de l’État-nation en France ?

  1. Tout est là, tout est dit, et bien dit ! Mais comment faire comprendre à la masse des Français qu’on les leurre et qu’ils ne s’en rendent même pas compte, c’est les prendre pour ce qu’ils sont : des moutons consommateurs préoccupés par leur petite vie ( pas toujours rose), leur petit quotidien ( pas toujours facile), sans savoir prendre le recul et regarder la France qui les entoure qui autrefois leur offrait un cadre de vue , une sécurité, qui n’existe presque plus… Quand les Français voteront en arrêtant de se regarder le nombril on aura fait un grand pas.

  2. Sur les traces de Dame Carcas
    Les puissants n’ont pas à s’entourer particulièrement de précautions. Ils ont la force. Ils peuvent donc attaquer ou contre-attaquer relativement aisément.
    Les faibles doivent au contraire user de ruses et de subterfuges pour espérer s’extirper de situations difficiles.
    Dire ou ne pas dire, faire ou ne pas faire, cela relève de la stratégie au nom parfois de l’intérêt supérieur d’un pays.
    La légende de Dame Carcas qui donna ensuite son nom à la cité de Carcassonne, tristement visée aujourd’hui, tout comme Trèbes dans l’Aude en Occitanie d’un attentat terroriste, peut servir de début de réflexion à la notion d’Etat-Nation et aux conséquences de son affaiblissement.
    La France n’y échappe pas
    Rf 27.3.2018

  3. « La violence endémique et l’immoralité croissante entraînent une dégradation de l’esprit public et, par mimétisme, font renaître les comportements d’une chienlit détestable.  » Certes tout cela est juste mais il faut prendre cette analyse dans les deux sens : qui propulse des faiseurs du n’importe quoi aux manettes de l’Etat ?Naturellement « Le peuple a le droit de s’interroger sur l’intention des dirigeants qui n’avouent pas les raisons d’encourager de telles orientations. » ce serait déjà un progrès si le peuple se remettait lui même en cause de ses carences civiques !!!!

  4. Une grande partie du problème réside dans la trahison des élites depuis le 29 mai 2005 qui méprise le peuple parce qu’il pense mal et vote mal.

  5. Cet article est effroyable de clarté et de lucidité.
    Tout y est dit et reflète probablement la pensée d’une grande majorité des français. (Du moins, les vrais français, ceux qui aiment leur pays et voudraient tant revenir au bien vivre des années 60-70. Avant qu’il y ait toute cette engeance pour nous pourrir la vie.
    M. Ch. Stra

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