Le voyage de De Gaulle en Charente

le-comedien-thomas-blanchet-le-realisateur-daniel-gachignat-et-son-comparse-pierre-marie-pautrot-noublient-aucun-detail-de-ce-voyage-presidentiel-photo-majid-bouzzitDeux Charentais passionnés de cinéma et d’histoire ont fouillé dans les archives. Ils ont reconstitué le voyage de De Gaulle en Charente et Charente-Maritime en 1963 dans un film étonnant d’une heure et demie.

Extrait du film « Le grand Charles en Charente et Charente-Maritime »:

vidéo

Dans les pas de De Gaulle en Charente par CharenteLibre

Tout a commencé avec des rushes qui dormaient au fond d’une armoire en Charente-Maritime. Les « restes » des images d’un reporter de l’époque qui avait couvert le voyage du général De Gaulle dans la région les 12, 13 et 14 juin 1963.

Aidé par son comparse Pierre-Marie Pautrot, Daniel Gachignat, passionné de cinéma et d’histoire, en a fait un vrai film qu’il présentera pour la première fois lundi 13 juin à Angoulême (lire encadré).

Une heure trente dans les pas du « Grand Charles » de retour au pouvoir depuis 1958, lancé dans un véritable tour de France pour préparer la première élection présidentielle au suffrage universel de 1965.

Une balade à travers les Charentes, ses villes et villages incroyablement pavoisés, de Cognac à Royan en passant par Angoulême, La Couronne, Ruelle, Roumazières, Confolens ou Barbezieux, racontée avec verve par le comédien charentais Thomas Blanchet, à la manière passionnée d’Alain Decaux.

Tontons flingueurs sur les dents et lettre anonyme

Le fleuriste à la retraite et l’assureur de Champniers se sont connus il y a trois ans en travaillant ensemble sur « Adieu Dino », un polar « mockyesque » à la mode charentaise. Avec ce documentaire sur De Gaulle, ils ont totalement changé d’univers, même si on retrouve quelques tontons flingueurs, avec les gorilles du Président sur les dents.

La guerre d’Algérie n’est pas encore digérée. La Charente, où sera enterré le général putschiste Edmond Jouhaud, compte quelques supporters de l’OAS (Organisation armée secrète). Le climat est instable, comme le prouve cette lettre anonyme annonçant qu’à Cognac, « une femme tuera le Général avec une bague empoisonnée en lui serrant la main ».

Mille deux cents CRS et 80 policiers, parfois déguisés en ouvriers pour surveiller les milliers de badauds massés place Bouillaud à Angoulême, sécurisent le voyage présidentiel.

C’est à un véritable travail d’enquête que s’est livré Daniel Gachignat. Les trente minutes d’images qu’il a récupérées étaient montées de manière aléatoire, sans son, sans la moindre indication.

Aussi floues que les souvenirs de ce jeune garçon de 14 ans à l’époque qui était dans la foule venue applaudir le président de la République au bord de la route d’Aulnay-de-Saintonge. « À partir des images, j’ai tiré des photos et je suis allé dans toutes les communes visitées par De Gaulle pour identifier les lieux et les personnages, raconte Daniel Gachignat en remerciant tous ceux qui l’ont aidé. Au mémorial de Chasseneuil, où on a tourné quelques plans, la municipalité a absolument tenu à installer des drapeaux neufs pour notre tournage. »

Les fiches des RG

Le cinéaste-historien amateur a fouillé partout, dans les pages des journaux, aux archives départementales, dans des collections privées, dans les images de l’Institut national de l’audiovisuel (INA). Il a déniché de véritables trésors, comme ces fiches des RG répertoriant les anti-gaullistes de Charente, jusqu’au maire d’Angoulême, Henri Thébault.

Il a également interrogé des témoins directs, comme l’historien angoumoisin Jacques Baudet, l’ancien photographe de CL Jean-Louis Lauté, incollable sur la moindre anecdote locale, la fillette aujourd’hui grand-mère qui avait eu l’honneur d’offrir des fleurs à De Gaulle à son arrivée à Saint-Savinien, et même des rescapées de l’attentat du Petit-Clamart. Le reste, c’est le système D, par exemple pour coller une bande musicale capable de faire illusion sur les images muettes de la fanfare de Cognac.

Dans le texte qu’il a rédigé, Pierre-Marie Pautrot distille les anecdotes. L’arrêt de la micheline présidentielle dans la gare du Quéroy pour permettre au général et à Yvonne de déguster leur turbotin au chablis sans soubresaut, pendant que le convoi officiel de 35 voitures fait la route entre Cognac et Roumazières.

L’astuce du maire socialiste de Ruelle, qui a résisté à la demande préfectorale d’installer des micros, « afin que ses administrés n’entendent pas les paroles aimables adressées au chef de l’État ». On découvre aussi comment le puissant chef d’entreprise au passé trouble, Gérard Doeuil, est fermement prié de partir en week-end dans son yacht amarré à Arcachon et d’inviter à son bord le docteur Diacono, un activiste de l’OAS, récemment condamné.

Pierre-Marie Pautrot a même retrouvé la trace du grand homme dans son histoire familiale. « C’est mon grand-père, à l’époque notaire, qui avait vendu à la famille De Gaulle une propriété à Champagne-Fontaine, à la limite de la Charente et de la Dordogne, où le petit Charles passera de nombreuses vacances entre 1901 et 1908. »

 

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2 commentaires sur Le voyage de De Gaulle en Charente

  1. « J’ai la mémoire qui flanche » (Chanson de Jeanne Moreau de 1963 comme par hasard) surtout n’m’en voulez pas !
    Lire François de Roubaix et non pas Francis Roubais dans mon commentaire.

  2. Souvenirs, souvenirs…

    C’est avec une certaine émotion que je parcours l’article consacré au voyage de De Gaulle dans les Charentes en juin 1963.

    J’apprends avec plaisir que le film de cet événement sera présenté le 13 juin prochain à Angoulême, capitale internationale de la bande dessinée et de l’image, non loin de Cognac, lieu de nombreux festivals et où naquit François d’Orléans, appartenant à la branche de Valois-Angoulême, avant de devenir François 1er, roi de France en 1515.

    Le plus émouvant sera sa présentation le 18 juin 2016 à Chasseneuil -sur-Bonnieure, haut- lieu de mémoire et d’histoire, représenté par le mémorial de la résistance pour ne pas oublier ceux tombés « pour la liberté et la grandeur de la patrie », faisant le « V » de la victoire avec sa Croix de Lorraine. D’une masse de 2000 tonnes et haut de 21 mètres, avec sa nécropole nationale, il fut inauguré en 1951 par le Président de la République Vincent Auriol en « Hommage au nom de la Nation, à tous ceux qui ont lutté, résisté, à tous ceux qui se sont sacrifiés ».

    C’est un lieu que j’aie eu l’occasion de parcourir étant gamin et qui m’avait fortement impressionné. Entouré de paysages bucoliques, j’aimais parcourir la rivière sauvage proche, la ‘’ Bonnieure’’ affluent de la Charente pour y taquiner le goujon ou la tanche effleurant la surface de l’eau d’un œil goguenard ; observer la danse erratique des éphémères lucioles d’une nuit d’été étoilée ; écouter le souffle puissants des ruminants, voir une foire aux bestiaux ; parcourir à perdre haleine des champs à perte de vue, de luzerne parfumée, de blés, sous un soleil de plomb et y déloger peut-être perdrix et faisans…humer l’odeur d’ un chai, manger pâtés et jambons du pays en me servant de mon couteau de poche à manche de buis du Périgord.

    Le Château de La Rochefoucauld de style renaissance, sur la ‘’Tardoire’’, autre affluent, n’est qu’à quelques encablures.
    François VI duc de La Rochefoucauld, écrivain mémorialiste et moraliste est l’auteur de maximes morales comme sur la vanité, écrites lorsqu’il s’exilera, après être tombé en disgrâce, au château de Verteuil-sur-Charente dans le pays du Ruffécois au Nord d’Angoulême, pour avoir au départ conspiré contre le cardinal de Richelieu, ministre du roi Louis XIII , à l’origine du siège de la Rochelle et des fortifications dont celles des îles de Ré et d’Oléron, pour neutraliser les protestants soutenus par l’Angleterre qui voulait par ailleurs freiner le développement de la marine française.
    Jean de La Fontaine dédira au duc une fable « L’homme et son image ».

    J’ai forcément une pensée pour le massacre d’Oradour-sur-Glane en 1944 près de Limoges sans disjoindre le cas toujours sensible des « Malgré-nous ». Les événements tragiques ont inspiré le magnifique film franco-allemand « Le vieux Fusil » avec des acteurs époustouflants comme Romy Schneider, Philippe Noiret et Jean Bouise sur une musique magnifique de Francis Roubais. Leur absence est une perte immense pour le cinéma français.

    Cet article me donne l’occasion d’en féliciter leurs auteurs et d’avoir du même coup une pensée, non sans un pincement au cœur, pour les cagouillards, les pieds dans leurs sabots ou dans leurs charentaises, avec qui je jais chabrot.

    René Floureux 10.6.2016

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