Primaire de la droite et du centre : où est passée la ligne Séguin?

FIGAROVOX/ANALYSE – Après le conseil national des Républicains du 12 et 13 février et alors que Jean-François Copé vient d’annoncer sa candidature à la primaire, Maxime Tandonnet s’interroge sur la transformation du RPR de Philippe Séguin en parti gestionnaire à la ligne idéologique indéfinie.


Maxime Tandonnet décrypte chaque semaine l’exercice de l’État pour FigaroVox. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont Histoire des présidents de la République , Perrin, 2013. Son dernier livre Au cœur du Volcan, carnet de l’Élysée est paru en août 2014. Découvrez également ses chroniques sur son blog.


La vie des Républicains, au vu du conseil national des 12 et 13 février est en apparence marquée par un clivage idéologique. La tendance dominante serait à la « droitisation » incarnée par le discours du président Sarkozy ou de ses proches qui la revendiquent. Ainsi, Laurent Wauquiez a proclamé, « nous sommes de droite ». Jean-François Copé, ayant annoncé sa candidature à la «  primaire », se rattache à ce courant. En face, l’autre camp, minoritaire dans le parti, qui s’est exprimé par la voix de Jean-Pierre Raffarin, dénonce une dérive exagérément « clivante » et préconise une ligne plus consensuelle. Cette sensibilité, incarnée par Alain Juppé, a en revanche pris l’ascendant dans l’opinion publique. Le paradoxe est évident. Les sondages montrent une France en quête d’autorité, de valeurs traditionnelles et de conservatisme. Mais en même temps, ils sont en faveur de l’apaisement et de l’unité. L’opinion publique est un phénomène complexe et contradictoire…

Mais le fond du problème, c’est qu’au-delà des nuances affichées ces derniers temps, les candidats déclarés ou probables aux primaires de novembre sont tous sur une sensibilité voisine. Ils ont participé ou ont été étroitement associés au gouvernement de François Fillon. Ce dernier a été Premier ministre de Nicolas Sarkozy pendant cinq ans. Aujourd’hui, chacun avance son petit projet concocté dans un coin. Mais fondamentalement, tous adhèrent à la même philosophie politique. Leurs propositions touchent à la surface des choses : niveaux des impôts, nombre de fonctionnaires. Ils ne développent aucune réflexion de fond sur l’État, l’Europe, la société française. Ils se reconnaissent dans le système politique et social qui prévaut aujourd’hui. Leur logique est identique : elle est celle de la réforme en surface, et non de la transformation profonde.

Philippe Séguin, lors du débat de Maastricht, en visionnaire, avait dénoncé l’engrenage bureaucratique qui s’est mis en place contre les peuples et les Nations.

Aucun d’eux ne pose la question fondamentale de l’Europe. Philippe Séguin, lors du débat de Maastricht, en visionnaire, avait dénoncé l’engrenage bureaucratique qui s’est mis en place contre les peuples et les Nations. Le continent européen, déchiré, a certes besoin d’une unité, d’une volonté commune, d’une synergie politique entre ses gouvernements et ses peuples pour faire face aux périls de la guerre, du terrorisme, du chaos migratoire. L’Europe des États, telle que la voulaient de Gaulle et Séguin, s’impose aujourd’hui comme une nécessité vitale pour le continent. Or, bien au contraire, ce dernier s’enfonce dans la désintégration tout en s’abandonnant à la bureaucratie bruxelloise, la prolifération des règlements et des jurisprudences. Qui en parle ? Personne parmi les candidats aux primaires.

Sur les institutions de la République, la France politique est prise dans une fuite en avant hystérique autour de la conquête de l’Élysée au point d’en perdre tout sens du bien commun. L’exercice du pouvoir, le service de l’intérêt général, le sens du gouvernement, sont à réinventer en profondeur, de manière radicale. La fracture entre la majorité silencieuse et les élites politiques qui donnent le sentiment de vivre en circuit fermé et de se replier sur leurs avantages, ambitions et intérêts personnels, atteint un niveau vertigineux. Sur cette question, celle du renouvellement de la classe dirigeante et de la démocratie réelle, l’aveuglement est à peu près total.

Il ne suffit pas de proclamer que la France est « d’origine chrétienne » ou que « nous sommes de droite !» pour manifester une volonté de gouverner.

Enfin, le sujet fondamental est celui de l’échec de tous les gouvernements, de toutes les majorités, depuis quarante ans dans la lutte contre le chômage, l’insécurité, la désintégration sociale, quelles que soient les recettes utilisées. L’impuissance publique : qui ose l’invoquer ? La souveraineté nationale est plus que jamais un mot tabou. Comment gouverner, comment décider, reconquérir des marges de manœuvre pour les parlements et gouvernements nationaux dans le contexte de la mondialisation ? Que reste-t-il de la démocratie, le pouvoir du peuple ? Ces sujets passionnaient Philippe Séguin. Ils ne concernent plus les Républicains, qui sont tous sur la même ligne de déni face à ces grandes questions fondamentales. Les candidats aux primaires sont dans une logique d’incantation. Il ne suffit pas de proclamer que la France est « d’origine chrétienne » ou que « nous sommes de droite !» pour manifester une volonté de gouverner. La pratique des coups de menton et petites phrases polémiques, comme masques de l’impuissance, présente ou à venir, est exactement la même que celle du pouvoir socialiste actuel.

Abandonner ces différentes questions autour de la Nation, de la souveraineté nationale, de la démocratie, de l’efficacité de la politique, de la transformation profonde de l’Europe, aux partis extrémistes de droite comme de gauche, est une manière d’en faire des tabous. La grande comédie des primaires, pour occulter le vide sidéral de la pensée politique, n’y changera rien. Gagner le pouvoir dans ces conditions est la certitude d’un échec et d’une déception en 2017-2022, une fois de plus, qui ouvrirait cette fois-ci, peut-être, la porte vers l’aventure extrémiste et l’abîme.

17 commentaires sur Primaire de la droite et du centre : où est passée la ligne Séguin?

  1. fremondiere // 17 mars 2016 à 12 h 16 min //

    Désolé ^pour être un Homme d’Etat , il faut être ,un RASSEMBLEUR..

  2. Tout le monde sait que P. Seguin n’était pas très sympathique en privé. En le disant, vous ouvrez une porte ouverte. Mais nier qu’il n’avait pas l’envergure d’un homme d’état, et gaulliste est une « erreur ».

  3. fremondiere // 16 mars 2016 à 18 h 32 min //

    VOUS me faite sourire , A SEGUIN… balancer LUI des ROSES il fut Notre Patron au RPR Rue de LILLE , savait t « il se faire comprendre , ou Aimer ,surement PAS..il était insociable ,Bourru , sale caractère et il voulait changer le NOM du RPR RATER Philippe on a JAMAIS vu autant de compagnons se poignarder DANS LE DOS ? Apres ND -AIGNANS ,il devrait en avoir MARRE de se présenter , pour recueillie quelque pourcentages ,il n » a toujours qu »il faut un rassemblement des DROITES ET DES NATIONAUX Vous ne voulez PAS revoir HOLLANDE de L.UNION de la GAUCHE ;ou la Première Présidente

  4. Pourquoi chercher midi à quatorze heures : à Debout la France, avec Nicolas Dupont-Aignan, bien évidemment !
    L’UPR est bien trop « sectaire » et Henri Guaino est un véritable « électron libre » difficile à suivre !

  5. Jean-Dominique GLADIEU // 23 février 2016 à 9 h 56 min //

    Cher Jean-Paul Delaisse,

    Vous écrivez : « Il n’y a pas de gaullisme de gauche ». Mais, vous précisez immédiatement :  » de droite non plus d’ailleurs ».
    Certes, le Général se définissait comme au-dessus des partis. Cependant, il n’a jamais (du moins publiquement) désavoué ceux qui, parmi ses compagnons, se proclamaient « gaullistes de gauche ». Alors qu’il réagissait dès qu’on insinuait qu’il fût de droite.
    Rappelons-nous certaines de ses citations :
    – « la politique ne se fait pas à la corbeille »
    ou encore :
    – « je n’aime pas les communistes car ils sont communistes, je n’aime pas les socialistes car ils ne sont pas socialistes, je n’aime pas mes amis car ils aiment l’argent ».

    Sur le reste, d’accord avec vous.

    Amitiés gaullistes.

  6. Patriote Gersois // 23 février 2016 à 3 h 00 min //

    La ligne Séguin ??? elle a quitté cette (pseudo) droite molle et gauchisante depuis déjà 2008 pour rejoindre de Nicolas Dupont-Aignan à Debout La France tout simplement . On peut plas vous répondre plus clairement . Cette droite LR (ex UMP) est une belle mascarade tout comme sa cousine gauche PS . Et même des déçus du FN viennent le rejoindre car ces dernier prônent un patriotisme qu’ils ne mettent pas eux même en pratique .Alors Nicolas Dupont-Aignan et DLF sont incontestablement la bonne ligne pour restaurer la France et la Grandeur de la France .

  7. Delaisse Jean-Paul,
    Avant d’être grande, la France doit exister… Mais comment existerait-elle en étant dirigée par des élites qui la soumettent et qui se soumettent à un pouvoir non-élu, non choisi et qui n’a pas à rendre de comptes ?

    Alors à défaut d’une France qui ne comporterait dans ses rangs que ceux qui sont pour sa grandeur,…idée dont je vous laisse l’entière responsabilité, étant plus mesuré dans mes espoirs et quelque peu rétif à toute mise en rang, ainsi qu’un brin nostalgique des vraies querelles gauloises…, il serait bon qu’à minima, nos gouvernements en soient dûment pourvus…, ne trouvez vous pas?

    J’en viens d’ailleurs à me demander si c’est bien d’un de Gaulle dont la France à besoin… Face à l’Empire, je me demande si un Vercingétorix…

  8. Delaisse Jean-Paul // 21 février 2016 à 18 h 40 min //

    Je précise bien sûr (mais vous aurez corrigé) : « La France telle qu’il (Le Général) la voyait, ne comporte dans ses rangs que ceux qui sont pour sa Grandeur (de la France). »

  9. Delaisse Jean-Paul // 21 février 2016 à 18 h 38 min //

    Soit dit en passant : Il n’y a pas de « gaullisme de gauche », de droite non plus d’ailleurs. Le Gaullisme englobe tout dans sa philosophie, et son axe directeur fait fi de ces notions. La France telle qu’il la voyait, ne comporte dans ses rangs que ceux qui sont pour sa Grandeur.
    Bien, cela étant dit, les « primaires » disent bien leur nom, s’adaptant comme qualificatif à tout ceux qui l’utilisent dans nos chers partis ! Elles dénotent simplement l’inexistence totale de Chef digne de ce nom, capable de diriger notre pays. Elles n’aboutissent qu’à une chose : mettre en lice le moins mauvais d’entre eux, lequel est bien souvent le pire d’entre eux. Comment voudrait-on dès lors avoir un choix digne pour l’avenir, dans l’axe des pensées du Général ? d’où le dégout de plus en plus marqué des français pour ces élections, lesquelles ressemble à celles des Etats Unis…le mimétisme du chef…vous connaissez ? la réintégration dans l’OTAN en est une des manifestations.

  10. BENOIST François // 20 février 2016 à 16 h 36 min //

    « L’Europe des États, telle que la voulaient de Gaulle et Séguin, s’impose aujourd’hui comme une nécessité vitale pour le continent. Or, bien au contraire, ce dernier s’enfonce dans la désintégration tout en s’abandonnant à la bureaucratie bruxelloise, la prolifération des règlements et des jurisprudences. »
    Ce constat sur l’état de l’Union européenne, bien des observateurs le font. Ils notent aussi que l’euro s’effondre, que l’Union se disloque. La réaction de la France, je veux dire de son président actuel, est d’appeler de ses voeux un nouveau projet pour l’Europe assorti d’une plus forte intégration, notamment monétaire ! Cette fuite en avant, inutile et dérisoire, ne saura rien résoudre.
    Tout à fait d’accord sur votre discours, je me demande comment vous voudriez que l’on procède pour instaurer maintenant cette Europe des Nations ou des Etats ? Comment voudriez-vous modifier les traités (TUE et TFUE) ; ce n’est possible qu’à l’unanimité des 28 états-membres !
    Je pense pour ma part que, si l’on admet comme probable la réalisation des prévisions notées plus haut (l’effondrement de l’euro et la dislocation de l’Union), l’attitude logique et salutaire serait de ne pas attendre qu’elles viennent à leur achèvement, mais de prendre les devants :
    1 – par la mise en oeuvre de l’Article 50 TUE, décider unilatéralement de nous retirer de l’Union, tant qu’il est encore temps ;
    2 – revenir à une monnaie nationale ;
    3 – en outre, de nous retirer de l’OTAN.
    Ces actions volontaristes de souveraineté (visant en tout cas à restaurer celle-ci) ne seraient-elles pas conformes à l’héritage politique de Philippe Séguin et du Général De Gaulle ?
    Certes, aucun parmi les candidats à la primaire de droite et du centre, ne sera assez courageux pour les mettre à son programme, puis, élu, pour les mettre en oeuvre ? Même des candidats indépendants comme M. Dupont-Aignan, qui font une analyse analogue, ne les envisage pas. M. Guaino n’a pas quant à lui encore décidé de son éventuelle candidature.
    Actuellement, seuls l’UPR et François Asselineau proposent ces actions courageuses et salutaires.
    Les développements futurs, assez proches, de la situation européenne et mondiale leur donneront raison, à n’en pas douter. Beaucoup viendront alors à professer les mêmes positions !
    Pourrais-je espérer que ces quelques développements viendront alimenter les réflexions des commentateurs sur ce site ?
    François Benoist

  11. HENRI Paskal // 19 février 2016 à 9 h 53 min //

    Effectivement Philippe Seguin était un vrai Gaulliste de Gauche ,et ce qu’est devenu la pensée gaullienne à droite est une imposture .si NDA à des propos intéressants , son entourage entretient sur les réseaux sociaux des raisonnements totalement inacceptables humainement ! Chevènement que je soutenais en 2002 maintenant trop âgé ! Jean Luc Mélanchon essaie de relever le défi gaulliste mais qui à droite ira vers lui ? Chevènemenr et Michel Onfray ont lancé un ballon d’essai sur une union souverainiste et on a vu le haro du système euro-Atlantiste contre ces deux personnes !quand à Montebourg qui peut penser qu’il soit près à nous rejoindre ! c’est clair que « LE MACHIN  » à encore de l’avenir !

  12. fremondiere // 19 février 2016 à 6 h 51 min //

    la primaire ,est une imbécilité; comme toujours ,la droite ,la plus bête ,se doit de SINGER LA GAUCHE

  13. « Leurs propositions touchent à la surface des choses …. aucune réflexion de fond sur l’État, l’Europe, la société française. Ils se reconnaissent dans le système politique et social qui prévaut aujourd’hui. Leur logique est identique : elle est celle de la réforme en surface, et non de la transformation profonde.
    La grande comédie des primaires, pour occulter le vide sidéral de la pensée politique, n’y changera rien ».
    Eh oui, nous pouvons adhérer à cette excellente analyse et à nous préparer de nouveau à déchanter de la politique de politicards.

  14. Jacques Payen // 18 février 2016 à 22 h 46 min //

    Cher monsieur Tandonnet, que par ailleurs j’apprécie beaucoup.

    Le passage du RPR de Séguin à l’UMP de « Tartempion » fut une « facilité ».

    On succombe toujours à ses facilités. On en meurt. L’UMP est morte et LR est moribond, avant d’éclater demain ou après demain.

    Si vous voulez dire qu’il FAUT un candidat gaulliste ( et pas un simple brave candidat de témoignage ayant pour horizon 5%) à la présidentielle qui vient, mais un candidat ayant la capacité et l’étoffe de bousculer les lignes, de modifier la donne : c’est évidemment oui ! oui ! Oui !
    Quand cesserons-nous d’accepter de peser moins que des Verts-fantoches à 3% !

    Ce candidat potentiel existe. Il a l’étoffe.Il a l’intégrité. Il vient de faire un discours-programme remarquable au Conseil National d’un parti LR en perdition, miné par ses contradictions et la guerre des égo.

    Que les gaullistes disséminés en chapelles stériles et impuissantes cessent leur auto-destruction. Qu’ils se hissent au niveau du péril qui menace notre Nation !

    Ce candidat potentiel, apte à bousculer le jeu, existe. Il s’appelle Henri Guaino.

  15. Delaisse Jean-Paul // 18 février 2016 à 22 h 31 min //

    Première réflexion : Merci Monsieur Tandonnet d’avoir exprimé si clairement la situation, et votre dernier paragraphe en est une conclusion indéniable.
    « La grande comédie des primaires, pour occulter le vide sidéral de la pensée politique, n’y changera rien ».
    Effectivement, le coup des primaires ne fait que révéler le vide complet des capacités à gouverner un Etat, donc, chez nous, le France. A mon sens, les primaires, issues d’un système américain, dont apparemment, ils ne peuvent se passer, font les délices des deux partis ayant démontrés qu’ils sont impuissants depuis 40 ans. C’est un petit concours interne, à qui va arracher le petit yoyo, comme dans les manèges d’antan. Ce n’est pas ça, un Homme d’Etat.

  16. Tous pareils ! La ligne Séguin est morte dès 1995 quand il s’est rallié à la candidature Chirac et à fortiori quand il fût Président de la Cour des Comptes où il a mis en musique l’orthodoxie néolibérale de l’UE jusqu’à sa mort.

  17. Chez Dupont Aignan!

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