Nicolas Dupont-Aignan : « Henri Guaino ne peut pas se trahir éternellement et rester malheureux chez les Républicains »

Atlantico : Vous exhortez ce lundi Henri Guaino à rejoindre Debout La France, lui qui a déploré l’absence de gaullisme chez Les Républicains. Pourquoi cet appel ?

Nicolas Dupont-Aignan : J’ai suivi sur Internet le discours qu’Henri Guaino a prononcé au Conseil national du parti Les Républicains. Il s’est livré à un réquisitoire que j’aurais pu signer. Il partage le même constat que moi, lorsque j’avais quitté l’UMP en 2007 à l’époque pour fonder Debout la République. D’ailleurs, un grand nombre d’adhérents et de cadres de l’ancienne UMP sont déjà chez nous parce qu’ils ont compris qu’il n’y avait plus rien à attendre chez Les Républicains. A partir du moment où Henri Guaino fait le même constat, il est naturel que je lui propose de passer à l’acte et de nous rejoindre.

Il serait un atout de plus pour notre mouvement. Il ne peut pas se trahir éternellement et être malheureux en y restant. Je voudrais lui dire : « ouvre les yeux, nous sommes là« .

Avec sa nouvelle stratégie de « France apaisée », un rapprochement avec le Front national ne serait-il pas préférable, ou du moins plus naturel ?

La politique, ce n’est pas des slogans. La politique, c’est un passé, un présent et un avenir. C’est une cohérence. Si Debout la France progresse tant aujourd’hui, c’est parce que les Français ressentent bien que notre projet, nos convictions, nos valeurs sont solides. Or, cette solidité ne se marchande pas. Nous avons créé Debout la France pour permettre justement aux Français d’éviter ce piège mortel entre d’un côté le système, et de l’autre les extrêmes ou le Front national. Si le tripartisme était tant désiré par les Français, les 50% de nos concitoyens qui se sont abstenus seraient allés voter. Et je ne parle même pas des 4 millions de Français qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales et du million qui votent blanc ou nuls.

Je ne changerai pas de ligne, d’autant plus que les dernières élections ont montré que les Français protestaient avec le Front national au premier tour, mais ne voulaient pas lui donner les clés du pouvoir au second. Cela prouve bien qu’il y a un vrai besoin d’une politique patriotique, raisonnable, sereine, crédible, généreuse et rassembleuse. Or, c’est cela le gaullisme. Nous répondons à un besoin des Français. Simplement, nous ne sommes pas encore assez connus. Il ne faut surtout pas changer d’axe et trahir ses convictions. Restons ce que nous sommes, et cela viendra naturellement. J’ajoute enfin qu’il y a des gens issus du RPR ou de l’UMP, qui avaient rejoint le Front national au moment de la dédiabolisation il y a deux ou trois ans, et qui reviennent maintenant chez nous !

Laurent Wauquiez a tenu un discours très offensif ce dimanche à la tribune du Conseil national de son parti, mettant notamment en garde contre l’immigration et le danger de délitement culturel et politique. Seriez-vous prêt à lui lancer le même appel qu’à Henri Guaino et à travailler avec lui ?

Laurent Wauquiez a des responsabilités de direction au sein du parti Les Républicains. Je n’essaye pas de le débaucher, ce n’est pas l’objet. Je me réjouis que Laurent Wauquiez rejoigne certaines de mes positions, comme par exemple sur la construction européenne, mais ce ne sont encore que des discours. La vraie question ici, car Nicolas Sarkozy a lui aussi évolué dans son propos, c’est de savoir si c’est un discours tactique ou si c’est un vrai changement stratégique. Son bilan ne joue pas en sa faveur, notamment avec l’adoption du Traité de Lisbonne.

La posture de Henri Guaino est-elle plus sincère que celle de Laurent Wauquiez ?

Je ne suis pas là pour donner tel ou tel brevet de sincérité à l’un ou à l’autre.

C’est vrai que leurs postures sont différentes de nature. Henri Guaino n’a pas de responsabilités chez Les Républicains, et il s’émeut depuis des années de la dérive de ce parti. Il a en outre refusé de voter pour Alain Lamassoure, et je le comprends, aux dernières élections européennes. Laurent Wauquiez, lui, est totalement engagé auprès de Nicolas Sarkozy.

En tant que grand parti républicain de droite, la formation Les Républicains peut être perçue comme l’héritière du camp du Général De Gaulle. Mais d’après vous, les idées gaullistes sont-elles encore portées et défendues par ce parti ?

Tout d’abord, je ne pense pas que le parti Les Républicains soit perçu comme l’héritier du gaullisme, à moins de mal connaître ce que fut la pensée du Général de Gaulle.

Deuxièmement, ce parti a totalement abandonné les principes gaullistes, et ce sur deux plans. Sur la question européenne, puisque c’est ce parti qui a ratifié le Traité de Lisbonne, une copie conforme de la Constitution européenne rejetée par le peuple français en 2005 – un problème majeur –, et enfin dans son fonctionnement et son idéal. Il n’y a aucun doute là-dessus. Personne n’est d’ailleurs forcé d’être gaulliste. L’élection de Monsieur Chatel à la présidence du Conseil national de LR est éloquente. Je comprends que Monsieur Guaino soit très malheureux.

Le gaullisme est-il devenu chez certains politiques une étiquette qu’on peut revendiquer pour le prestige, participant ainsi à son galvaudage ?

Il y a en effet beaucoup d’instrumentalisation et de superficialité. Personne n’est obligé de se revendiquer du gaullisme, tout comme personne ne peut s’en arroger le monopole. C’est une source d’inspiration. C’est ensuite aux Français de juger qui l’incarne le mieux.

Le gaullisme, c’est trois choses. La première, c’est l’indépendance du pays et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, au premier rang desquels la France. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. La France n’a plus la maîtrise de ses lois, de son budget, de ses frontières et de sa monnaie. La deuxième, c’est le rassemblement des Français au-delà des partis sur un projet de redressement national. La troisième, c’est un humanisme et une vision sociale. Cela me paraît très important, et nous en sommes bien loin quand je regarde les programmes des uns et des autres. Voilà pourquoi, avec le million de Français qui vote pour Debout la France, nous continuons notre chemin. Le gaullisme est profondément moderne.

9 commentaires sur Nicolas Dupont-Aignan : « Henri Guaino ne peut pas se trahir éternellement et rester malheureux chez les Républicains »

  1. BENOIST François // 20 février 2016 à 13 h 24 min //

    De ces deux « gaullistes sociaux », Henri Guaino et Nicolas Dupont-Aignan, il est intéressant de comparer les déclarations qu’ils ont faites sue les plateaux de télévision respectivement les 17 et 19 février, notamment leurs constats sur l’état actuel de la France (qui sont assez voisins), ainsi que les solutions qu’ils préconisent.
    Leurs positions vis-à-vis de l’Union européenne divergent sensiblement, En gros, l’un voudrait changer d’Europe (Nicolas Dupont-Aignan), l’autre, changer l’Europe (Henri Guaino)…
    En tout cas, ni l’un ni l’autre ne préconise un retrait de la France de l’Union européenne.
    Pensent-ils réellement qu’il serait possible de négocier avec l’Union, pour changer le sort de la France au sein de celle-ci, ou de modifier les traités, ou encore de bâtir une autre Europe sur des fondements plus satisfaisants pour chacun des peuples qui la composent ?
    On voit bien, au passage, quelles difficultés rencontre le Royaume-Uni dans ses négociations avec les 27 autres partenaires au sein du le Conseil européen.
    D’ailleurs, on voit aussi que, face à l’éventualité du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, les sentiments d’Henri Guaino et de Nicolas Dupont-Aignan divergent, l’un estimant que le retrait de la Grande-Bretagne ne serait pas une bonne nouvelle (Henri Guaino), l’autre, que ce serait une bonne chose et prédit que cela se fera…
    Sur un autre point -l’élection présidentielle-, si l’un est déjà candidat, l’autre, tout en n’étant pas d’accord avec le système des primaires, déplorant qu’aucun des candidats à l’investiture de la droite et du centre ne soit véritablement gaulliste, se demande s’il va, ou non, s’y présenter. A moins qu’il n’envisage, se mettant en congé de « Les Républicains », de se présenter en candidat indépendant ?

  2. Alain Kerhervé,
    Vue la complexité pour définir le gaullisme et ce que devrait être un gaulliste, je me demande si la manière d’être de de Gaulle lui-même était gaulliste, ou bien tout simplement, d’être un Francais, le plus exemplaire d’entre tous, dans la pleine mesure de l’immense connaissance historique qu’il avait de la France et de ses intérêts.
    Le gaullisme est la preuve historique que la France dépend de notre exigence patriotique, bien plus que des étiquettes que se collent abusivement les uns et les autres…

  3. radoxalement la FRance qui a longtemps cultivé sa force Démocratique // 17 février 2016 à 15 h 03 min //

    Revenons sur une affirmation de Mr Guaino :
    « Et d’observer qu’à la tête du parti, l’ancien chef de l’État « joue son rôle qui consiste à essayer sans arrêt de rassembler les uns et les autres, donc il rassemble ceux qui crient le plus fort » ».
    Cruelle affirmation qui sanctionne une fois encore la confusion entre buts poursuivis et moyens. Redresser la France dans tous ses compartiments économiques et sociaux comme Libérer la France du joug hitlérien voilà des buts mobilisateurs. Rassembler les individus pour y parvenir voilà qui est une exigence de moyens.
    Or si l’actuel chef ,selon Mr Guaino, rassemble celles et ceux qui crient le plus fort, c’est que cette exigence précède les Buts poursuivis qui n’ont que faire du pédigrée d’un tel ou d’une telle car comme justement mis en valeur sur ce site :La France ne peut être la France sans la grandeur et le Gl de Gaulle s’est mis au service d’un but, d’une cause qui dépasse de loin tous les » égo » politicards » . S’oublier soi-même pour que seul le but à atteindre mobilise les individus de bonne volonté voilà qui depuis le « grand Charles » est loin d’être remis à l’ordre du jour du comportement politique dans son ensemble. Ainsi donc par médias interposés on assiste à une frénésie de l’apparence de Méluche à Marine sans oublier les tenants du pouvoir. Et c’est ainsi que les électeurs, électrices, dégoutés de ce qu’ils constatent, entendent des hommes politiques dont le seul but évident est de se mettre en valeur d’apparence médiatique, las d’attendre des réponses concrètes aux problèmes qui se posent, finissent par remplir les rangs des abstentionnistes.

  4. Aucun problème de ce coté-là, monsieur Kerhervé,…, elle n’est pas non-plus ma tasse de thé et le FN, encore moins.
    Je trouve que le seul et unique homme politique qui fait le bon constat et qui en tire les bonne conclusions est Francois Asselineau.
    Malheureusement, l’upr est loin d’être en position de l’emporter en 2017 !
    Asselineau ne se prétend pas gaulliste et pourtant, il est certainement le seul qui défende le vrai bilan et le réel état d’esprit de de Gaulle vis-à-vis de la France, en se situant au-delà des partis classiques,comme de Gaulle juja bon de le faire lorsque tout semblait perdu.
    Le CNR et ses acquis sociaux et politiques sont le fruit de ce rassemblement « hors clivages » dont il a été le concepteur et l’artisan.
    Mais son maitre-mot etait l’indépendance nationale et ceux qui ne dénoncent pas clairement notre appartenance à l’Union Européenne et à l’OTAN ne peuvent se prétendre inspirés par le gaullisme.

    Pour autant, le FN, puisque vous y faites allusion, n’est absolument pas clair sur cette question et ne propose pas dans son programme la sortie légale et sereine de l’UE par l’article 50 du Traité de Lisbonne.
    Asselineau est le seul à le faire et à expliquer patiemment pourquoi il faut utiliser cette méthode pour reconquérir nos prérogatives d’Etat-nation, à l’exclusion de toute autre méthode.
    Je ne comprends pas pourquoi les candidats que je cite plus haut et pour qui j’aurais plutôt de la sympathie, sont aussi timorés sur ce sujet…

    L’alternative est pourtant claire concernant l’UE :
    – on y reste sans aucun espoir de changer la moindre virgule à ses traités et réglementations ( art 48 : un seul état-membre peut empêcher toute réforme…, c’est la loi de l’unanimité…)…
    – on en sort légalement pour retrouver notre démocratie nationale, sans qu’aucun des autres états-membres ne puisse s’y opposer,… et ceci n’est possible qu’en utilisant l’article 50 que tous ont ratifié avec le traité de Lisbonne.
    La France a tout à gagner en agissant légalement.
    Je me permets de conseiller le visionnage de cette dernière conférence mise en ligne sur le site de l’upr et qui fait la lumière sur les véritables origines de l’Union Européenne au travers d’une puissance d’analyse et d’une culture historique dont bien des prétendus gaullistes semblent dépourvus.

    http://www.upr.fr/conferences/les-origines-cachees-de-la-construction-europeenne-2

    Je tiens à préciser que je ne fais pas la retape pour l’upr. Mon seul souci est de faire émerger la vérité pleine et entière concernant les conséquences de notre appartenance à l’UE et celles que chaque Francais devrait en tirer.
    Je conviens que F. Asselineau possède une personnalité puissante et des apparences qui peuvent ne pas plaire à tous… Mais il ne nous propose pas de l’épouser mais de sauver la France.

  5. Alors que reste-t-il ? Marine ? Pour ma part, et de celle de tous les gaullistes de conviction, c’est NON.

  6. Alain Kerhervé,
    Oui, mis à part l’exigence et le programme…
    Il n’est d’ailleurs pas tout seul dans ce cas…
    Mais que vaudra le programme de l’un ou de autre en 2017, puisque ce que l’on ose encore appeler la France ne possède plus aucun des attributs indispensables d’une nation ?
    -La totalité de notre économie est dirigée par des directives émanant de la Commission bruxelloise où personne n’est élu…
    -Nous n’avons plus aucune action possible sur la monnaie. La BCE est encore plus indépendante que la Commission !
    -Notre défense et par conséquent notre diplomatie sont priées de se mettre au service des États Unis par notre double appartenance à l’OTAN….,directe et indirecte:
    – notre adhésion sous le gouvernement Fillon…
    – la ratification du Traité de Lisbonne et l’article 42 du TUE, toujours sous le gouvernement Fillon…

    Le système électoral est devenu un leurre pour perpétuer l’illusion de démocratie.
    Les élus n’ont plus aucun pouvoir,… sauf celui de faire de belles carrières…
    Le programme, le vrai, ils ne font que l’appliquer en s’appliquant…
    Les programmes qu’ils nous servent pour se faire élire font d’eux des menteurs,…et ils le savent pertinemment… Mélenchon comme Fillon, comme Dupont Aignan, comme Chevenement et quelques autres, qui se prétendent gaullistes avant les élections, mais qui obéissent à leur maitre dès qu’ils sont en place…
    C’est salir le gaullisme que de l’accoler à une telle soumission.

  7. A Henri : Je suis d’accord avec vous. La candidature de JL. Mélanchon est de style gaullien.

  8. HENRI Paskal // 16 février 2016 à 15 h 14 min //

    je vais me faire incendier et pourtant ! on disait à l’époque que le Général était au dessus des partis !
    Est-ce que la candidature face au peuple et sans parti de Jean Luc Mélanchon n’a pas un côté quelque peu Gaullien ?

  9. Nul ne nie la forte personnalité et la capacité d’Henri Guaino à devenir un homme d’État.

    Il est en effet plus que souhaitable qu’il s’affranchisse.

    Qu’il prenne son envol, loin de ce bocal à scorpions qu’est devenu le parti LR.

    Guaino a la pointure pour être candidat à la présidentielle en visant un score à deux chiffres, car il est apte à fédérer toute la nébuleuse gaulliste, hélas éparpillée.

    Avec la maitrise intellectuelle qu’on lui connait et sa connaissance de tous les dossiers vitaux, il peut créer cette opportunité, cet « évènement » que nos compatriotes attendent.

    N’oublions pas que les campagnes présidentielles ont toujours réservé
    un évènement que personne, à commencer par les médias, n’avait anticipé !

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