Désir aux Affaires européennes ou la décrépitude du PS

Harlem Désir, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, on croirait une blague ! Eh bien, non. On connaissait la méritocratie. Hollande et Valls viennent de nous faire entrer dans l’ère de la « déméritocratie »…

MEUNIER AURELIEN/SIPA

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«Dans un pays qui vit la peur du déclassement, le PS, c’est le dernier endroit qui compte des surclassés » ! Voilà comment un cadre socialiste accueillait ce matin le départ annoncé d’Harlem Désir de Solférino pour le secrétariat d’Etat aux Affaires européennes. Le message envoyé en interne, mais également aux Français dans leur ensemble, est en effet terrible : au pays merveilleux des socialistes, l’échec se voit donc récompensé, l’erreur se voit transformé en promotion. On connaissait la méritocratie. Hollande et Valls, eux, viennent de nous faire entrer dans l’ère de la « déméritocratie », de nous expliquer par cette « nomination-exfiltration » que, non, le principe de Peter (qui veut que chacun finisse par s’élever à son niveau d’incompétence) n’est pas une fumisterie.

Bien sûr, Désir n’est pas le seul responsable de la claque électorale que vient de se prendre le PS en plein visage. Mais tout de même, si la majorité n’est pas et n’a jamais été en ordre de marche depuis l’accession au pouvoir des socialistes il y a près de deux ans, si le siège du parti est devenu aussi vivant et vibrant qu’un parking souterrain à 3 heures du matin, c’est à lui, en partie, qu’en incombe la responsabilité. Mais le voilà donc promu. Et pas n’importe où en plus : aux Affaires européennes. Là encore, le message envoyé est terrible : l’Europe, ça n’est pas un dossier important, alors autant le confier à Harlem Désir. Comme si l’échec au scrutin de mai prochain était déjà acté au sommet de l’Etat…

Ça n’est pas comme si l’entourage de Désir n’avait pas tenté de le dissuader d’accepter ce maroquin. Hier soir encore, certains de ses proches lui conseillaient de poursuivre sa mission à la tête du parti (ou plutôt de ce qu’il en reste)… Et ça n’est pas non plus comme si d’autres personnalités, à l’image du député Mathias Fekl, n’avaient pas été pressenties pour occuper le poste… Ce matin encore, les soutiens de ce dernier semblaient espérer que le bon sens aller reprendre le dessus. Las, le bons sens, en cette période, comme le mérite, a disparu des rangs socialistes.

Mais la terrible symbolique de la promotion de Désir au gouvernement ne s’arrête pas là. Pour le remplacer à la tête de la liste PS en Île-de-France, il s’agirait donc, se murmure-t-il, de rapatrier Vincent Peillon jusque-là candidat dans le Sud-Est. Vincent Peillon qui justifiait sa volonté de se présenter aux européennes, alors qu’il était encore en poste à l’Education, en expliquant grandiloquent que « les grands ministres doivent prendre leurs responsabilités ». Comprendre : lui ne se défilera, il ira à la baston avec Le Pen père candidat dans le Sud-Est… Eh bien Peillon pourrait donc manquer à ses « responsabilités » de « grand ministre » qu’il n’est plus et se défiler. Et dans le Sud-Est alors ? Les électeurs pourraient avoir droit à une belle tambouille : c’est le centriste Jean-Luc Bennahmias, en remerciement de son soutien à Patrick Mennucci à Marseille, qui hériterait de la tête de liste…

Mais il y a une autre conséquence à l’entrée d’Harlem Désir au gouvernement : l’arrivée de Jean-Christophe Cambadélis, son ancien adversaire, à la tête de « Solfé ». Dès hier, l’argumentaire était calé. Il pourrait se résumer de la sorte : « C’est “Camba” qui mène la campagne des européennes, il est donc tout naturel qu’il assure l’intérim à la tête du parti et, plus tard seulement, on consultera les militants. » Certes, Cambadélis a sans doute plus de sens politique que Désir et saura mettre un peu d’ordre dans la boutique, mais que retiendront les encartés du PS d’un tel tour de passe-passe ? Quand Hollande remanie, il chamboule tout et s’assoit sur leur vote…

Gérald Andrieu – Marianne

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