Copé-Fillon, une guerre inévitable

(WITT/SIPA)Entre le chef de l’UMP, tenant d’une « droite décomplexée », et l’ancien Premier ministre, héraut de la droite démocrate-sociale, le conflit est ouvert. Si François Fillon a déjà déclaré sa candidature à la présidence de l’UMP au début de l’été, Jean-François Copé, lui, devrait sortir du bois dimanche 26 août lors d’un meeting à Châteaurenard. Mais les deux hommes n’ont pas attendu l’été 2012 pour se livrer une bataille éclatante dès les premiers jours du quinquennat Sarkozy. (Photo WITT/SIPA : Jean-François Copé & François Fillon)

« Envoyez la musique ! » Dans la tente qui abrite la régie de ce dernier meeting sarkozyste avant le premier tour de la présidentielle, place de la Concorde, l’équipe de Jean-François Copé trépigne, s’agace. François Fillon vient d’achever son discours et les applaudissements en rafale enveloppent l’obélisque de Louxor. Hors de question de laisser l’encore Premier ministre – qui, en prime, a l’outrecuidance de s’exprimer juste avant le président candidat – l’emporter à l’applaudimètre militant, il faut agir, et vite. « Envoyez la musique, merde ! » répète, impatient, un collaborateur du patron de l’UMP. Exécution. Nicolas Sarkozy n’a pas encore fait son apparition sur les écrans que déjà les premiers accords retentissent. Forts, presque assourdissants. Largement suffisants pour couvrir radicalement l’ovation réservée par la foule à Fillon.

Anodin ? Symptomatique. L’incident du meeting de la Concorde symbolise à lui seul la bataille, hier larvée, aujourd’hui ouverte, que se livrent Copé et Fillon. En quête du même butin – la présidence de l’UMP en novembre 2012 puis l’Elysée en 2017 -, les deux rivaux affûtent leurs couteaux, pointu pour l’offensif maire de Meaux, à bout rond pour l’introverti notable de la Sarthe. Durant la campagne, les coups ont été retenus avec difficulté. En coulisses, quand Copé, à force de menaces, obtient de prendre la parole après le chef du gouvernement, et juste avant le président candidat, lors d’un meeting de l’entre-deux-tours à Cernay. En public aussi, quand Fillon profite d’une réunion au Mans pour se proclamer «l’avocat de l’unité de la droite et du centre » et ainsi revêtir le costume de rassembleur dans lequel le clivant Copé, trop libéral pour les uns, trop droitier pour les autres, ne parvient pas à se glisser. Quelques jours plus tard, l’ex-maire de Sablé, bien décidé à jouer les fédérateurs, poursuit son assaut en affirmant qu’« il faut éviter toute remarque désagréable sur les syndicats », tandis que Sarkozy, appuyé par Copé, tire à feu nourri sur ces « corps intermédiaires » partisans. Les soutiens du patron de l’UMP montent au créneau, accusant le locataire de Matignon de jouer la défaite. Du haut de son piédestal qui chancelle, Sarkozy tente de calmer le jeu. Trop tard.

«Mister Nobody»

La saillie de Fillon marque le tournant pris par un parti jusqu’à hier majoritaire, aujourd’hui privé de leadership. Le glas de la défaite n’a pas encore sonné mais déjà l’unité, la belle, la noble, la trompeuse unité de l’UMP vacille derrière le paravent de circonstance. Deux camps, deux courants se font face au grand jour. Les techno-chiraquiens, emmenés par Copé, et les gaullistes sociaux, dans le sillage de Fillon. Point commun ? Leur envie d’en découdre.

Car entre Jean-François Copé, le chiraquien arrogant et intrépide, et François Fillon, le balladurien taiseux et prudent, l’entente, jamais, ne fut cordiale. Ni même courtoise. L’animosité éclate en 2007. Fillon à Matignon, Copé à la présidence du groupe UMP à l’Assemblée. Leurs ambitions s’entrechoquent. Le premier, traité de « collaborateur » par l’hyperprésident, doit bientôt supporter la prétention du patron des députés, ardent défenseur d’un « hyper-Parlement ». Hyperagaçant. Pauvre Fillon, qui a toujours veillé à gravir les échelons un à un. Le voilà pris en tenaille entre deux hussards à l’ambition vorace. Blessé dans son amour-propre, le Sarthois réservé disparaît au fil de ces premiers mois de quinquennat derrière ses épais sourcils, plus noirs, plus froncés que jamais. La presse, cruelle, le surnomme « Mister Nobody », tandis que, dans la majorité, on concède bien volontiers la domination de « JFC ».

Qu’à cela ne tienne, à défaut d’avoir la tête de Sarko, Fillon aura celle de l’impudent de Meaux, que plusieurs déjà qualifient de « clone » du président. Le remaniement de 2010 lui offre, croit-il, une occasion inespérée. « Copé serait parfait à l’Intérieur », souffle le Premier ministre au monarque avec l’espoir naïf d’ôter des mains de son rival la puissante arme que représente la présidence du groupe UMP. Chimérique. Comment croire qu’un personnage comme Copé, qui ambitionne depuis les bancs du lycée Victor-Duruy de « devenir président de la République », se laisserait ainsi déposséder ? Un ministère ? Le député-maire de Meaux n’en a que faire. Puisqu’on le surnomme « le clone de Sarko », pourquoi ne pas pousser la ressemblance jusqu’au bout ? Au président, l’ambitieux quadra fait part de son projet, récupérer les clés de l’UMP : « A moi un parti en ordre de marche, à toi l’Elysée en 2012. » Le chef de l’Etat hésite, puis cède. Comme Chirac en son temps.

Et voici que la guerre Fillon-Copé reprend de plus belle. A la tête de l’UMP, le député de Seine-et-Marne veut créer le débat, exister, se démarquer, non pas de l’ancien président mais du chef du gouvernement. Hausse de la TVA, relance du débat sur l’identité nationale, détricotage radical des 35 heures, tous les prétextes sont bons pour donner de la voix. Et irriter Fillon, « l’homme qui n’a pas de convictions ». Quand, poussé à bout, le Premier ministre sort de ses gonds pour appeler à moins de « brutalité », la réplique de son adversaire résonne, cinglante : « Fillon a vendu quinze ans de gaullisme social pour un plat de lentilles. » Sacrément indigeste.

Duel sanglant

Au lendemain des cantonales de mars 2011, l’escarmouche se transforme en duel sanglant et annonciateur de la suite. Brutale, sévère, la défaite de la droite donne lieu, pendant l’entre-deux-tours, à une polémique sur la consigne de vote en cas de duel PS-FN. Fillon, comme Nathalie Kosciusko-Morizet, affiche sa volonté de voter socialiste. Copé éructe en direct sur le plateau de Canal + contre le Premier ministre, coupable, selon lui, de se réfugier dans des « postures humanistes ». Voilà la ligne de fracture entre les deux hommes mise en exergue. En 2011, comme en 2012 – et sans doute en 2017, prédisent déjà des observateurs avisés -, les tensions au sein de la droite se nouent autour de la question du FN. Marine Le Pen à 17,9 % au premier tour de la présidentielle, « c’est pour Copé la preuve qu’elle est, qu’elle doit être un interlocuteur », murmure un ministre sarkozyste. « Je suis contre ! » s’époumone de son côté Fillon.

Les grandes manœuvres

Alors, pour se départager, pour trancher ce conflit idéologique fondamental, l’un et l’autre le savent, la guerre ouverte est cette fois pour demain. « C’est la droite démocrate-sociale contre la droite dure et ultralibérale », résume un parlementaire UMP. Mais c’est aussi, et surtout, un fin manœuvrier, Copé, contre un cavalier timoré, Fillon, mais qui n’est pas manchot non plus comme il l’a démontré en dézinguant tous ses rivaux pour Matignon, ou encore en dégainant en premier sa candidature à la présidence de l’UMP. Pour attirer à lui et agréger les différentes sensibilités, JFC a annoncé dès la fin de la campagne sa volonté de faire exister des courants au sein de l’UMP – pour le plus grand plaisir de Jean-Pierre Raffarin, chef de file autoproclamé des Humanistes – et s’est également prononcé en faveur d’une primaire pour désigner le candidat en 2017. « Habile », ont reconnu en chœur ses détracteurs. Pendant que le diviseur se mue en rassembleur, François Fillon, lui, est prié par la droite modérée de barrer la route au présomptueux dans sa course à la tête du parti. Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez, NKM, tous avaient promis de se ranger comme un seul homme derrière le sage Fillon. Mais aussitôt la défaite de Sarkozy proclamée, les premiers doutes sur les velléités du Premier ministre ont affleuré çà et là. « Il n’a pas de couilles ! » résume l’un de ses – étranges – soutiens. Réélue député, NKM lui a donc tourné le dos préférant tenté l’aventure en solitaire. Echaudé par l’absence de soutien de Fillon lors de l’élection du président de groupe UMP à l’Assemblée, Xavier Bertrand a, de son côté, remis à plus tard sa décision. Il devrait se prononcer dans les prochains jours mais ses équipes ont passé l’été à récolter les précieux parrainages nécessaires à une candidature. Pour l’heure, l’ex-locataire de Matignon doit donc se contenter du soutien de Laurent Wauquiez, Valérie Pécresse, Eric Ciotti, et depuis ce lundi Jean Leonetti. « Mais il lui manque le réseau… », s’inquiète un membre de son staff.

Car si les sondages donnent encore Fillon vainqueur loin devant Jean-François Copé, ce dernier, qui a profité de son passage au secrétariat général de l’UMP pour se tisser un solide maillage territorial, grignote point par point l’écart qui le sépare de son concurrent. En juillet, le député-maire de Meaux a ainsi pu compter sur les soutiens successifs et savamment mis en scène de plusieurs fédérations UMPistes, comme celle du Nord ou des Bouches-du-Rhône. Dimanche 26 août, il devrait faire de sa rentrée politique à Châteaurenard une démonstration de force et tenter de prouver que l’appareil militant lui est acquis. Une fois candidat proclamé, Copé pourra affronter ouvertement Fillon jusqu’à la date butoir du 18 novembre, jour du Congrès UMP. L’apogée d’une lutte de cinq années.

3 commentaires sur Copé-Fillon, une guerre inévitable

  1. Et les grandes messes du bla bla bla pour ne rien dire vont recommencer….Franchement on se demande où va la France des handicapés mentaux ,des écervelés à l’électroencéphalogramme plat des gens nourris au beure des Charentes ,à la rillette Sarthoise, au brie de Maux et accéssoirement au bon « bojolpif » des tontons flingueurs ?
    Pauvre France qui s’enfonce un peu plus chaque jour en payant grassement tous ces profiteurs de la Républqiue !!!!!!!

  2. combien manquait il de voix a Nicolas Sarkosy à la présidentielle pour battre hollande? 700 000 . Combien de voix a fait Nicolas Dupont Aignan ? 700 000 . faites les comptes

  3. et si Nicolas Dupont-Aignan serait le recours de la nouvelle droite!!

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