Euro : nous sommes assis sur un volcan

Nicolas Dupont-AignanAprès une période de fausse accalmie, qui avait tout du calme avant la tempête, la crise de l’euro se précipite pour entrer dans un fatal paroxysme.

Le terme de l’impasse dans laquelle la monnaie unique s’est elle-même fourvoyée est connu et bien connu depuis deux ans au moins, si ce n’est depuis l’acte de naissance de l’euro avec la ratification du traité de Maastricht, il y a tout juste 20 ans. Alors que nous fêtons à quelques jours près le 20ème anniversaire du prophétique « Discours pour la France » prononcé le 5 mai 1992 par Philippe Séguin à l’Assemblée nationale – et que j’invite chacun, une fois encore, à lire et relire -, la situation ne manque pas de sel…

Emblème d’une union monétaire inachevée, l’euro est en éternel sursis, la divergence des économies nationales à partir de 2000 et l’irruption des crises financières depuis 2008 le forçant à un bond fédéral impossible ou à la disparition, concertée ou non.

Rappelons les termes concrets de cette impasse : l’Allemagne n’accepte de mettre en commun sa monnaie forte et les taux d’intérêt d’emprunts très bas qui lui sont attachés qu’en échange de l’observance par les autres membres de l’euro de sa culture économique et financière rigoureuse. En quelque sorte, il est demandé aux autres peuples de devenir allemands sur ce terrain, ce qui est économiquement et culturellement impossible, les nations étant irréductibles les unes aux autres. C’est bien le sens du drame grec et des autres drames qui attendent à sa suite (portugais, espagnol, italien, français,…) : les Européens ne sont pas des Allemands, ils ne peuvent ni ne veulent le devenir.

Ils ne le peuvent pas, car leurs atouts économiques disparates, leurs spécialisations industrielles, leur organisation du travail, etc. ne le permettent pas. Ainsi, chacun constate aujourd’hui que l’austérité punitive infligé à la Grèce ne permettra pas de la remettre sur les rails d’un développement vertueux, mais aboutit au contraire à une sorte d’euthanasie économique et sociale conduisant à des troubles politiques très graves.

Les Européens ne sont pas des Allemands, mais les Allemands ne veulent pas davantage cesser d’être eux-mêmes, en devenant les bailleurs de fonds de peuples structurellement moins compétitifs, qu’une mise sous perfusion financière n’inciterait nullement à s’aligner sur les canons germaniques de la rigueur budgétaire. Comment les en blâmer ? D’autant que personne ne doit oublier que l’économie est devenue l’unique domaine où l’identité nationale allemande s’est réfugiée, après avoir renoncé à toute hégémonie politique et militaire dont l’Europe n’a eu que trop à connaître les effets ces 150 dernières années.

L’impasse de l’euro, virtuelle dès sa naissance et clairement concrétisée depuis 2 ans atteint donc son apogée aujourd’hui. Comme je l’avais prévu dans mon discours de mai 2010 à l’Assemblée Nationale, la Grèce va sortir de l’euro pour pouvoir regagner en compétitivité, quitte à payer un très lourd tribut dans les premiers temps de sa liberté retrouvée. C’est le seul moyen, aujourd’hui comme hier, de pouvoir relancer sa croissance et redonner une dignité au peuple grec.

Bien évidemment cette sortie de la Grèce annonce le début de la fin de l’euro car l’effet domino redouté depuis deux ans sera irrésistible : attaque des marchés, envolée des taux d’intérêt, crise bancaire dans les pays devant sortir de l’euro avec des mouvements de « bank run » (les épargnants se ruant dans leur banque pour placer leurs économies dans des établissements allemands), éclatement chaotique de la monnaie unique.

Le choix des européens est simple. Soit ils continuent à nier la crise et appliquent la politique du pire à l’Espagne, l’Italie, la France, même maquillée d’une politique de relance qui ne pourra avoir que des effets cosmétiques, provoquant un tsunami politique et social sur le continent, soit ils préparent le démontage de l’euro en passant sereinement de la monnaie unique à la monnaie commune.

Tant que la monnaie unique n’aura pas été aspirée par la tourmente de l’implosion annoncée, il sera encore temps. Mais François Hollande, candidat d’un PS tout aussi compromis que l’UMP dans la « construction » de cette Europe complètement folle, aura-t-il le courage de tirer la sonnette d’alarme ?

Rien n’est moins sûr ! Alors que les dirigeants français et européens paraissent danser sur un volcan, les élections législatives de juin prochain revêtiront une dimension historique inédite : sombrer ou changer, telle est l’alternative.

Nicolas Dupont-Aignan (DLR)

6 commentaires sur Euro : nous sommes assis sur un volcan

  1. Il faut rappeler que NDA a été victime d’une campagne de dénigrement de la part des media français. Avant la campagne et alors que son livre faisait parti des essais politiques les mieux vendus il n’était quasiment jamais invité. Le crime de NDA: ne pas idolâtrer la technocratie bruxelloise et son projet d’unification des peuples par la monnaie.
    Les français ont voté pour le président choisis par les journalistes, le champagne doit couler à flot dans les rédaction.

  2. Bellenger Pierre // 14 mai 2012 à 19 h 34 min //

    Le pauvre Euro n’y est pour rien. C’est bien la nouvelle doctrine économique monétariste qui est à l’origine de cette crise sans fin. Cette doctrine qui a donné les pleins pouvoirs aux financiers au delà même de l’imaginaire le plus fou, est arrivée par un référendum en 1992. Nous l’avons dénoncée par le référendum de 2005, mais nos hommes politiques nous ont trahis en la ratifiant par decision parlementaire. A nous de nous battre pour que le parti socialiste renoue avec la Primauté du politique sur l’économie et la Finance. Ce qui impose de dénoncer le traité de Maastricht. Les évadés du parti socialiste, le Parti de Gauche, s’engagent maintenant dans cette voie. Faisons chorus avec euxi pour que le PS revienne au socialisme ; ce dernier est incompatible avec le monétarisme, alias la Pensée-Unique. Le progrès humain n’est possible que dans le dépassement de la loi de la sélection naturelle, dont la Pensée-Unique est l’expression la plus brutale.

  3. Avant que le funeste Traité de Maastricht ne l’inscrive dans l’agenda européen ( Référendum acquis en France, prostate mitterandienne aidant, à seulement 300.000 voix…c’est bien peu pour un changement de régime !) la monnaie unique n’avait pas que des partisans dans le camp même des européistes du RPR et du PS.
    Il me semble me souvenir qu’Édouard Balladur penchait pour la solution d’une monnaie…commune, permettant aux économies nationales une respiration qu’elles n’ont plus…ce qui, de fait, est à l’origine du chaos dans lequel l’Union est entré !
    Très exactement la solution énoncée avec sagesse et responsabilité par monsieur Dupont-Aignan, pour sauver ce qui peut l’être encore des solidarités en Europe.
    Quant à ceux qui prônent, (autre solution, radicale) l’instauration d’un vrai gouvernement fédéral européen, adossé à une légitimité populaire, ce qui signifie un colossal transfert de richesses entre zones très prospères et zones moins favorisées, je pose, sans polémique, une seule et simple question que je pose aux européistes depuis 30 ans et qu’ils esquivent toujours : les Bavarois et les Luxembourgeois sont-ils d’accord pour payer les retraites des Napolitains, des Sardes, des Maltais et des Portugais ?
    Le point nodal est là !

  4. dentsdelion // 14 mai 2012 à 13 h 44 min //

    analyse intéressante mais sûrement incomplète.
    Donc , si j’ai bien compris, retour au Franc , au DeuscheMark, à la lire, au peso… et l’Euro comme monnaie unique, soit 2 monnaies coexistant

  5. Depuis des années vous dites des véritées. Il faudrait que les politiques de tous bords vous écoutent.
    Il faut que la Grèce quitte cet euro pour pouvoir redresser le pays; Qu’on laisse le peuple grec choisir son destin ; Mais non , les Technocrates européens ne veulent pas que les peuples retrouvent leur liberté;
    L’europe actuelle est le goulag!!!

  6. Eu égard à la piètre prestation de Monsieur Dupont-Aignan aux dernières présidentielles, le sérieux imposerait de ne pas considérer sa diarrhée mentale à propos de l’Euro !
    Mais il est peut-être sincère et il valide peut-être le vieux dicton : aux innocents les mains pleines !!!!

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