Schengen : le double discours de Sarkozy

2462769140_fd942374e5_bLe candidat UMP veut réviser le traité de Schengen. Mais il n’a pas précisé, dans son discours de Villepinte, qu’une révision de ce traité est pourtant en cours depuis près d’un an et que Claude Guéant a séché la dernière réunion européenne à ce sujet. Mieux, la France ne s’oppose plus à l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’espace Schengen.

 

A l’Elysée, on aime le recyclage. Pour récupérer les voix du FN, Nicolas Sarkozy agite ses bons vieux hochets de 2007 : immigration, insécurité… Lors de son discours de Villepinte, il a ainsi réclamé une révision du Traité de Schengen créant un espace de libre circulation au sein de l’Europe.

Il a avancé deux exigences principales. D’abord, un « gouvernement politique » de Schengen mettant en avant les Etats membres plutôt que la Commission : « On ne doit pas laisser la gestion des flux migratoires entre les seules mains des technocrates et des tribunaux ». D’autre part, il veut « sanctionner, suspendre ou exclure de Schengen un État défaillant » en cas de crise migratoire. Et le chef de l’Etat sortant a menacé : « Si je devais constater que dans les douze mois qui viennent, il n’y avait aucun progrès sérieux dans cette direction, alors la France suspendrait sa participation aux accords de Schengen jusqu’à ce que les négociations aient abouti ».

Belle menace. Sauf que Nicolas Sarkozy a oublié qu’une révision de Schengen est déjà en cours. C’est même lui qui l’a impulsée au printemps dernier avec Silvio Berlusconi après la crise migratoire de Lampedusa. Il a réitéré ce souhait en décembre dernier. Cette révision de Schengen permettrait aux Etats qui le souhaitent de rétablir temporairement les contrôles aux frontières. Une solution qui donne donc plus de marge aux Etats membres. « Les ministres traiteront désormais les problèmes au plan politique », expliquait un diplomate cité par le Monde du 10 mars.

RADOTAGE

Manque de pot pour le candidat-président, certains ministres n’ont pas l’air de s’intéresser à ce processus de révision. Le 8 mars, 3 jours avant le discours de Villepinte, Claude Guéant a séché une réunion des ministres européens de l’Intérieur à ce sujet, selon LeMonde.fr. L’ordre du jour n’était pas anodin puisqu’il s’agissait de boucler les négociations sur la nouvelle version de Schengen.

Et ce n’est pas le seul oubli du président sortant. Dans son discours, il a également fustigé le risque d’un afflux migratoire aux portes de l’Union européenne. « Dans la situation économique et sociale qui est la nôtre, si l’Europe ne maîtrise pas les entrées sur son territoire, elle ne pourra plus accueillir dignement ceux qui arrivent, elle ne pourra plus répondre à la demande d’intégration de ceux qui ont tant de mal à trouver leur place dans la société, elle ne pourra plus financer sa protection sociale », a-t-il lancé.

Ces propos visent, sans le dire, les Etats aux frontières extérieures de l’UE comme la Grèce, l’Espagne ou l’Italie. Déjà fragilisés par la crise, ces Etats doivent en plus jouer le rôle de garde-frontières. La révision de Schengen permettra (théoriquement) que ces pays puissent recevoir l’aide de leurs voisins en cas de crise migratoire. Un renforcement des pouvoirs de l’agence Frontex, chargée de la surveillance des frontières extérieures de l’UE, est aussi prévu.

AMNÉSIE

Mais un autre chantier risque de bouleverser les frontières de l’UE : l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’espace Schengen. Au départ, les deux pays devaient pleinement adhérer au traité en 2011 et ainsi être chargée de surveiller les gardes-barrières de l’Europe. Mais, cette échéance a été plusieurs fois ajournée. Lors du Sommet européen du 1er mars, les dirigeants européens, dont Nicolas Sarkozy, ont décidé de reporter une fois de plus leur décision… à septembre 2012.

En tête des opposants à la venue de Sofia et Bucarest : les Pays-Bas. Pour Amsterdam, dont le gouvernement est de droite, la Roumanie et la Bulgarie ne sont pas encore prêts à assurer eux-mêmes la garde des frontières de l’UE. A l’inverse, la France, longtemps dans le camp du refus avec l’Allemagne, a donné son feu vert à l’entrée des deux pays. Las, l’unanimité étant requise pour élargir Schengen, l’élargissement a dû être repoussé.

A Villepinte, Sarkozy réclame la révision de Schengen et plus de pouvoirs pour les ministres mais, à Bruxelles, son ministre de l’Intérieur sèche une réunion sur la révision de Schengen.  A Villepinte, Sarkozy peste contre l’Europe passoire, à Bruxelles, il valide l’élargissement de la libre circulation en Europe. A ce niveau, ce n’est plus de l’amnésie, c’est la schizophrénie.

1 commentaire sur Schengen : le double discours de Sarkozy

  1. Ns,Villepinte,Révision de Shengen : « A ce niveau, ce n’est plus de l’amnésie, c’est la schizophrénie. »
    Eh oui ,on commence à s’apercevoir que le sommet de l’Etat est malade . Reste que les français constituent dans une grande majorité une société schizophrène qui, par exemple depuis des décennies, dans le même temps, vote majoritairement en 2002 à 82% pour un président de la République de droite, se plaint que son gouvernement ne pratique pas une politique de gauche et excuse les 40 % d’abstentionnistes qui ont refusé l’exercice du suffrage universel si difficilement acquis par des luttes sociales souvent sanglantes. C’est cette même société schizophrène qui, cinq ans plus tard, se rend en masse au 1er tour de la présidentielle à plus de 85%, dans la foulée boude à nouveau le second tour, à plus de 40% les élections législatives qui suivent et se plaint que le 1er Ministre n’est plus qu’un objet virtuel identifié dans la conduite des affaires du gouvernement. C’est la même société schizophrène qui dans le même temps plaint les victimes du sang contaminé et excuse les coupables, vitupère contre la banqueroute du Crédit lyonnais et excuse l’Etat de n’avoir rien vu venir, se plaint que le gas-oil est le principal responsable de la pollution automobile et se précipite sur l’acquisition des véhicules diesel, proclame que le nombre de fonctionnaires plombe les comptes sociaux de l’Etat et réclame l’accès et les aides pour tous aux métiers de la fonction publique, et se met en grève contre une mini réduction d’effectifs de moins de 1% des effectifs globaux de fonctionnaires. C’est la même société schizophrène qui balance à tort et à travers par médias interposés mensonges et calomnies sur les uns et les autres, qui se plaint que les tribunaux sont engorgés et qui pleure les victimes d’Outreau ou d’ailleurs. C’est le culte de l’irresponsabilité de l’individu, cher aux bons penseurs et, ce faisant, loin de les rendrent méfiants vis-à-vis de pratiques délirantes nos compatriotes continuent à se mobiliser pour le clinquant, les paillettes,les flonflons et la frime au lieu de pousser les politiques à régler les problèmes qui pourrissent la vie du plus grand nombre. Ce qui,récemment faisait dire à Boris Cyrulnik, ethnologue et psychiatre : Le panurgisme psychologique participe à la course économique jusqu’au moment où les moutons euphoriques sautent dans le vide !
    Le spectacle de l’élection présidentielle 2012 est annoncé…..à moins les politiques en lice se fassent soigner!!!!

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