Sécurité : “se mettre à la place de l’autre”

«  Si vous fermez la porte à toutes les erreurs, la vérité restera dehors (Rabindranâh Tagore) »

 

  • Tribune libre de J.C. Baert

 

39425224Il ne fait aucun doute que la Sécurité devient une source de préoccupation majeure pour la majorité des états dans le monde. La prolifération des états faibles enfantés par les processus de décolonisation ou d’accès à l’indépendance, des nouveaux états en quête de devenir, des états voyous perturbateurs notoires d’un ordre mondial qui cherche à se rétablir, des états en faillite pris au piège du poids de leurs dettes, contribue à entretenir les mécanismes de défaillance de la paix dans le monde et provoque de graves troubles à la sécurité internationale.

A la lumière des conclusions du rapport d’étude de la 57éme session nationale de l’Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale, il apparaît clairement que les mécanismes de prévention spécifiques en matière de lutte contre la défaillance des états demeurent largement embryonnaires.

A l’évidence les pays candidats au rétablissement des règles fondamentales de stabilité et de coopération positive des états dans le monde ne sont pas prêts.

Pire, face aux attentats, au pouvoir des terroristes, des maffieux, des voyous et des corrompus, les réponses apportées notamment en Irak ou en Afghanistan par les Usa, première puissance mondiale, ne sont pas satisfaisantes ni de nature à rassurer sur le long terme. Washington n’a que de mauvaises solutions et les tentatives avortées de médiation européenne sur la question Iranienne ou Syrienne et dans le conflit Israélo Palestinien n’en sont que les tristes révélateurs.

La France, par la bouche du Président de la République en voyage d’Etat les 19 et 20 nov.2004 en Grande Bretagne, a fait savoir qu’à une époque d’un monde multipolaire et interdépendant il nous fallait imaginer rapidement les nouveaux outils de maîtrise de la sécurité commune et qu’en ce domaine d’actions la Grande Bretagne et la France qui ont des compétences notoirement établies devaient unir leurs efforts. Ce qui fût fait sur le théâtre Lybien en 2012 !!!!!!!

Incompréhension et préjugés nés d’un passé colonial établi aux quatre coins de la planète pésent inévitablement sur le ressenti de nos initiatives internationales en matière de tentatives d’aides au rétablissement de la stabilité des états les plus vulnérables.

A l’évidence aussi bien en Afrique, qu’au moyen orient, dans le sud est asiatique ou en Amérique du sud, la diplomatie contre les va-t-en guerre ne fait pas grand chose et le retour en force du pouvoir KAKI dans des régimes civils discrédités par la corruption et les bêtises des politiques en est la conséquence. Il n’est donc pas étonnant que le regard rivé sur les états d’âme des populations outrées par le nombre croissant de régimes civils qui se partagent le butin national en foulant aux pieds leurs engagements électoraux et démocratiques, d’autres militaires, maffieux ou terroristes observent avec gourmandise les opportunités d’assouvissement de leur pouvoir de nuisance internationale. Ce retour des militaires aux affaires notamment en Egypte, en Syrie, en Corée du Nord, par exemple, peut être considéré comme un juste revers d’un modèle de démocratie mondiale qui n’a pas encore produit son futur immédiat.

Ayant mis fin en 1989 aux régimes autoritaires est-européens par les revendications de la rue et les mouvements corporatistes voire par des oukases nationaux mettant fin à l’intrusion des militaires dans la vie politique, assez curieusement, la priorité de nos ripostes à la défaillance des états s’inscrivent actuellement dans l’intervention militaire !

Les discours n’en sont ainsi que plus ambigus.

Pris au piège de la disproportion des moyens de lutte engagés pour le rétablissement de la paix dans des zones où le lance pierre, ou la machette et les armes de poing sont les armes des combattants, nos troupes mises en devoir d’interposition, subissent les effets d’un engagement voulu essentiellement en terme d’actions ponctuelles plus guidées par un souci de gesticulation que par un réel désir de remettre de l’ordre au lieu et place de responsables défaillants.

Hélas, les opérations humanitaires organisées en relais à ces opérations militaires d’interposition montrent les limites d’une ingérence fondée hors du monde valide et responsable normalement en charge de leurs semblables. Pire, il est maintenant établi que ces interventions conduisent ceux là même qui les organisent à être pris en otage et discréditent encore un peu plus les capacités des ONG à contribuer dans le long terme à la prévention des crises et des conflits par l’action humanitaire.

Dans ces conditions peut-on raisonnablement penser qu’une stratégie de reconstruction des états défaillants soit actuellement suivie par les différentes institutions internationales ou bien faut-il admettre de nous remettre en question et de proposer de nouvelles stratégies d’aide à la reconstruction d’un monde qui nous échappe ?

Une chose est certaine, vivre hors du monde n’est plus possible !

Alors que faire pour aboutir à des solutions qui peuvent s’inscrire dans le long terme et ainsi contribuer à la restauration durable de la paix ?

Douloureuse mutation pour des pays qui minés de l’intérieur par des problèmes de vieillissement de populations, de croissance incertaine, de surenchérissement de couvertures sociales, de surendettements croissants, de fractures sociales en marche, de surconsommation d’énergie doivent naturellement accorder les priorités qui s’imposent face à leurs propres vulnérabilités. Serons-nous capables d’aller à la rencontre de ce peuple introuvable et d’aller à la rencontre de ces citoyens du monde dans un souci de réel partage des ressources sans céder à l’utopie de la croissance ?

Pourrons–nous enfin conjuguer le géoéconomique autrement que par l’interventionnisme dicté par l’urgence du court terme sans réelle concertation géopolitique et stratégique autrement que par notre volonté d’ancrer nos lois de pilotage de la paix sur le court terme du maintien de nos approvisionnements en pétrole, de notre indépendance énergétique?

Pouvons-nous faire fructifier nos expériences de restauration de la paix en Europe sans céder à la tentation de l’inutile ou illusoire décalcomanie mais au contraire en recherchant à valoriser nos facteurs clés de succès qui nous ont permis de parvenir, malgré les conflits, les cultures différentes, les luttes d’intérêt, les oppositions, à une Europe où les trains et les avions arrivent presque tous à l’heure et où les mécanismes d’accès au bonheur sont de plus en plus favorisés pour des publics de plus en plus nombreux ?

Pour ce faire, il nous faudra certainement faire preuve de beaucoup d’imagination et nous mettre d’abord à la place des autres. Car le secret du succès en matière de sécurité, s’il existe, c’est la faculté de se mettre à la place de l’autre et de considérer les choses autant de son point de vue que du nôtre. Apparemment, ces recommandations d’Henri Ford n’ont pas été entendues par les « gendarmes  » du monde.

Bien à vous dans la tourmente et toutes et tous cherchons…une vie meilleure !

JC BAERT

2 commentaires sur Sécurité : “se mettre à la place de l’autre”

  1. La surconsommation d’énergie n’est pas en soi un synonyme de décroissance….sauf à ne pas se poser la question du rendement, c’est à dire du gâchis !!!!
    Que fait-on avec ce que l’on a ?
    Des néfles pour certains, des illusions pour d’autres, et du bonheur pour quelques uns. Assurément chacun est en droit d’avoir sa part au bonheur eu égard à l’égalité des hommes et des femmes sur cette planéte, à moins que cela aussi soit une fausse monnaie !

  2. L’article était bien parti, mais m’a au final déçu. La croissance serait une utopie? Soyons clairs, une décroissance durable de 1% par an rendrait les morts de la deuxième guerre mondiale une poussière par rapport à ceux qu’elle créerait.
    On retrouve par ailleurs dans ce texte le poncif de la surconsommation d’énergie. Soyons clairs. Avec les ressources connues actuelles d’uranium, en surgénération, l’humanité a une réserve énergétique de 6700 ans avec 10% de croissance par an sur la période. Si nous passons en surgénération Uranium/Thorium, on rajoute 21000 ans. Cela nous laisse donc largement le temps de trouver la fusion qui offre une énergie illimitée!
    Enfin, et sur un autre registre, l’accès au bonheur dans les sociétés occidentales me semble tout à fait discutable. Je ne pense pas que les pays pauvres soient peuplés de plus de malheureux que chez nous. Et pour finir, on le voit hélas chaque jour, la corruption n’est pas seulement l’apanage des pays faibles. Rappelons les paroles de Maurice Allais qui considérait que les banquiers fabriquent aujourd’hui, pour l’essentiel, de la fausse monnaie.

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