Nicolas Sarkozy à la télé : la dette ! la dette ! la dette !

 

Le président de la République a fait de l’endettement l’unique problème du pays. Une véritable conversion qui renie le discours de Toulon qui rejetait la responsabilité de la crise sur la finance. Ne reste qu’une politique économique pour le pays: faire comme l’Allemagne…

Nicolas Sarkozy à la télé : la dette ! la dette ! la dette !

Le général De Gaulle avait eu un trait d’humour à propos des hommes politiques qui « sautaient comme des cabris en criant : l’Europe ! l’Europe ! l’Europe ! »  Son lointain successeur, Nicolas Sarkozy  a choisi ce soir de sauter comme un sanglier devant les téléspectateurs  en criant : « la dette ! La dette ! La dette ! »

Car c’était bien là le message principal que voulait faire passer le président de la République, de retour de Bruxelles, après un marathon de négociation pour un plan de sauvetage de l’euro et de la Grèce: la dette est devenu le souci principal de l’Elysée. De ce point de vue, même si ce virage politique est engagé depuis plusieurs mois, il est néanmoins  spectaculaire.

Le tableau des risques encourus par la France, brossé par Nicolas Sarkozy, est absolument catastrophiste : du fait de la dette publique, les Français risquent rien moins que le sort des Grecs, Espagnols, Portugais ou Irlandais : la baisse des salaires, des pensions de retraites, la destruction du modèle social, la mort de la sécurité sociale, etc… « Nous sommes au bord du gouffre », a-t-il insisté.

L’obsession du déficit ne fait pas partie au départ de l’ADN politique de Nicolas Sarkozy. On peut même dire qu’il y est hostile par nature. En 1993, il avait creusé le déficit budgétaire et engouffré les milliards de francs des privatisations pour assurer, sans succès, la réélection d’Edouard Balladur. Idem en 2007, lorsqu’il se fait élire avec un programme de baisse d’impôts de plus de 11 milliards par an.

Une séquence fait comprendre le cheminement idéologique profond de Nicolas Sarkozy : questionné par Yves Calvi à propos du pouvoir des agences  de notation qui menacent le triple A de la France, il répond : « Ce qui donne du pouvoir aux agences de notation, c’est la dette ». A ce moment là, Nicolas Sarkozy prend le contrepied de son discours de Toulon (rédigé par Henri Guaino) qui fait des agences et des pratiques amorales de la finance les seules responsables de la crise économique qui vient de s’abattre sur le Monde.

Il s’agit bel et bien d’une conversion. Selon un de ses proches, elle ne serait pas feinte. Le président de la République serait frappé par la puissance de la récession qui s’approche, et aurait conscience que cette fois-ci, la France n’a aucun moyen de la combattre par une politique de relance. D’où son mouvement de rapprochement avec Angela Merkel, qui professait, dimanche à Bruxelles, que « la crise n’est pas monétaire, c’est une crise de l’endettement ».  

Ce n’est pas dans ces colonnes qu’on niera l’importance de la dette publique de la France (85% du PIB), son coût (48 milliards d’euros par an) et la nécessité de la combattre pour ne pas tomber sous la coupe des marchés financiers. Mais la dette est soudainement devenue dans le discours sarkoziste l’alpha et l’omega de la politique française. Cela lui permet de chercher des responsables : Mitterrand et la retraite à 60 ans, Jospin et les 35 heures, Chirac avec l’entrée de la Grèce dans l’euro en 2001… 

La dette permet par ailleurs de justifier la réforme la plus impopulaire de son quinquennat, celle des retraites. Et le président s’arête sur l’obstacle : que fera-t-il pour la réduire ? Il annonce un effort d’économies de « 6 à 8 milliards d’euros supplémentaires » par rapport au budget 2012 qui vient  juste d’être voté à l’Assemblée nationale. Pour les mesures, dont on devine qu’elles devraient tourner principalement autour d’un taux de TVA intermédiaire et / ou d’un taux d’impôt sur les sociétés exceptionnel, il faudra attendre pour le savoir son retour du G20 qui se tiendra à Cannes les 4 et 5 novembre. Comme si les discours convenus des grands du monde avaient une importance pour déterminer les mesures fiscales urgentes de la France.

L’obsession de la dette a une autre conséquence : le président de la République ne conçoit plus d’autre politique économique que dans l’association, voire l’imitation la plus étroite, de l’Allemagne d’Angela Merkel. Il rêve même d’un « domaine franco-allemand » (pour un président qui dispose d’un domaine « réservé », l’expression est surprenante), qui comprendrait  la définition de l’impôt sur les société, l’unification des taux de TVA, la définition des hypothèses budgétaire, la fiscalité sur la patrimoine….

Quant à la justice sociale, à « l’équité », elle risque d’avoir un fort vilain visage, puisqu’il résume son programme à « moins d’assistanat, et plus d’investissement, voici la martingale gagnante dans tous les pays ». Les pauvres ont quelques soucis à se faire. La dette, avec Sarkozy,  ils auront à en payer plus que leur part.

Hervé Nathan – Marianne

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