L’honneur de la politique

 

villepin100xPar Dominique de Villepin

Comment rester silencieux quand nous assistons à cette course à l’abîme de notre vie politique ? Nous sommes pris dans le vertige du mépris. Tout le monde fait comme si la campagne devait se résumer à un ball-trap de candidats, qu’on découragerait, qu’on achèterait, qu’on réduirait au silence. On laisse courir des bruits infamants pour tout le monde sur les décisions de tel ou tel.

L’avenir n’appartient pas à un vainqueur. Ce n’est pas vrai et ce n’est dans l’intérêt de personne de le croire. Il faut dire les choses crûment. Ceux qui croiraient qu’en engrangeant les ralliements la majorité peut se sauver sans autre forme de procès vont le cœur joyeux à l’abattoir. Ceux qui croient qu’on pourra se satisfaire en 2012 d’une alternance sans alternative mènent le pays à la désespérance. Ceux qui imaginent pouvoir faire fructifier paisiblement un magot électoral se trompent lourdement. Aujourd’hui, si rien ne change, la droite et le centre ont perdu. Pire, la gauche n’a pas gagné.

Nous n’avons pas besoin d’alternatives à untel ou à untel, à ceci ou à cela, nous avons besoin d’une alternative globale pour sortir la France du fossé. Mais aujourd’hui tout dévie les uns et les autres de cet objectif. La primaire de la gauche ou la dé-primaire du centre, c’est la même logique des Horace et des Curiace un à un abattus. Qu’il n’en reste qu’un, de combat en combat, jusqu’à ce qu’un vainqueur épuisé puisse régner sur un champ de ruines. Voilà où mènent les calculs électoraux et partisans. Tout ce qui contribue à faire de la politique l’addition des solitudes est un drame pour notre avenir. Car voilà bien aujourd’hui l’ennemi du pouvoir, la solitude qui va toujours avec la tentation du repli sur soi et de la peur des autres. C’est ce qui se passe à l’Elysée aujourd’hui, au vu et au su de tous les Français. C’est ce qui passera dès demain autour du candidat socialiste. Toute logique de conquête du pouvoir, toute logique majoritaire ne peut conduire qu’à la solitude et à l’impuissance lorsqu’il s’agit d’exercer le pouvoir.

une logique gaulliste du sursaut

L’alternative se construit dès aujourd’hui en faisant travailler ensemble des gens qui ne sont pas faits pour s’entendre. C’est ainsi. Notre vie politique est faite d’egos difficilement compatibles. On peut le regretter mais on peut rappeler aussi que c’est souvent aussi la condition de leur énergie, de leur volonté de faire bouger les lignes, de leur audace. Plutôt que d’imaginer un monde utopique où l’on se ferait des politesses devant la porte ouverte, faisons travailler les gens ensemble partout où c’est possible, autour de projets, d’idées, de priorités communes. Tirons les leçons de quatre ans, de dix ans et même de quarante ans d’échecs et d’impasses de la logique majoritaire. Celle-ci donne le meilleur d’elle-même en temps de croissance. Elle est dangereuse en temps de crise. Elle mène, de conquête en conquête, avec la même armée désespérée, de plus en plus réduite et aux abois. Au fond la démocratie majoritaire, c’est le risque de l’antidémocratie. C’est pourquoi nous devons défendre une logique du dépassement et de l’esprit de service, une logique gaulliste du sursaut.

Je plaide et ne cesserai de plaider pour une politique de large rassemblement national qui permette aux idées de s’exprimer et aux consensus de se réaliser. Il n’y aura pas d’homme providentiel en 2012. Il peut encore y avoir une équipe présidentielle. Je n’ai jamais cessé depuis quatre ans de plaider pour le sursaut et l’électrochoc capable de nous remettre sur la bonne voie. La vérité c’est qu’aujourd’hui, il nous faut à tous une nouvelle donne, la volonté de réaliser l’impensable. Chacun devra faire sa part du chemin. Chacun devra ouvrir les yeux sur ses propres limites. Chacun devra s’efforcer de sortir des affrontements stériles, des postures confortables, des combats insidieux.

Je veux m’engager pleinement dans cette logique, je l’ai dit et redit. Nous devons relever nos manches. C’est dans cette démarche que je veux rencontrer les Françaises et les Français pour essayer de tracer ce chemin exigeant. C’est dans cette démarche que je veux prendre en compte toutes les sensibilités de notre pays pour définir tout au long des prochaines semaines ce que doit être une politique de rassemblement national.

Cette nécessité s’impose à chacun d’entre nous, candidats, responsables, citoyens. Il en va d’une exigence morale. Il en va du respect des Français. Il en va de l’honneur de la politique.

10 commentaires sur L’honneur de la politique

  1. Pensez vous sincèrement que les français puissent voter pour Monsieur de Villepin qui fit de beau discours mais poursuivit une politique coloniale au service des grands groupes ou des états uniens comme en Haïti ?La seule équipe qui peut redresser le pays est celle de DLR.

  2. Tous les commentaires expiment la désespérance ; il n’y a pas un seul parti politique à qui se fier. Qui donc lancera le débat pour une autre organisation de vie en société . On pensait que les Gaullistes en seraient capables, mais ils ont tous renié les principes du Général : Primauté du Politique et de l’Intérêt général. Il n’y a plus que des serviteurs de la Finance …….. et des citoyens qui ne savent plusquoi penser.

  3. Vous écrivez : « Notre vie politique est faite d’egos difficilement compatibles. »

    C’est une perle ! Pour vous, la politique c’est une affaire d’egos ; une affaire de famille ; pour reprendre les termes de François Mauriac : « Oui, l’Etat, c’est encore vous, c’est toujours vous : l’état dans lequel nous sommes. » [4 juin 1954].

    Pour vous, la politique, c’est une affaire de professionnels. Les Français sont donc exclus de votre définition de la politique, alors que chez un gaulliste, les Français, en tant qu’ils sont Français et tant qu’ils sont Français, sont le coeur de la politique.

    Réserver — ce qui est pour vous tellement naturel que vous n’avez même pas l’intelligence de ne pas l’écrire — réserver le poste suprême à un membre de l’équipe, c’est mettre en place l’élection par le principe du maillon faible : comme tous ceux qui ont le droit de participer à l’élection sont candidats à l’élection, s’il apparaît un homme qui visiblement dépasse tous les autres, tous les autres, qui sont aussi candidats, se chargeront de l’éliminer de la course simplement pour préserver leurs chances : « je vote pour le plus con », le principe de Clémenceau.

    La France se meurt, comme tout organisme vivant, de cette endogamie qui finit par ne plus présenter que les tares et les tarés.

    Vous êtes un politicard de la IVème République. Et l’histoire de la France politique actuelle a déjà été faite : c’est l’histoire de la IVème République, précisément parce que vous n’avez aucune prise sur l’histoire et pouvez donc rester constant quand autour de vous tout change, et n’êtes qu’une des ombres du théâtre d’ombres, qui prend des poses, émet des sons, commente sans participer en rien à la réalité.

    Démonstration par la citation d’un morceau du Bloc-notes de François Mauriac :

    « […] tout y refleurirait pour [la France], d’un seul coup, si la politique ici changeait de visage.

    Elle n’en changera pas : notre malheur, c’est cette pérennité, à Paris, d’une équipe de malheur. Le constater, ce n’est pas céder à la passion politique. La chute de M. Guy Mollet ne sauvera rien, puisqu’il s’effacera devant un autre lui-même : quelqu’un de l’équipe.

    Les noms changent, sans que s’interrompe l’enchaînement des « coups » comme on dit : le coup du 20 août 53, le coup du 6 février 56, le coup de l’avion de Ben Bella, le coup de Suez, pour nommer ceux qui viennent d’abord à l’esprit. Sont-ils l’expression d’une politique ? Pas même. Une mauvaise politique se redresse ; au pire elle mène quelque part. Nos malheurs ne naissent pas d’une politique définie, mais du heurt de velléités contradictoires que l’événement départage. »

  4. Le Bras Yves // 8 octobre 2011 à 8 h 27 min //

    Monsieur
    Voici un discours gaullien ou gaulliste comme l’on voudra.
    Le discours des politiques, qui sont à l’heure actuelle majoritaires, n’est pas adapté à la situation actuelle du pays.Cette situation est catastrophique mais consttitue une chance pour la France.
    Il faut se réunir antre gens qui n’ont pas l’habitude de travailler ensemble et qui sont de bords différents.
    La France n’est pas et ne sera jamais une aréne pu l’on promet au peuple comme actuellement du pain et des jeux.Seule l’union nationale peut faire que l’avenir sera différent.
    Yves

  5. nostalgie1789 // 7 octobre 2011 à 21 h 20 min //

    Au risque de déplaire, et sans aucun soupçon de flagornerie de ma part, je dis, persiste et signe que DDV a raison.
    Son analyse est pertinente et ne porte pas en elle la trace du temps,celle de l’opportunisme ambiant qu’il est de bon ton d’afficher dans le landernau politicard de basse cour qui nous est décrit quotidiennement par des média à la botte.
    Si ce n’est pas en 2012, ce sera plus tard, mais la France ne recouvrera son statut de grande puissance rayonnante de Paix, de Démocratie, de Fraternité, de Culture et de Progrès que lorsque les patriotes qui actuellement s’ignorent, s’évitent ou se combattent auront compris que leurs divergences ne sont rien au regard des ambitions qu’ils appellent pour notre Pays…
    RAPPELEZ-VOUS LE PROGRAMME DU C.N.R, quels en étaient les concepteurs et les signataires sinon des citoyens que précédemment tout opposait ?
    « celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas » (Aragon) croyaient d’abord en la France et ont risqué leur vie pour elle…Memento …

  6. Denis Griesmar // 7 octobre 2011 à 16 h 45 min //

    On ne sauvera pas la France par une soumission permanente à l’Allemagne, et par une fuite en avant dans une « Europe » intégrée dont les peuples ne veulent pas.
    Le courage, aujourd’hui, c’est d’admettre que la classe politique s’est fourvoyée avec son idéologie européenne, et de sortir de cette « Union » pour « jouer sur plusieurs pianos » et retrouver notre liberté de manoeuvre.
    Si les deux plus grands hommes d’Etat de la IVème République, De Gaulle et Mendès-France, s’étaient retrouvés dans l’hostilité à l’ « Europe », ce n’est pas un hasard …

  7. Monsieur l’ex premier Ministre enfonce des portes ouvertes et parle pour ne rien dire. Il est en ce sens en phase avec les solliloqueurs de la Gauche et de leurs primaires insipides et creuses !
    Tous les français sont prêts en effet à relever leurs manches, mais pas pour des néfles !
    Beaucoup s’indignent comme vous mais en réalité que font-ils concrétement à part des circonvolutions aériennes proches des gesticulations éoliennes de votre confrère Jean-Louis Borloo et de beaucoup d’autres ?
    Allez Monsieur l’ex Premier Ministre faire travailler ensemble des gens qui ne sont oas fait pour s’entendre, c’est vous qui le dites ,c’est bécher la mer et tromper les esprits faibles !!!!!!!!
    Assurément vous n’avez pas la carrure du Gl De Gaulle et chacun est à même de s’en apercevoir .

  8. DDV, ce gaulliste d’opérette qui entérine ce déni de démocratie qu’est le traité de Lisbonne!

  9. DDV l’homme de la dissolution de 1997 n’est que la roue de secours pour la fraction droitière de l’oligarchie néolibérale et européiste. Tout le reste n’est qu’effet de manche pour lequel il est bon!

  10. Raymond GROSPAS // 6 octobre 2011 à 19 h 21 min //

    Vous voulez sauver la France? Moi aussi.
    Mais j’attends toujours des différents partis qui se proposent:
    l’ idée phare, le programme choc, les mesures subtiles qui, peu à peu, nous sortiront de l’ornière.
    Je ne les ai pas trouvés chez vous non plus.

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