Affaire Takieddine : la justice sur les traces de Jean-François Copé

MM. Copé et TakieddineJean-François Copé, l’homme chargé de mettre le parti présidentiel « en ordre de  bataille » pour 2012, pourra-t-il tenir jusque-là ? Le secrétaire général de l’UMP, ancien ministre du budget, est un proche de Thierry Gaubert et de Nicolas Bazire qui viennent d’être mis en examen par le juge Renaud Van Ruymbeke dans l’affaire des ventes d’armes à l’Arabie saoudite et au Pakistan. Et il pourrait être visé et entraîné à son tour dans l’affaire.

(photo : MM. Copé et Takieddine© Mediapart)

Des pièces obtenues par les policiers montrent que le marchand d’armes Ziad Takieddine a utilisé, en 2005, sa relation avec le ministre du budget dans les litiges fiscaux d’autres hommes d’affaires, dont Gérard Achcar, le patron d’un puissant groupe agroalimentaire.

La comptabilité de M. Takieddine fait aussi apparaître les largesses dont aurait bénéficié le ministre, entre 2003 et 2005, alors qu’il était ministre et porte-parole du gouvernement Raffarin. D’abord ministre des relations avec le parlement, Jean-François Copé devient, en mars 2004, ministre délégué à l’intérieur, auprès de Nicolas Sarkozy, puis en novembre 2004, ministre du budget.

Il s’agit pour l’essentiel d’invitations et de déplacements au cap d’Antibes, à Londres, à Venise et à Beyrouth. Ces dépenses pourraient faire partie du périmètre du «recel» d’abus de biens sociaux reprochés à M. Takieddine sur les sommes obtenues sur les marchés d’armement.

La comptabilité entre les mains des policiers fait apparaître un «avoir de la famille Copé» s’élevant à 19.050 euros, signalé dans un compte récapitulant les voyages commandés à la société Translebanon. En voici un extrait:

Questionné par Mediapart en juillet, M. Copé a justifié ces voyages par des « relations strictement amicales », « sans aucun lien » avec ses «activités électives ou ministérielles». Récemment questionné sur Canal +, il a même assuré qu’il ne connaissait pas « les activités professionnelles » de Ziad Takieddine.

Comme nous l’avons révélé, M. Takieddine, résident fiscal en France, a dissimulé au fisc pendant plus de dix ans ses revenus et ses propriétés grâce à un réseau d’hommes de paille et de sociétés prête-noms. Jeudi 8 septembre, les policiers ont perquisitionné, durant cinq heures, les bureaux de son avocat fiscaliste, Me Richard Foissac – du cabinet Francis Lefebvre à Neuilly-sur-Seine.

Propriétaire d’un patrimoine estimé à plus de 100 millions d’euros, M. Takieddine ne payait ni l’impôt sur le revenu, ni l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Alors qu’il fréquentait assidûment ses diverses propriétés, M. Copé aurait tout ignoré de la situation fiscale de son ami. Le cabinet du secrétaire général de l’UMP a précisé, jeudi, à Mediapart, que « Jean-François Copé n’est jamais intervenu personnellement sur la situation fiscale de M. Takieddine ». Plusieurs contrôles avaient en tout cas été enclenchés en 2005, sans suite.

La dette Achcar

Pourtant, selon des documents récupérés par les policiers chargés de l’enquête, M. Takieddine s’est intéressé de près aux problèmes fiscaux d’autres contribuables, n’hésitant pas à faire intervenir son ami et ministre du budget, Jean-François Copé. Le marchand d’armes détenait ainsi des dossiers présentant les litiges fiscaux de deux particuliers. Dans l’un de ces dossiers, l’on a retrouvé, précieusement archivée, une lettre de M. Copé.

 Le premier de ces contribuables, Gérard Achcar, propriétaire d’une galaxie de sociétés agroalimentaires en Afrique – Grands moulins du Mali, Grande confiserie du Mali, Société des eaux minérales du Mali –, avait fait l’objet d’un contrôle fiscal accompagné de perquisitions en décembre 2000. Le fisc soutenait que l’activité professionnelle de l’homme d’affaires était basée à Paris où il disposait d’une résidence. Achcar le contestait, faisant valoir « une résidence fiscale au Mali » et ouvrant la voie à un long litige fiscal.

C’est le 13 juin 2005 que Jean-François Copé – qui n’avait pas été le ministre initialement sollicité – offrait par écrit une solution à l’homme d’affaires. Tout en maintenant la domiciliation fiscale en France, M. Copé préconise un dispositif sophistiqué permettant « l’abandon des deux tiers des bases » d’imposition. L’avocat chargé de la sortie du litige n’est autre que Richard Foissac, le fiscaliste de Ziad Takieddine.

lettre A

Selon M. Achcar, c’est l’avocat fiscaliste qui aurait été à la manœuvre. « Je ne sais pas comment M. Takieddine a eu accès à mon dossier, certifie M. Achcar, questionné par Mediapart. J’avais deux avocats au cabinet Lefebvre. Sur les conseils de Me Foissac, nous avons écrit au ministre. Et M. Copé a répondu qu’il y avait effectivement quelques anomalies dans mon dossier. » L’homme d’affaires suggère que M. Takieddine, qu’il ne connaît pas, a été informé du dossier par leur avocat commun.

L’autre dossier fiscal conservé par M. Takieddine est beaucoup plus modeste, mais il illustre un peu plus l’instrumentalisation à laquelle se livrait le marchand d’armes. Il s’agit de celui de M. Boris C., un commerçant retraité, retrouvé par Mediapart.

« C’est un ami qui m’a amené chez M. Takieddine, que je ne connaissais pas, explique-t-il à Mediapart. Ma propriété avait été vendue aux enchères, et les créanciers s’étaient réparti l’argent, tous sauf le trésor public qui continuait à effectuer des prélèvements sur ma retraite, alors que l’argent de ma maison était sur un compte à la Caisse des dépôts. Je voulais que le gouvernement le prenne et me foute la paix. Je suis allé chez ce monsieur Takieddine. Mon ami m’a dit qu’il avait des relations au plus haut niveau. J’ai dit très bien : on va essayer. Je l’ai vu, puis je lui ai fait une lettre et lui ai envoyé un dossier. »

lettre B

Boris C. assure que sa démarche auprès du marchand d’armes n’aurait « pas abouti ». Mais il aurait quand même obtenu que le Trésor public lui rembourse « le trop-perçu » ainsi que les pénalités.

Questionné par Mediapart, M. Copé n’a pas contesté l’intervention de M. Takieddine auprès de lui dans les litiges de MM. Achcar et Boris C.. Il s’est contenté de nous préciser que « tous les dossiers qui lui ont été soumis ont été instruits par l’administration fiscale dans le respect des règles en vigueur ». « M. Copé a confirmé l’avis rendu par l’administration », a-t-on indiqué dans son entourage.

De son côté, Me Richard Foissac, l’avocat fiscaliste de M. Takieddine, s’est retranché derrière le secret de l’instruction par la voix du déontologue du cabinet Lefebvre, Me François-Xavier Matteoli.

3 commentaires sur Affaire Takieddine : la justice sur les traces de Jean-François Copé

  1. Si cette intervention ( régalienne ) est avérée et en dehors des règles et usages régissant la matière fiscale, il est nécessire, à minima que ces gens restituent lesdites sommes ayant fait indument l’objets du dégrèvement visé !
    Mécheri

  2. Les élus qui se compromettent avec des marchands d’armes, qui se font offrir des voyages, cumulent les mandats avec le plus grand mépris des électeurs, rendent des « services » peu compatibles avec leurs fonctions électives, et sabordent les acquis sociaux pour lesquels nos parent se sont battus, sont indignes de la République française.
    Il faut tirer la chasse d’eau et en débarrasser la France !

  3. bizarre le silence de PASQUA,,,
    qui informe les journalistes,qui distribue les conversations téléphoniques,,
    voila la bonne questions a se poser?
    qui y a intérêt,et a qui cela profite;;
    apres,les affaires,,c »est autre choses
    qui n »a pas aider un proche,un amis,les valises,c »est vieux comme le monde,,
    nous somme assis sur une cocotte minute,,,et le couvercle va surement sauter,,,,
    et qui va en profiter,,LA DROITE NATIONALE
    les femmes devant la mairie de JF Copé vont y participer

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