Six ans après le référendum de 2005, le «?oui?» meurt de honte

 

melanchon

Gaullisme.fr, site d’expression gaulliste, est totalement indépendant des partis politiques. En 2005, les gaullistes de conviction ont mené campagne contre le projet giscardien de “constitution européenne”. Malgré une victoire incontestable du NON , les manœuvres Sarkoziennes, avec l’aide du PS, ont abouti à l’adoption du traité de Lisbonne par voie exclusivement parlementaire, texte copie conforme du projet de traité rejeté en 2005. Jean-Luc Mélenchon, co-président du Parti de gauche revient sur les conséquences du rejet de la constitution européenne. Gaullisme.fr lui ouvre ses colonnes.

Il y a six ans, le 29 mai 2005, le peuple français rejetait le projet de constitution européenne. La participation avait atteint 70 %. Pour la première fois, elle fut plus forte dans les classes populaires que chez les importants. Cet événement qui percuta si fortement notre pays mériterait bien un anniversaire. Les amis des commémorations sont pourtant muets. Pourquoi ? Le oui meurt de honte. La crise en cours ridiculise sa bonne conscience eurobéate.
Les dirigeants européens étaient convaincus d’avoir effacé les non français, néerlandais et irlandais. Comme ils étaient contents de leurs ruses pour imposer le traité de Lisbonne ! Quelle rigolade, pour eux, d’avoir dupé tout le monde ! Avoir fait adopter la chose sous un autre nom et surtout sans référendum, voila la forfaiture de Nicolas Sarkozy qui s’est vanté d’être l’auteur du nouveau texte. Les parlementaires PS et Verts qui l’ont rendue possible par le vote au congrès de Versailles ont également des comptes à rendre au peuple qu’ils ont trompé. Et, maintenant, voici le résultat monstrueux de ce coup de force : l’impuissance face à une crise de l’euro qui menace son existence, un nombre croissant d’Etats mis sous tutelle financière et une Europe armée du gourdin du FMI qui livre les peuples aux banksters. On comprend donc que beaucoup de monde ait intérêt à l’amnésie.
A l’époque, François Hollande, qui appuyait le traité de Lisbonne en dépit du vote des Français, avait montré ses talents de visionnaire. Selon lui, le traité de Lisbonne permettrait de « sortir l’Europe de l’impasse ». Non seulement l’Union est dans un cul-de-sac, mais elle arrive maintenant face au mur. Incapables de faire demi-tour, les dirigeants européens conduisent l’UE à la catastrophe en voulant croire que le choc n’aura pas lieu.
En fait, le 29 mai suivi du coup de force du traité de Lisbonne fut fondateur pour les eurocrates. Le viol du non populaire a donné aux « euroligarques » le goût de l’impunité et de la récidive. Ce fut le prélude d’une série de violences inouïes. Avant le 29 mai 2005, l’Union européenne était a-démocratique. Depuis elle est devenue antidémocratique et autoritaire. Cette Europe obligea sans vergogne l’Irlande rebelle à revoter jusqu’à ce qu’elle dise oui. On y débattit de la suspension du droit de vote des pays – et donc des peuples – qui marcheraient hors des clous de l’austérité. On y adopta sans débat public la camisole de force du Pacte euro-plus qui impose l’austérité dans les politiques nationales. Avec notamment le recul de l’âge de départ en retraite et le gel des salaires. Pis, les budgets nationaux sont dorénavant soumis à un examen préalable de la Commission de Bruxelles. Au secours, « Mme Veto » est revenue ! Notre proposition de loi contre ce fait a pourtant été repoussée à l’Assemblée nationale par la droite et le PS. Les Etats nations sont désormais traités comme des colonies de la Commission, selon John Monks, alors secrétaire de la Confédération européenne des syndicats. La Grèce est aujourd’hui dépouillée par les banques comme un pays occupé.
La constitution européenne, devenue traité de Lisbonne, a ainsi mis l’Europe à la merci des marchés financiers au moment où ceux-ci allaient s’effondrer. A présent, ils se gorgent comme des tiques sur les peuples. Les articles du traité de Lisbonne placent en effet les budgets nationaux sous la dépendance des investisseurs internationaux. Ils interdisent le recours aux banques centrales pour financer les Etats. Ils empêchent toute limitation des mouvements de capitaux aux frontières de l’Union. De même que la politique néolibérale américaine est responsable de la crise des subprimes, le cadre néolibéral du traité de Lisbonne est responsable de la crise des dettes nationales. Après avoir éclaté en Grèce, elle est en train d’emporter toute la zone euro.
Six ans plus tard, d’aucuns veulent faire croire que le débat sur la nature de la construction européenne est derrière nous. Autruches ! En réalité, la crise actuelle oblige plus encore qu’en 2005 à rompre sans tarder avec le traité de Lisbonne. Il est urgent d’encadrer les mouvements de capitaux. Le traité de Lisbonne l’interdit. Il est urgent que la BCE organise la relance économique. Le traité l’interdit et lui enjoint de garantir la stabilité des prix au risque de l’asphyxie. Il est urgent d’en finir avec le libre-échange producteur de gaz à effet de serre et de dumping social et écologique. Le traité s’y oppose formellement. Il est urgent de relancer l’économie utile. Le traité de Lisbonne rejette les aides publiques et oblige à une libéralisation des services publics. Tout ce qui est nécessaire est interdit, tout ce qui est mortel est obligatoire.
On ne peut rien attendre de la bande d’illuminés fanatiques des dogmes libéraux qui conduisent nos affaires à l’abri d’un traité archaïque. Finalement, l’anniversaire du 29 mai nous conduit à une question. Serons-nous à nouveau capable de dire non ? La France trouvera-t-elle une fois de plus la force de refuser la voie sans issue dans laquelle les néolibéraux de l’Europe entière veulent l’enfermer ? L’énergie populaire est-elle toujours là qui conduisit à ce non majoritaire dans la gauche comme dans le peuple tout entier ? L’autre gauche a-t-elle encore la force de se rassembler pour faire d’un ensemble de forces dispersées un instrument de lutte capable de l’emporter face à tous les pouvoirs établis ?
Pour ma part, j’y travaille. J’ai vécu le 29 mai sur la place de la Bastille, avec Marie-George Buffet, Olivier Besancenot et José Bové. Cette campagne venait de provoquer à la fois ma rupture irréversible avec une social-démocratie incapable de contester le cours libéral et autoritaire de l’Union européenne et ma rencontre avec l’autre gauche. Elle permit ensuite la naissance du Front de gauche, outil de rassemblement grandissant. Ce que j’observe en ce moment en Europe me convainc que la force du 29 mai n’est pas morte. Les précaires et les jeunes sont en train de prendre la relève du combat contre le pouvoir des banques et des oligarques. Je suis certain que cette révolution citoyenne en marche touchera la France à son tour. A ce moment, nous vérifierons que la France saura renverser la table européenne en décidant de désobéir à ce traité illégitime pour mettre en œuvre de nouvelles politiques. Nous oserons. 

6 commentaires sur Six ans après le référendum de 2005, le «?oui?» meurt de honte

  1. Monsieur MELENCHON devrait savoir qu’en politique on ne meurt pas de honte !
    Au delà d’une juste réprobation sur la forme et sur le fond de l’adoption « aux forceps » de ce traité de Lisbonne,force est bien de constater que les principes fondamentaux de la Démocratie en France et en Europe partent en quenouille.Que dire de cette Belgique siège des institutions européennes, sans gouvernement depuis plus d’un an ,avec des ministres virtuels dont on se demande, qui, ils peuvent bien représenter ?
    A l’évidence la réponse à la question posée par Monsieur MELENCHON « serons-nous à nouveau capables de dire NON » ,dans un futur immédiat sera NON !
    Personnellement je fonde cette prévision sur un constat inqiètant : dans toutes les élections qui se sont fait jour ces cinq dernières années en Europe et dans les pays memebres , l’abstention est en hausse et tout laisse à penser que le second tour des présidentielles de 2012 en France n’échappera pas à cette funeste tendance !

  2. Merci d’ouvrir votre espace à J.L,Mélenchon, à J.P.Chevènement ou à N. Dupont d’Aignan, c’est à dire à quelques-uns de ceux qui ont le courage de s’extraire du théatre d’ombres du microcosme politique actuel ! Contre l’opinion dominante de leur parti d’origine, ils ont décidé de s’affranchir et de revendiquer le droit de contester l’Europe fédérale et ses funestes conséquences pour la République et la France. Hélas, aucun ne peut envisager un rapprochement stratégique ( et encore moins électoral ) avec les autres, certain qu’il serait alors accusé de dévoiement idéologique et considéré comme traître à son camp. Etre dissident parmi les siens, passe encore, mais pactiser avec ceux d’en face, impossible !…Et pourtant , par les temps qui courent, il s’agirait du destin national et de marcher ainsi sur les traces des membres de CNR qui ont oeuvré ensemble pour le BIEN du pays;
    en leur qualité de communistes, socialistes, radicaux, libéraux et conservateurs. Un tel rapprochement est-il impossible quand les citoyens, de leur coté, n’éprouvent pas les mêmes réticences et quand la contestation actuelle traverse, au sein du peuple, les frontières dressées entre la gauche et la droite.
    Se rapprocher, s’écouter, refonder la République sur les bases du Programme du CNR, voilà une belle ambition à mettre en oeuvre d’urgence pour sauver la République et la France !

  3. Bellenger // 31 mai 2011 à 11 h 22 min //

    Que je suis heureux de découvrir que le Parti de Gauche dénonce le traité de Lisbonne, copie du Traité de Maastricht. Ce dernier est le traité Fondateur de la Primauté donnée à la Finance, aux dépens du Politique. Ces derniers ont été incapables d’assumer eux-mêmes la gestion du pays, et ont cru bon de se démettre de leur primauté en faveur des financiers. Ils ont cru, comme Jacques Delors, que la vie économique se résumait à une circulation de monnaie, et qu’en conséquence, le mieux était de confier aux financiers les rennes du pouvoir. Quelle erreur ! Les financiers n’ont que l’obsession d’accumuler la richesse des autres dans leurs paradis fiscaux et de se payer la belle vie des aristocrates d’antan. Puisqu’ils sont incapables de comprendre que la monnaie, la finance, sont des outils de fonctionnement, comme le sang dans notre corps, eh bien, retirons-leurs cette primauté et élisons des hommes politiques plus compétents, qui sachent gérer et l’économie et la finance ; l’économie en laissant une part sous contôle à une certaine liberté d’entreprendre, et la finance, comme outil de fonctionnement de la bonne gouvernance.

    Et notre Démocratie toute délavée, retrouvera la bonne santé. Bravo, Mr Mélenchon. Il faut le dire tout haut. Car nous y parviendrons qu’en unissant nos efforts pour dénoncer en priorité le traité de Maastricht et leurs consorts d’avant et d’après Maastricht. Pour être plus précis et efficaces, nous devons inventer une Charte de la Vie en Société qui codifie la bonne hiérarchie entre Politique, Economie et Finance. Je la tiens à votre disposition. Pierre.Bellenger@wanadoo.fr

  4. Théodore // 30 mai 2011 à 11 h 42 min //

    Bravo M.Mélenchon . Tout est dit . Il n’y a rien ni à ajouter ni à retrancher.En dehors des forces politiques organisées, encore trop peu nombreuses et trop divisées qui combattent cette Europe du fric et des injustices , l’espérance est maintenant dans le peuple grec et les jeunes indignés espagnols qui , je l’espère, vont souffler vers la France , bien longue à démarrer , cet air de liberté qui, je le souhaite balaiera tous ces eurocrates euro satisfaits, jamais las d’appauvrir les peuples .

  5. saforcada david // 29 mai 2011 à 23 h 24 min //

    Mélanchon dit, parfois de bonnes choses, mais il devrait aussi se souvenir qu’il fut l’un des partisans de Maastricht qui fut l’un des nombreux prémices à cette europénisation que nous refusons …

  6. Brétagnol Michel // 29 mai 2011 à 17 h 50 min //

    Jean Luc voit juste et ce depuis longtemps. J’ai moi aussi,plus modestement, fais campagne pour le vote NON à ce Traité constitutionnel qui sur des points essentiels, nous a conduit du marasme accompli au très proche coma économique. Au demeurant, ce que dit Melenchon est, à diverses nuances près, ce que disent ou pensent les autres partisans du NON, à gauche, comme à droite. Le danger aujourd’hui, il vient du côté » de ceux qui de l’UMP au PS s’accrochent à un traité européiste qui ne peut engendrer que l’échec. En ce sens le traité de Lisbonne ne peut que nuire à la construction dans l’équité et le respect et le juste intérêt des Nations, d’une Europe qui serait celle non pas des technocrates néo libéraux mais celle des peuples. En 2012 je ne pourrai voter pour un ex partisan du OUI en 2005.

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