Tournée des “popotes” du Général en Algérie

 

la-tournee-des-popotes

Communiqué au sujet du voyage d’inspection militaire en Algérie* – 7 mars 1960

 

 

 

 

 

 

 

Le général de Gaulle a effectué, les 3, 4 et 5 mars, un voyage d’inspection militaire en Algérie.

Le président de la République a visité une quinzaine de postes dans le Constantinois, l’Algérois et l’Oranais. Partout, il s’est fait rendre compte en détail des opérations et a constaté que celles-ci se développaient d’une manière satisfaisante suivant le plan et d’après les ordres du général commandant en chef, malgré les à-coups que leur ont fait subir les mouvements de troupes imposés par les récents désordres d’Alger.

En chaque point, le général de Gaulle a réuni autour de lui les officiers pour leur préciser la mission d’ensemble de l’armée en Algérie, compte tenu des événements en cours et de ceux qui sont à prévoir.

Le Général, tout en notant les progrès constants de la pacification, a dit que rien ne pourrait être décidé par les Algériens quant au destin de l’Algérie tant que se prolongeraient les combats et les attentats. On sait qu’une proposition avait été faite et plusieurs fois répétée publiquement à l’organisation extérieure de la rébellion pour venir régler avec les autorités les conditions d’un cessez-le-feu. Cette proposition est maintenue. Mais aucune suite pratique ne lui ayant été donnée par ceux à qui elle s’adressait et rien n’annonçant de leur part un changement d’attitude, il faut que l’armée achève directement le rétablissement de l’ordre. L’affaire est en très bonne voie, mais non encore à son terme. Entière confiance est faite au commandement, aux troupes et aux services pour l’achever par un succès complet.

Le président de la République a indiqué que, l’ordre une fois revenu, il faudra que l’Algérie reprenne une vie normale, ce qui impliquerait une période d’apaisement à tous les égards. Après quoi les Algériens, dans l’égalité complète des droits, choisiront en toute liberté ce qu’ils voudront devenir.

Trois solutions s’offriront à eux. Ou bien revenir à la domination directe pratiquée par la métropole depuis la conquête. Le Général a déclaré qu’à son sens ce serait impossible. Ou bien passer à la sécession, qualifiée par certains d’indépendance. Ce serait, pour les Algériens, se condamner eux-mêmes au chaos, car, actuellement, il n’y aurait point de vie ni de développement concevables pour l’Algérie sans la France. D’ailleurs, un million de Français de souche habitent l’Algérie. Ils y sont indispensables et ont le droit d’y demeurer. En outre, et de toute manière, beaucoup de musulmans voudront rester avec la France. Il faudrait donc, ans cette détestable hypothèse, procéder à un vaste regroupement de populations sur des portions de territoire, ce qui entraînerait pour l’avenir de l’Algérie de très graves conséquences. Enfin, quatre cent mille Algériens musulmans ont leur travail dans la métropole et en trouveraient difficilement ailleurs. Le général de Gaulle tient pour exclu qu’il puisse y avoir en Algérie une majorité pour voter la sécession.

Dès lors, ce qui est probable, c’est une Algérie algérienne, liée à la France et unissant des communautés dont on sait combien elles sont diverses. Les institutions de cette Algérie-là et ses rapports avec la France drivent être évidemment élaborés, discutés et proposés. Il faudra le faire ï loisir et sans exclure aucune tendance afin de tracer une solution qui soit pratique et solide. Ainsi, les Algériens pourront-ils choisir en toute connaissance de cause l’une des trois solutions.

Le général de Gaulle a déclaré qu’en attendant cette échéance, l’armée n’a rien à faire que d’accomplir sa mission, qui consiste à poursuivre et à achever les opérations, à multiplier les contacts humains avec les populations, à aider celles-ci dans la situation cruelle où elles se trouvent plongées. D’autre part, le Général a appelé l’attention des officiers sur le fait que le problème algérien, si important qu’il soit, n’est que l’un de ceux qui se posent à la France à l’intérieur d’elle-même et au-dehors et dont la portée va croissant dès lors que notre pays est redevenu une puissance mondiale dans un univers dangereux. Il faut donc que l’armée, tout en accomplissant sa tâche actuelle en Algérie, ait également l’esprit fixé sur les missions qui pourraient lui incomber ailleurs. C’est à ce devoir d’ensemble, et non point seulement à une phase locale et momentanée, que l’armée française doit s’adapter et se préparer moralement et matériellement.

* Ce texte a fait l’objet de nombreuses rectifications manuscrites du Général

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*