Rapport Guérini : Aubry dans le déni

 

 

 

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Le rapport Montebourg sur la gestion Guérini semble gêner le PS aux entournures. Il y a deux semaines, le secrétaire à la rénovation socialiste, Arnaud Montebourg, révélait à Mediapart avoir transmis un rapport sur l’état de la fédération des Bouches-du-Rhône à Solférino. Selon ses dires, «l’entourage direct de la première secrétaire a refusé ne serait-ce que d'(en) accuser réception».

Après avoir renvoyé le document à François Lamy le week-end du 20 février, celui-ci a été rendu public mercredi sur le site du Point, alors que depuis l’étau judiciaire se resserre sur Jean-Noël Guérini (Photo). Guérini a décidé de contre-attaquer lors d’un grand meeting tout à sa gloire le 18 février.

Mais l’électrochoc n’est pas parvenu, semble-t-il jusqu’à la direction du PS. Martine Aubry, interrogée ce jeudi, a même osé affirmer au Point: «Il n’y a rien dans ce rapport, pas un élément concret, précis, pas un fait.» «Aujourd’hui, je lis des choses dans la presse, des rapports d’écoutes, mais rien de précis ou de répréhensible… Il faut laisser faire la justice. Pour l’instant, Jean-Noël Guérini n’a même pas été entendu», a ajouté Martine Aubry.

Joint par téléphone mardi, avant même la divulgation du rapport par la presse, François Lamy, député et «conseiller spécial» de Martine Aubry au siège du parti, expliquait déjà à Mediapart: «Honnêtement, il y a beaucoup de déclamatoire et on est dans l’affirmation plutôt que dans les preuves, face à une grande fédé populaire, avec ses avantages et ses inconvénients. Et franchement, nous expliquer que les grands élus ont du poids sur les fédés ne justifie pas en soi une mise sous tutelle.»

Pour ce proche de la première secrétaire, du point de vue du fonctionnement du parti, tout roule. «Les Bouches-du-Rhône relaient les campagnes nationales, participent à la préparation des primaires et ne sont pas sujettes à des problèmes de trésorerie», explique Lamy.

Quant au contexte judiciaire qui entoure aujourd’hui Jean-Noël Guérini, et alors même qu’il devra être réélu à la présidence du conseil général à la fin du mois de mars, après les cantonales, Solférino préfère rester à l’écart de l’instruction. «Je rappelle que les condamnations par voie de presse n’existent pas dans le droit français, dit Lamy. Les écoutes judiciaires, dont on ne sait pas après tout si elles sont vraies, ne peuvent constituer des éléments nous amenant à une prise de décision. De plus, Jean-Noël Guérini n’a pas encore été entendu, et on peut aussi se poser des questions sur les liens qu’entretient la droite avec la presse locale.»

Et Lamy se retrouve du coup sur la même ligne que Guérini. Jeudi matin, un communiqué du Conseil général des Bouches-du-Rhône annonce le dépôt d’une plainte pour diffamation visant Arnaud Montebourg. «Cet élu qui se prend pour un procureur, tient des propos péremptoires sur le Conseil général des Bouches du Rhône, sa gestion et son fonctionnement. Son attitude, digne d’un inquisiteur, est inacceptable», assène le communiqué.

«Contrairement à ce qu’il écrit, la fédération du parti socialiste des Bouches-du-Rhône, actuellement mobilisée par la préparation des élections cantonales des 20 et 27 mars, se porte bien. Au cours de ses dernières années, elle a renforcé ses positions et de grands élus gèrent avec rigueur de grandes collectivités, en apportant une attention constante aux préoccupations des habitants», poursuit le texte.

«Pression sur les élus»

L’état des lieux dressé par Montebourg, à la suite d’une visite en juin dernier dans la fédération des Bouches-du-Rhône, est pourtant accablant. Il décrit une fédération, totalement sous la coupe du conseil général des Bouches-du-Rhône, «machine à distribuer des postes d’élus ou d’employés», où les militants réfractaires peuvent être menacés, évoquant un «clientélisme féodal où la soumission et le culte du chef ont désormais cours».

«Un élu résistant aux méthodes du président m’a fait part de faits de menaces physiques et d’intimidations de la part d’un homme armé se présentant comme défenseur des intérêts du président du Conseil général. Un haut fonctionnaire du Conseil général des Bouches-du-Rhône a expliqué à l’un de ses collègues et confident qu’il avait lui même été menacé ainsi que son épouse et ses enfants, parce qu’il avait refusé de suivre certaines procédures peu orthodoxes. A chaque fois ce sont des hommes apeurés qui s’expriment», écrit Montebourg.

Le secrétaire national à la rénovation, et candidat aux primaires socialistes, évoque aussi une réunion organisée à Marseille en mars 2010 avec les élus socialistes du conseil municipal, au cours de laquelle Guérini aurait menacé ceux qui seraient trop bavards avec la presse. «Je sais avec qui vous parlez, je sais quels journalistes vous voyez, j’ai même le texte de vos SMS…», aurait-il dit. Guérini «accusa deux de nos camarades (…) d’être actionnaires de Bakchich, le site d’information satirique qui a révélé l’existence de l’enquête sur les marchés publics», raconte encore Montebourg.

Le responsable socialiste estime aussi que «l’argent public y (au conseil général, ndlr) est notoirement utilisé pour faire pression sur les élus socialistes afin de s’assurer de leur soutien sans faille -pour ne pas dire leur docilité- quand il ne s’agit pas de leur silence»

 

Rapport Fédération Socialiste

La fin des «bonnes blagues» entre hiérarques ?

De fait, et c’est peut-être le plus terrifiant dans cet épisode, le rapport Montebourg ne révèle rien qui ne soit parfaitement connu par la totalité de tous les dirigeants socialistes depuis une dizaine d’années. Mais pour la première fois, les motifs à «bonne blague» des discussions entre hiérarques aussi cyniques que désabusés, en marge des réunions du PS, sont couchés sur le papier d’un document interne.

A l’instar des menaces physiques ou financières faites aux élus émettant quelques doutes sur le système en place. «Il semble quand même que Jean-Noël soit devenu un peu moins “violent” depuis quelque temps, dans ses relations avec les autres», nous déclarait il y a deux semaines un membre du cabinet de Martine Aubry.

Quant à l’anomalie statutaire ayant vu «Jean-Noël Guérini s’autoproclamer président de la fédération en février 2010», alors même que ce titre n’existe pas et que son mandat à la tête d’un exécutif départemental lui interdit de diriger une fédération, là-aussi François Lamy plaide «le pragmatisme»: «C’était un moyen de rassembler après les divergences qui avaient opposé Michel Vauzelle (président de la région PACA) et Jean-Noël Guérini. Et personne alors n’y avait trouvé à redire…»

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