Dominique de Villepin, l’autre visage de la droite

 

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Comme l’ont démontré les travaux de René Rémond, il y a en France non pas une mais des droites. Si la création de  l’UMP en 2002 a contribué à figer un peu plus encore la représentation que l’opinion publique peut s’en faire, la droite n’en reste pas moins plurielle. Confrontés aux dérives du sarkozysme, les Français éprouvent, confusément, le besoin que s’affirme une autre voix. Ils savent que doit exister une alternative et qu’il serait dangereux pour la démocratie française que la droite soit réductible à la seule idéologie présidentielle.

Thème de prédilection du chef de l’Etat, l’insécurité ne lui a d’ailleurs guère profité cet été, tant s’en faut. Le Figaro n’a pourtant pas ménagé sa peine en publiant une enquête d’opinion des plus favorables aussitôt contredite par Marianne. Qu’il faille réaffirmer l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire, nul ne le contestera. Qu’il faille se montrer intransigeant quant au respect des règles qui fondent toute vie en communauté, chacun y adhérera. L’insécurité continue ainsi d’interroger nos manquements et les faiblesses de notre société. Reste que Nicolas Sarkozy dans son approche, radicale, de la question crée de la tension, du ressentiment aussi. Lequel pour être antérieur à son élection en mai 2007, procède de l’accumulation de facteurs aggravants (échec scolaire, précarité, entassement urbain, absence de perspectives). La violence et la haine pour être inhérentes à la condition humaine ne prospèrent que parce que nous y avons maintenu des individus que nous savions déjà fragilisés et exposés. En cela, comme le rappelle le socialiste Lionel Jospin dans Le Monde du 23 août, le sarkozysme équivaut à une démission de l’Etat. Pis ! Il sécrète l’insécurité qu’il prétend combattre et permet à la haine de l’Autre de prospérer.

C’est pour cette raison, notamment, que Dominique de Villepin représente aujourd’hui, par son attachement au pacte républicain, l’homme dont la droite et la France ont besoin. Il est l’autre droite, celle qui croit encore possible de mener tout à la fois une ambitieuse politique économique et une audacieuse politique sociale. 

Si le gaullisme n’a pas survécu à la démission du Général en 1969 et le néo-gaullisme au départ de Jacques Chirac, sans doute n’est-il pas vain d’en évoquer ici l’essence afin de comprendre la rupture à l’œuvre à droite depuis mai 2007 et de voir en quoi la pensée du candidat Villepin, en phase avec les exigences d’une France placée dans la course à la mondialisation, y fait écho. Nous reproduirons pour cela des extraits de l’ouvrage de René Rémond, Les droites aujourd’hui.  

Morceaux choisis :

« Le gaullisme tel que le conçoit son inspirateur comporte une dimension sociale -un élément, entre autres, qui interdit de le confondre avec la droite libérale ou la droite conservatrice. Si elle peut jeter une passerelle en direction de la gauche, la volonté de réduire les inégalités sociales ne procède pas tout à fait des mêmes postulats ni des mêmes motivations (…) Cette vive et sincère préoccupation sociale s’inscrit dans le prolongement de sa pensée proprement politique : elle fait corps avec sa passion de la grandeur de la France et son idée du rôle de l’Etat. (…) la cohésion sociale est une condition de son unité. L’une ne va pas sans l’autre (…) Aussi, est-ce la responsabilité de l’Etat que de combattre les facteurs de division et de dissolution du corps social

Dominique de Villepin ne dit rien d’autre lorsqu’il affirme que notre « modèle social est le ciment de l’unité nationale ».

« Le souci de la justice n’est pas absent du gaullisme, mais il a été suscité plus par l’enseignement social de l’Eglise catholique que par la lecture des philosophes du marxisme ou des sociologues des diverses écoles socialistes. (…) A l’Etat d’assurer, avec le concours du peuple, qui lui donne sa légitimité, l’unité et la justice en s’employant à réduire les inégalités héritées de la naissance ou engendrées par l’évolution, et à instaurer une répartition moins inéquitable des fruits du travail pour tous. »

Villepin y fait référence en déclarant : « Choisir la République, c’est vouloir la réconciliation ».

« Le gaullisme rejette le collectivisme, qui confisque les libertés essentielles et qui ferait régner un régime d’oppression sur toute activité, comme il écarte le capitalisme libéral, dont il critique le primat du profit et qui sacrifie l’intérêt général à celui de groupes mieux organisés. »

Cette lecture du rôle du politique selon Charles de Gaulle s’accommode mal de la théorie du désengagement de l’Etat si chère à Nicolas Sarkozy. Alors, bien sûr, Villepin élu président de la République devrait tenir compte du réel, des conséquences de la crise financière sur le tissu économique, de l’envolée de la dette et de la crise de l’Etat-providence. L’ancien Premier ministre a néanmoins pour lui de communiquer sur la cohérence et la rigueur que suppose l’action politique. Il ne promet pas le grand soir mais plus simplement le retour à une France du mérite où l’effort est équitablement réparti.

Lorsque l’actuel chef de l’Etat représente aujourd’hui une France rétrécie, Villepin exalte le génie français. Enfin, par son style, sa culture et son assurance, Villepin est la France, ou du moins, celle qui continue d’émerveiller les étrangers par la richesse de son Histoire et de son patrimoine.

Emmanuel GAILLARD


Voir René Rémond, Les Droites aujourd’hui, Paris, Points Seuil, 2007.


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