La mise sous perfusion de la Grèce ne sert à rien…

 

 

 ndaA1

L’annonce par le gouvernement français qu’il pourrait engager jusqu’à 6,3 milliards d’euros pour sauver la Grèce du défaut de paiement, s’ajoute aux monceaux d’argent déjà mobilisés pour venir en aide à un système à bout de souffle : des dizaines de milliards pour les banques et le secteur automobile, sans même parler des subventions qui seront versées bientôt aux compagnies aériennes pour éponger l’interruption du trafic pour cause de nuage volcanique…

Bien sûr, à chaque fois on assure le contribuable que cet argent est dispensé sous forme de prêts, qu’on aurait plus à perdre qu’à gagner de laisser couler les uns ou les autres, que des contreparties importantes ont été obtenues, etc.

Mais, à la vérité, dans chacune de ces opérations, ledit contribuable éprouve rapidement le désagréable sentiment que le compte n’y est pas et, malheureusement, la suite des événements lui donne bien souvent raison. On se souvient en particulier de la quantité insuffisante de crédit alloué par les banques aux particuliers et aux PME, l’Etat ayant refusé d’y renforcer son contrôle en entrant dans les conseils d’administration. On pense aussi aux projets de délocalisation de Renault vers l’Europe orientale, malgré les subsides versés par la puissance publique. On pense enfin, à l’autre bout de la chaîne, aux sempiternelles restrictions imposées au citoyen à travers la politique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, une politique de fausse économie permettant au gouvernement d’économiser 500 millions d’euros par an au prix d’une désertion de l’Etat très coûteuse dans ses répercussions.

On a ainsi le sentiment que la puissance publique s’empresse de délier à chaque occasion les cordons de la bourse pour voler au secours, sans réelle contrepartie, d’un système qui nourrit les problèmes plus qu’il ne les résout. Le cas de l’aide accordée par les pays de l’UE à la Grèce ne fait pas exception : en cherchant à sauver la monnaie unique à coup de milliards d’euros, les pays de l’eurozone, France en tête, contribuent à alimenter un problème qui est d’abord celui des Grecs mais aussi le leur.

Ainsi que je l’ai déjà souligné, porter à bout de bras la Grèce sans lui permettre de dévaluer ne servira à rien, car jamais dans l’histoire un pays a pu relancer son économie par une politique d’austérité sans dévaluation (ce que l’euro empêche, par définition). Le fiasco du « Bloc or » de Pierre Laval, au début des années trente, en demeure la preuve la plus cinglante, hélas ignorée par nos élites.

Ensuite, même si on parvient de la sorte à rassurer momentanément les marchés sur l’avenir de la Grèce (à supposer que des troubles sociaux majeurs ne s’invitent pas dans la dance d’ici-là), il y a fort à parier que ceux-ci, à juste titre toujours aussi peu convaincus de la solidité de l’eurozone, en mettent à l’épreuve d’autres « maillons faibles » comme le Portugal, l’Irlande, l’Espagne, voire l’Italie… Que pourront faire alors les autres pays membres ? Lever de gigantesques prêts jusqu’à se mettre eux-mêmes dans la situation de leurs « protégés » ? Le tout, alors que la situation économique des pays « malades » ne sera pas redressée, bien au contraire, sous l’effet des politiques de déflation généralisées impulsées sous la baguette de Berlin…

On le voit, en prétendant faire sortir par la porte le scénario du défaut de paiement en cascade des pays les plus fragiles, on risque de le faire rentrer par la fenêtre au détriment de tous les membres de l’euro, même les plus solides. D’autant que la recette que veut appliquer l’Allemagne à la Grèce concerne autant les autres pays de l’eurozone, forcés de s’aligner sur la stratégie germanique de réductions des coûts de main d’œuvre pour tenter de maintenir leurs parts de marchés dans l’UE (leur premier marché à l’export, il faut le souligner)…

De quelque côté que l’on se tourne, force est ainsi de constater que c’est pure folie de maintenir le système actuel de la monnaie unique sous perfusion, de la même manière que les Danaïdes du mythe grec s’efforçaient en vain de remplir des tonneaux percés ! On ferait mieux d’acter une fois pour toutes, avant qu’il ne soit trop tard, que ce système, fondé sur la négation des faits nationaux, c’est-à-dire de la réalité elle-même, est insensé et suicidaire.

Quelle est la solution ? Pour la Grèce, il est évident que tôt ou tard elle devra quitter l’euro et dévaluer sa monnaie nationale restaurée, afin de rétablir sa compétitivité. Pour les autres, la voie de la sagesse résiderait, encore une fois, dans l’instauration d’une monnaie commune remplaçant la monnaie unique, permettant à des monnaies nationales, au sein d’une alliance monétaire européenne les surplombant, de s’ajuster les unes par rapport aux autres selon les fluctuations des économies respectives.

Plutôt que de jeter comme aujourd’hui 6,3 milliards d’euros par la fenêtre, la France pourrait alors, comme tous les autres pays européens, mobiliser ses efforts au service de sa prospérité et de son bien-être.

 

… laissons-la pour son bien quitter l’euro 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*