Sarko show, l’enfumage en temps réel…

 

  • source : Marianne2
    La rédaction de Marianne2 se mobilise pour rapporter et commenter en direct la prestation du Président de la République sur TF1.

 

clip_image00920h54 : Sur Proglio, Sarko passe son tour

C’est le dossier de la semaine. Proglio cumule les casquettes et pourtant le chef de l’Etat a décidé de passer son tour face à Laurence Ferrari. Sa défense ? « Monsieur Proglio n’était pas candidat » ! Il faut donc comprendre que c’est le gouvernement qui est venu le chercher ? Curieuse défense, tout de même ! Mais Nicolas Sarkozy sait y faire. Selon lui, lui et son gouvernement ne sont pas les seuls responsables : les parlementaires de l’opposition, via la Commission des finances, ainsi que les organisations syndicales, auraient approuvé ce choix. L’occasion, une nouvelle fois, pour Nicolas Sarkozy de saluer perfidement « le grand sens des responsabilités » des organisations syndicales. De quoi jeter la suspicion sur les dirigeants des grandes confédérations.

L’enfumage commence : car non seulement on n’a pas souvenir que l’opposition ait tant que ça approuvé cette nomination. Mais surtout Jean Arthuis, un sénateur de la majorité avait émis, lui, des réserves dès le départ sur le cumul entre EDF et Véolia.

 

Mais Nicolas Sarkozy sait y faire pour rejeter la faute sur les autres. La question du salaire d’Henri Proglio augmenté de 45% il la chasse d’une pirouette adressée à Laurence Ferrari : « On pourrait vous demander votre salaire » ! Vicieux…

Mais Laurence Ferrari le mérite-t-elle son salaire ? La femme-tronc de TF1 a tout simplement oublié de le questionner sur la retraite chapeau dont pourrait bénéficier Henri Proglio en quittant Véolia…

 


Nicolas Sarkozy défend Henri Proglio

20h58 : Un jeune sur quatre au chômage ? Sarko comme Pernaut ont tout faux
A la question de Nathalie, jeune chômeuse de 26 ans, Nicolas Sarkozy s’insurge : « un jeune sur quatre est au chômage ! ». Un chiffre alarmant mais totalement faux comme l’a montré Marianne2 à plusieurs reprises.

En réalité, le chiffre de Sarkozy ne concerne pas tous les jeunes mais uniquement les jeunes de moins de 26 ans travaillant ou cherchant un travail. Les étudiants, la majorité de l’effectif sont donc exclus de son calcul.

Exemple si tous les jeunes de France étaient étudiants sauf un qui pointe à Pôle Emploi, avec le raisonnement de Sarkozy, il y aurait 100% de chômage chez les jeunes. Exemple donné par le journaliste Jean-François Couvrat sur son blog. Et si on prend en compte tous les jeunes scolarisés ou non, la part des chômeurs n’était que de 7,3% en 2007 selon Eurostat soit seulement 0,2% de plus que la moyenne de l’Europe des 15.

21h19: Les prêts aux entreprises et aux ménages: une statistique bidon

Excellent collectionneur de satisfecit, le Président s’est accordé un quitus sur la relance de l’activité bancaire. Après avoir consulté « avant de venir », les statistiques sur les crédits, Sarkozy affirme qu’ils ont augmenté de 3,2% pour les ménages et de 1,2% pour les entreprises. 

En outre, les prêts aux sociétés non financières pour septembre, octobre et novembre 2009 font apparaître une baisse de 2,7% (statistiques de la Banque de France). Le chiffre donné par le Président vient sans doute de données plus récentes.

Mais là encore, il se moque du monde : la comparaison porte sur la fin de l’année 2009 par rapport à l’année 2008, c’est-à-dire au pire moment de la crise. Cela signifie que malgré l’usine à gaz mise en route pour soutenir les banques, malgré les réunions et les admonestations des patrons de banques, celles-ci ont augmenté leur en-courts dans des proportions minuscules par rapport au moment où la pénurie de crédits était la plus forte ?

Nicolas Sarkozy répond…
 

 

21h25: Vers un protectionnisme écologique ? 

« Nous allons nous battre pour qu’aux frontières de l’Europe, il y ait une taxe carbone », ce qui permettra de « rééquilibrer la concurrence aux frontières. » A rebours de son conseiller spécial qui s’y déclare opposé chaque fois qu’il intervient dans un débat public, le Président s’est prononcé pour une sorte de protectionnisme européen : « La préférence communautaire », a-t-il ajouté, « ce n’est pas un gros mot ! »

Le problème est que cette proposition-là n’est guère nouvelle : Nicolas Sarkozy l’avait déjà évoqué cet automne. Mais il n’a rien à nous dire de plus aujourd’hui, car le dossier n’a pas avancé d’un iota, la plupart des dirigeants européens étant hostiles à toute mesure protectionniste. Les Allemands notamment craignent qu’une telle politique ne suscite des représailles parmi les pays importateurs.

21:38: 62% des chômeurs en fin de droits se retrouveront « sans rien »

Un million de chômeurs arrive en fin de droits à la fin de l’année. Mais Nicolas Sarkozy a assuré, face à Laurence Ferrari, que ces chômeurs se retrouveraient pas « sans rien » sans annoncer de mesures supplémentaires.

Sauf que, comme l’a montré Marianne2, seulement 38% de ces chômeurs en fin de droits auront le droit à une aide sociale. 16% toucheront à l’Allocation spécifique de solidarité, 22% au RSA. Une rencontre aura lieu le 15 février avec les partenaires sociaux.

21h57: les boursiers ne sont pas tous pauvres !

Face à Rex, un informaticien issu de « banlieue », le chef de l’Etat a assuré qu’il y aurait 30% de boursiers dans les classes préparatoires. « Et ils viennent de quels quartiers les boursiers ? De vos quartiers ! », a-t-il demandé en interpellant le jeune informaticien. Sous-entendant que les boursiers étaient forcément issus des milieux populaires.

Faux. Comme l’a montré Marianne2, il existe par exemple des bourses dites « taux zéro » (qui ne donnent droit à aucun versement financier) et qui sont ouvertes à des élèves issus de familles dont le « revenu du foyer fiscal » peut atteindre un peu plus de 90 000 euros bruts, soit 7 500 euros mensuels !

Conclusion: Le candidat président est devenu président-candidat

Au total, le président s’est promené ce soir dans une émission que l’on croirait bâtie sur mesure pour un bonimenteur. Le tour de chauffe avec Laurence Ferrari n’a duré que dix minutes. Juste le temps d’évoquer, en vrac, l’affaire Proglio, les retraites, le chômage, Haïti, l’identité nationale, la guerre en Afghanistan. Avec autant de sujets en quelques minutes, Laurence Ferrari ne pouvait que passer les plats à son interlocuteur. C’est d’ailleurs ce qu’elle fait sans se départir de son sourire figé, comme collé à son faciès…

Les Français de base pouvaient-ils se montrer plus percutants ? Dans la structure même de l’émission, le Président répond avec affection — il nomme les femmes par leur prénom et donne du Monsieur aux hommes — et s’évade dans les généralités. Chaque sujet est l’occasion de dire que la situation est dure, qu’il fait de son mieux, qu’il fallait bien faire ce qu’il a fait, que ça serait bien pire s’il n’avait pas été là, qu’il entend bien les doléances de chacun, mais que, comme il est le Président de tous il remet la France sur les rails en tenant compte de l’intérêt général, etc.

Pourtant les Français présents se sont montrés peu complaisants, parfois même pugnaces et irrévérencieux. Pierre Le Ménahès, un syndicaliste CGT de l’automobile lui a demandé ce qu’attendait le pays pour taxer les revenus financiers. La productrice de lait Sophie Poux  l’a interrompu à plusieurs reprises pour lui signifier la gravité de la situation vécue par les agriculteurs. Bernadette, l’employée de la grande distribution a contredit le président qui prétendait que compte tenu du revenu du foyer — 3 000 euros par mois — et de ses trois enfants, elle ne devait pas payer d’impôts. Faux, rétorque la brave dame, elle en paye. Bon, le Président revient à la charge en s’efforçant de lui proposer des heures sup. Caramba, encore raté ! La brave dame répond que son employeur les refuse. Sarko propose alors de descendre sur le terrain et de prendre langue avec lui pour le convaincre de les refiler ces putains d’heure sup (merde alors !). Il n’y a aucune raison que votre employeur refuse les heures supplémentaires.

Vient Monsieur Berthelot, artisan à la retraite qui survit avec 400 euros par mois et se trouve donc contraint de travailler. Lui va peut-être crever la bouche ouverte, mais les Français doivent se rassurer : grâce à un projet de loi sur la protection du patrimoine, Nicolas Sarkozy lui annonce que ce qui lui est arrivé ne pourra plus arriver à aucun Français. Ce qui lui fait une belle jambe à monsieur Berthelot…

Face à ces Français accrocheurs — en tout cas plus que les journalistes — le Président est remonté sur son petit poney de candidat. Il a manifesté, comme lorsqu’il était en campagne, de l’empathie pour tous ces cas personnels que TF1 lui a jetés en pâture. Ils sont soit « courageux », soit « sympathiques », soit « dynamiques », etc. Le Président a, en somme, tenté de retrouver les sensations du candidat. Il s’est, avec eux, indigné des lenteurs de la bureaucratie française, de la frilosité des banquiers, du gaspillage des administrations, des préjugés des patrons. Avec un tout petit souci : en 2007, le candidat Sarko clamait partout qu’il fallait une rupture avec Chirac. En 2009, et, plus encore, en 2012, la rupture, ce sera avec qui ?

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