L’œuvre inachevée du général de Gaulle

Le Général de Gaulle fût le libérateur de la Patrie. D’abord contre les ennemis internes de la nation, « la France trahie par ses élites dirigeantes et par ses privilégiés » et cela grâce aux sacrifices de Français restés en France, à qui il a su faire partager sa foi dans notre pays, « mais le coté positif de mon esprit me convainc que la France n’est réellement elle même qu’au premier rang » Quel partage, depuis des années, quelque chose de fort, unit à nouveau les Français, autre chose que l’esclavage partagé pendant trop longtemps. Nous pouvions enfin lever la tête et dire NON.
H. Fouquereau, Secrétaire Général du Forum pour la France

 

  • Gaullisme.fr vous propose ci après le texte d’Henri Fouquereau – secrétaire général du Forum Pour la France – prononcé lors d’une conférence sur les grandes œuvres du Général de Gaulle, texte enrichi par des articles – du site www.gaullisme.fr – sur certains points (lien en rouge)

1degaulle1300x247_thumb Le Gaullisme, auquel je suis viscéralement attaché, n’est pas non plus suffisant. Ma participation à votre débat provient plutôt de mes fréquentations, entretenues avec des Gaullistes, maintenant dénommés « historiques ».

Henri Duvillard, le premier, longtemps Ministre des anciens Combattants, il œuvra, avec le regard approbateur de Madame De Gaulle, pour que la Croix de Lorraine domine Colombey. Le Président Jacques Chaban Delmas et son équipe, Jean Charbonnel à qui le Général avait confié le secrétariat d’Etat aux Affaires étrangères et le Président Pompidou celui de l’industrie, Léo Hamon, grand résistant, porte paroles du Gouvernement, grâce à qui j’ai pu déposer un projet entre les mains de Pierre Béregovoy, un projet devenu loi.

Puis, Pierre Lefranc, LE grand compagnon de route du Général. Il a, vous le savez tous, remonté les Champs Elysées le 11 novembre 1940, pour aller déposer une gerbe sur la tombe du soldat inconnu, à la tête d’un groupe d’étudiants dont certains portaient une gaule sur chaque épaule, deux personnalités que j’ai bien connues, ont participé à cette épopée : Alain Griotteray, et Jacques Dauer ; mon ami malheureusement disparu, fondateur et Président de l’Académie du Gaullisme, personnage truculent, qui raconta qu’il avait refusé un Ministère, pour la seule raison qu’il ne pouvait pas l’installer dans un bistrot. Grand moment d’histoire, que cette épopée, qui a éveillé en France et sans nul doute, l’esprit de résistance. Nos amis furent mitraillés, quelques-uns emprisonnés. Pierre Lefranc a été enfermé à Fresnes, d’où il est sorti pour regagner Londres. Il est membre du Haut conseil pour l’indépendance et la souveraineté de la France, un Conseil de sages qui supervise le Forum Pour la France, dont je suis le secrétaire Général.

Je travaille très souvent, avec l’Ambassadeur de France, Pierre Maillard, Conseiller diplomatique du Général de Gaulle de 1959 à 1964 et avec le Général Gallois, père de notre stratégie nucléaire, le géopoliticien de notre époque, avec qui j’ai tellement appris. Ces deux « historiques » sont souvent mes invités lors d’une émission de radio que j’anime chaque mois. Et puis nous avons Pierre Messmer ; Pierre Lefranc, Pierre Maillard, Etienne Burin des Roziers , secrétaire Général du Général à l’Elysée, Jean Foyer, Garde des Sceaux, le Général Gallois, Paul-Marie de la Gorce, et votre serviteur écrit un livre en commun « La Tragédie européenne et la France »

Chaque mois et pendant des années, certains anciens Ministres du Général : Lucien Neuwirt, Christian de la Malène, Gabriel Gaspereit, des proches collaborateurs, des anciens secrétaires généraux de l’Elysée, et votre serviteur, nous nous réunissions dans un restaurant parisien. J’ai, pendant ces moments privilégiés, beaucoup appris sur le Général, sa politesse, ses méthodes de travail, sur les relations qu’il entretenait avec ses collaborateurs.

Pendant ces déjeuners, je me suis aperçu, que chacun possédait SON Général de Gaulle, qui n’appartenait qu’à lui. Combien de fois ai-je entendu :Le Général m’a dit que .. Je pense, pour ma part, que le Général, dans les échanges avec ses collaborateurs, ne traitait que des sujets pour lesquels ils les avaient choisi. Seul, Pierre Lefranc, son compagnon de route, possède une idée plus large de ce que pouvait penser le Général. En effet, et il l’écrit dans son livre : « Gouverner selon de Gaulle » les Ministres, et même les plus grands, n’osaient pas s’adresser directement au Général, ils lui passaient leurs requêtes. Il recevait ainsi et seul, les approbations ou les désapprobations du Général.

Et puis, il y a le lieu mythique, celui ou se trouve le bureau du Général, au 5 de la rue Solferino, siège de la fondation ou quelques anciens collaborateurs du Général me sollicitent pour quelques petites réunions. Michel Anfrol a même permis que je fasse visiter le bureau du Général à des Gaullistes de conviction, dont certains sont dans cette salle aujourd’hui.

Autre rencontre avec un Gaulliste historique et grand héros de la France Libre, celui qui a abattu le plus grand nombre d’avions ennemis : Pierre Clostermann, disparu depuis peu, qui m’a raconté sa première entrevue, en Angleterre, avec le Général de Gaulle. Ce dernier lui a demandé d’aller s’habiller correctement, la tenue fantaisie que portait le jeune aviateur, n’étant pas inscrite dans les manuels du Chef de la France Libre. Enorme émotion que de rencontrer l’auteur du grand cirque alors que nous recevions Henry Kissinger venu à la Maison « de la France Libre » pour fêter avec nous, l’anniversaire du Général Gallois, Madame Marie France Garaud, Jean Foyer, Pierre Maillard et Pierre Clostermann, quelques amis du Général et votre serviteurs entouraient le Général Gallois et Henry Kissinger.

Voilà pour expliquer ma présence.

Maintenant, le Général et son œuvre : Pour préparer cette réunion, il m’a fallu répondre à la question principale, après l’avoir posée à un certain nombre de personnalités : quelle est la plus grande œuvre du Général de Gaulle ? A ma grande surprises, les réponses sont différentes, et même divergentes.

Pour certains, ce fut la stratégie et l’arme mécanique, proposées aux décideurs de la Troisième République, qui auraient pu, en les appliquant, éviter la guerre. Pour d’autres, la rupture avec l’esprit d’abandon et le départ à Londres, pour beaucoup c’est l’appel du 18 juin. Mais aussi la bataille pour libérer la Patrie, le gouvernement de 44, où celui de 58. Pour quelques-uns, la décolonisation, issue du discours de Brazzaville, qui changea la face du monde. Pour les constitutionnalistes, ce fut Bayeux et le projet constitutionnel. D’autres penchent pour Phnom Penh et la politique de non alignement, véritable colonne vertébrale de sa politique étrangère. Pour beaucoup ce fut la modernisation de la France, l’œuvre sociale, la participation.

En entendant ces réponses et en regardant des documents, ma vision sur le sujet a changée et maintenant, pour moi, l’œuvre est surtout :

· La résurrection du regard des Français sur la France qu’il a suscité et tout de suite après, le nouveau regard que le monde a posé sur la France grâce à lui : Grande page d’histoire.

Sa foi en notre dame la France qu’il a fait partager : « toute ma vie je me suis fait une certaine idée de la France, telle la princesse des contes ou la madone aux fresques des mûrs » il a été un Père missionnaire, j’y reviendrai, chargé de franciser tout ce qui a été possible.

Prenons l’ordre chronologique : d’abord « Vers l’armée de métier » œuvre dans laquelle il démontre qu’avec les chars qui bouleversent la tactique, la manœuvre est assurée. Alors que s’est-il passé ? Les politiques de l’époque ont eu peur d’effrayer la gauche pacifiste, ils ont fait creuser des tranchées qui ne servaient à rien, fortifier la ligne Maginot qui ne pouvait en aucun cas, garantir nos frontières à l’Est. La guerre aurait-elle ainsi pu être évitée ? Grande question, aucune réponse possible vu la folie de l’infâme. Mais dans tous les cas, les propositions du Général transformées en réalité, la guerre aurait pris une autre tournure et l’honneur de la Patrie n’aurait pas souffert à ce point.

actu60985717 Ensuite, il y a la démission de nos décideurs en juin 40 qui suscite aussitôt chez le Général la volonté de remettre la France dans la bataille. Ce de Gaulle, part à Londres, il est pratiquement seul, et fait penser au pauvre petit roi de Bourges. Mais quel courage, une fois de plus dans notre histoire, l’énergie, la volonté d’un seul, sauva l’essentiel. Sans cette volonté, de grands Etats auraient profité, non seulement de notre affaiblissement, mais surtout et à cause de la collaboration d’une partie de nos élites avec l’ennemi, poussé leurs intérêts au détriment des nôtres. Sans le Général de Gaulle, la France aurait été occupée par les Alliés par la faute de quelques-uns.

Quel temps perdu, quelle énergie dépensée par Monsieur de Gaulle, pour sortir la France de l’appétit d’un Roosevelt pour notre Empire. Tout cela à cause de son mépris complet de la souveraineté française, et de sa sympathie persistante pour le Maréchal, considéré par Roosevelt, comme un barrage contre le communisme.

N’oublions pas, que deux fois et officiellement, le Président des Etats-Unis a parlé de l’occupation de la France après la guerre et par ses troupes. Rappelons aux générations qui nous suivent, ce qu’était le projet AMGOT : « Des Préfets américains, formés aux Etats-Unis pour gérer la France. Une monnaie d’occupation imprimée pour remplacer le Franc, élément essentiel de notre souveraineté ». Si le Général ne s’oppose pas avec énergie à ce projet monstrueux, nous passions d’une occupation vert de gris, à celle des jeans délavés. Il a fallu qu’il bataille pour que le Général Leclerc, à la tête de la 2ème DB, délivre Paris. Mais il avait fallu auparavant que la France de de Gaulle, fasse ses preuves. Comme par exemple lorsque le Général Juin, à la tête de troupes françaises et de ses Tabors Marocains, prennent le Mont Cassin, et c’est l’immense victoire de Monte Cassino. Juin et ses troupes ont ouvert la route de Rome aux alliés, alors que ces derniers s’épuisaient contre des Allemands bien retranchés. Grande Œuvre du Général de Gaulle que d’avoir transmis sa foi à des Français qui offrirent leur vie pour leur pays. Il a su faire inscrire en lettres de sang l’épopée des Français :Keren Bir-Hakeim, « la nation a tressailli de fierté ;en apprenant ce qu’ont fait nos soldats à Bir Hakeim. Braves et purs enfants de France qui viennent d’écrire avec leur sang, une de ses plus belles pages de gloire » – puis le Fezzan, la Tunisie, la Corse, l’Italie, et enfin Paris, « Paris outragé, Paris brisé, Paris martyrisé. Mais Paris libéré, libéré par lui même, libéré par son peuple, avec le concours des armées de la France ». Jamais plus belles pages d’Histoire ne furent écrites par un homme pour être offertes au peuple de France. Puis ce fût Strasbourg, délivrée par les troupes du Général de Lattre de Tassigny, et n’oublions jamais, cerise sur le gâteau, la prise du nid d’aigle de l’infâme, par les troupes du Général Leclerc.

Le Général de Gaulle fût le libérateur de la Patrie. D’abord contre les ennemis internes de la nation, « la France trahie par ses élites dirigeantes et par ses privilégiés » et cela grâce aux sacrifices de Français restés en France, à qui il a su faire partager sa foi dans notre pays, « mais le coté positif de mon esprit me convainc que la France n’est réellement elle même qu’au premier rang » Quel partage, depuis des années, quelque chose de fort, unit à nouveau les Français, autre chose que l’esclavage partagé pendant trop longtemps. Nous pouvions enfin lever la tête et dire NON.

Ensuite, il a libéré la France contre ses amis. Rappelons nous une fois de plus : que Roosevelt en avril 44, donna des instructions à Eisenhower, en vertu desquelles, c’était au Commandant en Chef, c’est à dire à lui, Ike, qu’appartiendrait le pouvoir suprême en France. Heureusement le Général de Gaulle, grâce aux sacrifices des Français, au génie de la France, à ses propres actions, sans cesse renouvelées, a pu démontrer que les Français, et lui à leur tête, étaient non seulement capables de se gouverner eux mêmes, mais que les américains avaient besoin d’eux pour gagner la guerre et que notre volonté de bouter l’ennemi hors du territoire sacré de la patrie, était facteur de victoire : Eisenhower l’a enfin reconnu et déclara au Général « Pour la future bataille j’aurai besoin, non seulement du concours de vos forces, mais encore de l’aide de vos fonctionnaires et du soutien moral de la population française. Il me faut donc votre appui, je viens vous le demander » la messe est dite, le Général put à Bayeux, affirmer « que sur le sol des ancêtres réapparut l’Etat » le Général de Gaulle avait redonné à la France, son honneur et sa place dans le monde, aux Français à nouveau l(espoir dans leur pays et dans leur avenir.

Voilà une part de l’œuvre du Général de Gaulle.

Deux choses ensuite, dans l’ordre d’importance pour nos amis : le départ pour Londres , rupture, sans retour possible, avec l’esprit d’abandon. Le Général devient un rebelle, il sera condamné à mort pour cela. Puis il y a, l’appel du 18 juin venu du fond des âges, « Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra jamais. Les Français n’accepteront pas la capitulation ni la servitude, pour des raisons qui s’appellent l’honneur, le bon sens, l’intérêt supérieur de la Patrie … « Moi Général de Gaulle, j’entreprends ici, en Angleterre, cette tâche nationale ? Puis il y a les affiches placardées, qui diffuseront une phrase connue maintenant de tous : la France a perdu une bataille ; mais la France n’a pas perdu la guerre. Le Général entreprend à ce moment là, une tâche surhumaine, lutter contre les ennemis, contre les amis, il organise aussi la lutte de la nation contre l’empire, il sauve la France des oubliettes de l’histoire dans laquelle trop de gens voulaient la faire disparaître.

L’espoir est retrouvé, autre grande œuvre du Général .

Question avant de revenir aux œuvres Qui était le Gal de Gaulle ? Régis Debray nomme de Gaulle, le prophète de la nation, je parlais tout à l’œuvre du missionnaire de Gaulle, Régis Debray a raison, il s’agit du Prophète de la nation, et je ne résiste pas à citer encore Régis Debray sur la France, avec ce regret d’une période ou la France pesait encore, par le choix du mot juste, sur le cours des chose et du monde.

Puis, toujours dans l’ordre d’importance, le discours de Brazzaville 30 janvier 1944, ou furent énoncés, la reconnaissance du devoir accompli, l’œuvre civilisatrice de la France, son génie. Nous sommes loin des repentances exprimées ces dernières années. Mais le Général a aussi parlé de la condition de l’homme, il faut que chaque individu lève la tête, regarde au delà du jour et s’interroge sur son avenir, puis…si ces hommes « ne pouvaient s’élever peu à peu jusqu’au niveau ou ils seront capables de participer chez eux à la gestion de leurs propres affaires, c’est le devoir de la France qu’il en soit ainsi »

La route est tracée pour la transformation de l’Empire en Union française, le Général a imposé ce jour là, ce que l’avenir aurait imposer de toute façon : L’émancipation des Peuples, la souveraineté des Etats retrouvée, la liberté pour les hommes.

Bien évidemment, quelques 60 années après, ce discours, les termes employés, la volonté, la ligne désignée, celle de la décolonisation, tout cela paraît naturel. Mais à l’époque, oser toucher à l’empire et aux colonies, il fallait s’appeler Général de Gaulle pour dessiner, à ce moment là, cette vision qui allait à contre courant de ce que pouvaient penser les Français.

La décolonisation des États, la libération des Hommes, voilà une œuvre du Général et si l’on posait cette question à tous les hommes dans le monde : quel a été le plus grand pendant le 20ème siècle, Je pense que Notre Général trouverait facilement sa place sur les plus hautes marches du podium.

WWII VICTORY PARADE DE GAULLE Dans les œuvres réalisées par le Général, il y a sans aucun doute possible, les réalisations de son Gouvernement du 25 août 1944. Voici le Général arrivant au 10 de la rue St Dominique, qu’il avait quitté le 10 juin 40 et d’où il se mit à gouverner la France – Sa première impression : Rien n’a bougé, rien n’y manque, excepté l’Etat. « Il m’appartient de l’y remettre, aussi m’y suis-je installé » déclara le Général. C’est énorme, la seule prise de pouvoir sans qu’il y ait eu effusion de sang, ni contestation publiquement affichée.

Ce Gouvernement, qui durera du 25 août 44, au 20 janvier 46, donc 29 mois, moins 5 jours, personne à l’époque ne le sait encore mais il sera le record de longévité jusqu’en 1958.

Les œuvres de ce Gouvernement : droit de vote accordé aux femmes, rendez vous compte que ma Mère, comme beaucoup d’autres institutrices, sortie des écoles normales à la fin de la 3ème République, avait le devoir d’éduquer les enfants de la République, sans avoir le droit de voter. Un comble.

Et puis, il y a la transformation radicale de notre société avec l’ordonnance du 19 octobre 1944 par laquelle le Général de Gaulle institue la sécurité sociale. La plus grande réalisation de ce gouvernement et de l’époque. Il annule ainsi après des siècles de peur, l’angoisse du lendemain.

Soulignons de deux traits cette œuvre immense, qui renforce la nation, désormais soudée, non seulement ; par l’histoire commune ou partagée, mais par la solidarité entre les hommes et entre les générations.

En janvier 46, ce sera le commissariat au Plan, organisme destiné à suivre l’évolution de l’économie, à la prévoir, à lui indiquer la route à suivre. Ce commissariat supprimé par L. Jospin et J. Chirac nous fait bien défaut aujourd’hui, il serait temps de le réinstaller.

Puis aussi, la création des comités d’entreprise (ordonnance du 22 février 1945) qui doit associer largement l’ouvrier à la vie de l’entreprise, faire en sorte que l’intérêt particulier soit toujours contraint de céder à l’intérêt général et le Président du Gouvernement, ouvre ainsi la porte à la démocratie sociale et met en application les travaux de l’église sociale. De Gaulle, fit à ce moment là, de la France un exemple, comme Saint-Louis fit de notre pays un royaume exemplaire.

Assurer et assumer la souveraineté française, imposer l’ordre et la loi, la justice aussi en cherchant toujours le juste milieu entre ordre et justice. Exiger au-dehors, le respect des droits de la France, refaire son unité, plier à l’intérêt commun les éléments divers de la nation pour la mener au salut. Voilà l’œuvre, mais au delà de cela, le Général a relevé la France en 1944, alors que notre activité économique avait baissé de prés de moitié. Il fera la même chose en 1958, il a donc engagé par deux fois, notre pays sur la voie de la prospérité.

En 44, il fallait, et cela fut fait, reconstituer l’armée.

Faire acquérir par la nation la propriété des principales sources d’énergie. Faire assurer toujours par la nation et cela aussi fut fait, le contrôle du crédit, ce fût la création d’un Conseil national du Crédit, la nationalisation de la Banque de France et de 4 banques de crédit.

Il fallait et cela fut fait : Rétablir le Conseil économique que Vichy avait supprimé et qui deviendra en 58 le conseil économique et social, celui justement que le Général voulait faire entrer en partie dans la composition du Sénat, avec le référendum d’avril 69.

Il fallait et cela fut fait : Relever la natalité française et ce furent les allocations familiales.

Ce fut aussi, l’Ecole Normale d’Administration, chargée de former les principaux fonctionnaires de l’Etat, et que créa sur le papier Michel Debré. Dommage que le but de cette école ait été détourné, les futurs administrateurs choisissant plutôt la politique.

Il fallait relever les salaires, ils le furent de 40%.

Il fallait tout financer : les reconstructions, les décisions pour le renouveau qui avaient été prises, cela fut fait grâce à l’emprunt de la libération, qui dépassa de prés de moitié ce qui avait été espéré.

Ensuite : c’est le contrôle de la circulation monétaire, le raccourcissement de la dette à court terme, – L’Etat peut désormais payer ce qui doit l’être et reprend ainsi sa condition d’Etat libre, indépendant et notre nation redevient souveraine. Qui d’autre que le Général de Gaulle aurait pu aussi vite sortir la France de l’ornière dans laquelle la guerre l’avait poussée ? Voilà une partie de l’œuvre du Général, malheureusement les partis ragaillardis recommencèrent à jouer à leurs jeux destructeurs, et le dimanche 20 janvier 1946, le Général de Gaulle renonce à ses fonctions de président du Gouvernement provisoire de la République.

L’œuvre du Général avec ce Gouvernement fut énorme. Mais son départ même, s’il ne manqua pas de grandeur, fut une catastrophe pour le pays, car l’œuvre restait et restera jusqu’en 58 inachevée.

Alors pour reprendre un ordre chronologique, le rebelle qui s’enfuit à Londres, la Guerre, le gouvernement d’Alger, la libération, le Gouvernement provisoire de la République. L’œuvre accomplie aurait suffi à beaucoup, mais pas au Général, qui le 16 juin 1946, prononça à Bayeux, un discours qui dessina ce que seront la Vème République et sa Constitution.

Nous nous rappelons :« c’est ici que sur le sol des ancêtres réapparut l’Etat …mais aussi la suite ? Voilà qu’une fois assuré le salut de l’Etat, dans la victoire remportée et l’unité nationale maintenue, la tâche par-dessus tout urgente et essentielle était l’établissement de nouvelles institutions françaises »

J’ai eu l’honneur de suivre, en 1992, un colloque « la Vème République en question » auquel participaient Raymond Barre, Michel Rocard, Jean Charbonnel, Léo Hamon. Montèrent à la tribune de grands constitutionnalistes de l’époque : Didier Maus, Guy Carcassonne, Pierre Dabezies, avec lequel j’ai souvent travaillé, et René Remond. Il a été affirmé lors de ce colloque que Bayeux et la constitution qui en résulta, font partie de l’œuvre du Général, parce que les institutions de la Vème sont l’actif le plus solide dont la France dispose.

Avant que le referendum sur le quinquennat ne détruise en partie cette œuvre du Général, nous avions lors de ce colloque, dressé un premier bilan : les institutions de la Vème République nous ont assuré : stabilité et efficacité. Elles ont offertes à la France un gouvernement stable, ce qui ne s’était pas vu depuis des lunes, Pendant ma jeunesse, si vous vous bouchiez les oreilles quelques instants, vous étiez dans l’incapacité de donner le nom du nouveau Président du Conseil des Ministres. J’ai connu un Ministre de l’éducation, qui le premier jour de son Ministère est venu inaugurer une école dans son village et qui en rentrant à Paris apprit qu’il n’était plus Ministre.

Nos institutions répondent au besoin de liberté, celle de tous les citoyens. Elles y ont ajouté les notions de progrès et de bonheur.

Le système dont est issu la Vème République est démocratique, il a permis l’alternance, qui apporte la preuve que la stabilité ne conduit pas obligatoirement à l’immobilisme.

Que nous ont apporté, ces institutions ? Un Président de la République, qui devient la clé de voûte de l’ensemble du système institutionnel et tant que le septennat est resté la pierre angulaire de l’édifice, tout à parfaitement fonctionné : La fin de la guerre d’Algérie, la démission du Général, la mort du Président Pompidou, l’alternance. Dans tous ces cas, les institutions mises en place par le Général ont tenu bon et nous ont protégé de tous les aléas.

Ces institutions nous ont apporté : le Conseil Constitutionnel – Nous ne nous rendons pas toujours compte qu’avant lui, rien ne contrôlait rien. A la question de conformité d’un Traité par ex, aucune institution ne pouvait apporter de réponse. Regardons de prés ! Art 26 de la constitution de la IVème République :

· Les traités diplomatiques régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi dans le cas même ou ils seraient contraires à des lois françaises. Il n’y avait donc plus rien à dire ni à faire .

Ce Conseil Constitutionnel, mis en place par la Constitution de la Vème, est un élément d’équilibre entre le Gouvernement et le Parlement, il est le garant des libertés fondamentales, ce qui porte la France au dessus de la mêlée en matière de liberté.

La constitution de la Vème République pourrait se résumer ainsi : Une Président qui préside vraiment, un Gouvernement, qui avec le septennat gouvernait vraiment, un Parlement qui parlemente et légifère réellement.

Plan de face du gÈnÈral Charles DE GAULLE gesticulant, assis devant un micro, lors d''une confÈrence de presse ‡ PARIS. L’œuvre du Général, dans le domaine institutionnel, est d’avoir inspiré des institutions durables, qui ont été capables de survivre à la première génération, celle des fondateurs, et d’avoir continué ensuite leur route, même si quelques usurpateurs ont voulu la défigurer. L’œuvre du Général est d’avoir agi dans la légalité et d’avoir appliquer 4 principes primordiaux ; Le suffrage universel est la source des pouvoirs législatif et exécutif, le législatif est séparé de l’exécutif, le Gouvernement est responsable devant le Parlement, l’autorité judiciaire est indépendante, et assure le respect des libertés essentielles, telles que définies par le préambule de la constitution de 1946, dans laquelle est inscrite la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Les Français ne s’y sont pas trompés ; s’ils sont allés à nouveau, chercher le Général en 1958, c’est à cause de la dégradation de l’Etat, de la menace d’une guerre civile, de notre soumission aux pays étrangers. De Gaulle, dans notre esprit, était dans ces périodes d’abaissement de la France, la faiblesse du moment capable de dire NON à la force. Son nom pouvait suffire à tenir en respect les hégémonies extérieures et puis, il était le seul à comprendre cette accession à la quintessence de la politique qu’est la souveraineté- Et les Français savaient que sur ce sujet le Général ne transigerait jamais.

le Général de Gaulle voulait le Rassemblement du peuple français tout entier, c’est à dire, celui de Jules Michelet et celui de Charles Péguy. A partir de ce rassemblement, mais à partir seulement, il était possible de mener la politique d’indépendance pour la France que voulaient le Général, les Gaullistes et la majorité des Français d’alors. Seulement pour mener cette politique, il fallait que notre pays conserve ses attributs incontournables que sont :

· Une constitution qui l’affirme, une armée qui la protège, une monnaie qui la manifeste, un peuple rassemblé qui la soutient.

Ceci ne provient pas du Général, mais de Monsieur Etienne Brin des Roziers, son ancien secrétaire général à l’Elysée, qui nous l’a dicté pour notre livre écrit en commun, que je citais tout à l’heure.

Nous constatons malheureusement que quelques–uns de ces attributs ont disparus , n’est pas Général de Gaulle qui veut.

L’œuvre du Général avec la 5ème République, c’est la nation retrouvée, le patrimoine national reconstitué et défendu, l’acceptation de l’héritage de tous les grands morts qui d’une génération l’autre avaient fait la France, sans que pour cela le Général soit resté le contemplateur d’un passé national aussi prestigieux fût-il. La Vème République du Général c’est une France moderne, avec une production industrielle qui a doublée, un PNB qui a augmenté dans des conditions uniques pour un pays industrialisé, des investissements productifs qui ont augmentés de moitié, une période économique la plus brillante de notre histoire, avec des performances exceptionnelles en matière d’éducation, de soins, de logements. Sous le Général de Gaulle les salaires ont augmenté en moyenne de 4% l’an, (argent constant) ce qui donna comme résultat une consommation des Français qui augmenta de plus de 50%, les transferts sociaux, allocations familiales, retraites tout fut augmenté, nous pouvons dire merci au Général, car nul depuis n’a su prendre la même route.

Et pourtant ce jour de 1958, où le Général entra à Matignon, la situation est catastrophique, je cite en partie Pierre Lefranc : plus de réserves en devises, le montant de la dette est énorme, le déficit est de plus de 5% du budget, la valeur du Franc est toujours réduite par une inflation galopante, la France est quasiment en faillite et quémande auprès des américains, afin de finir ses fins de mois. En quelques semaines, la situation a été inversée, grâce à la confiance que le Général avait su ramener dans le Pays, comme à l’extérieur. Comme en 44 le Général lance un grand emprunt qui sera couvert en 3 jours. A nouveau, l’Etat peut régler ce qu’il doit. Puis, ce sera le nouveau Franc, le blocage des prix pour éviter que l’inflation galope, la réussite de son plan fut complet parce que le Général y associa les populations. Tout fut stabilisé grâce au 5ème plan qui demanda à ce que la production fut augmentée, et que la productivité fut accrue, enfin notre compétitivité fut sans faille.

Dans le même temps, la défense nationale fut assurée : Pour le Général, la défense nationale devait impérativement être française et elle le fut, notamment grâce à l’explosion de la première bombe atomique française dans le désert du Sahara, le 13 février 1960. La théorie de la réponse du faible au fort, proposée par le Général Gallois au Général de Gaulle à l’Hôtel la Pérouse en 1956, avait porté ses fruits. Je connais parfaitement l’histoire que m’a raconté le Général Gallois. « De Gaulle avait compris, me dit-il ce jour là et en une heure qu’avec peu d’armes nucléaires on matérialisait un fort potentiel d’intimidation. Que le faible se révélait alors capable de tenir le fort en respect ». La politique de défense étant le corollaire de la politique étrangère, la bombe offre au Général le retour de la France dans le concert des grandes nations, lui permet de faire quitter à nos armées ; le commandement intégré de l’OTAN. Cette bombe devant être transportée, c’est encore le Général Gallois, qui chez Dassault, participera à l’élaboration du Mirage IV, qui fit de la France une des premières puissance aérienne au monde.

Profitons de cet instant pour réfléchir sur le plan de dénucléarisation proposé par le Président Obama. La bombe qui n’a jamais servi, depuis que deux pays la possèdent, a chassé les grandes étripailleries du 20ème siècle. Ne recommençons pas avec les boucheries, la peur du cataclysme évite les guerres, nos missiles emportés par nos sous-marins nucléaires nous permettent encore de compter dans le monde et d’assurer notre sécurité par la crainte qu’ils suscitent.

La politique étrangère du Général et là je laisse la place à Monsieur Pierre Maillard, Ambassadeur de France et Conseiller diplomatique du Général de Gaulle de 1959 à 1964.

Cette politique a pris pour référence primordiale, non seulement l’existence de la nation, mais sa valeur en tant que phénomène de groupement social et moteur d’action efficace, avec comme première exigence, le concept d’indépendance, étroitement liée à la souveraineté, ceci n’excluant pas une dose notable d’interdépendance des peuples. Je ne peux résister à vous citer cette phrase du Général : Si grand soit la taille du verre que l’on vous tend de l’extérieur, buvons dans le notre, et trinquons aux alentours, en ces quelques mots tellement de choses sont dites.

Je laisse à nouveau l’Ambassadeur de France Pierre Maillard : Ensuite existait la notion d’intérêts, et dans tous les domaines, le Général suivant en cela, cette préoccupation d’intérêts qui fut pendant des siècles au centre de notre politique étrangère.

Pour lui, toute préoccupation d’idéologie devait être bannie de la diplomatie, sauf pour la propagation vertueuse de certaines valeurs universelles – droit – liberté – humanisme- qui ont fait le renom de la France.

Il voulait aussi que s’impose une exacte appréciation des réalités internationales.

Notre diplomatie devait donc posséder une visée mondiale, avec la persistance de nos zones d’influence, liées à nos possessions d’outre mer et aux facteurs historiques, qui permettaient grâce à une action et une présence étendues au monde, la sécurité de nos sources d’approvisionnement qui devait rester la préoccupation majeure de notre diplomatie.

Le Général était conscient que la France n’était plus au temps de Louis XIV ou de Napoléon, mais ce jugement n’excluait pas une vision confiante dans le destin de notre pays.

Indépendance, souveraineté, non alignement, l’Etat contre la féodalité, la nation contre l’empire, la vocation de la France qu’il voulait continuer à promouvoir avec sa mission de paix et d’humanisme. Rappelons nous : Il existe un pacte vingt fois séculaire entre la grandeur de la France et la liberté du monde. Voilà l’œuvre du Général en matière de politique étrangère : Paix, humanisme, et grandeur de la France « qui n’est elle -même qu’au premier rang ».

Voilà pour les œuvres réussies, mais une, reste inachevée, parce que combattue et jetée aux orties, par des Gaullistes ou pseudo-Gaullistes. La PARTICIPATION qui devait être la grande réforme du siècle dernier. La notion de participation, dans l’esprit du Général, englobait l’ensemble des phénomènes sociaux et avait obligatoirement des implications directes dans le système politique.

Rappelons nous : Ni le vieux libéralisme, ni le communisme écrasant. Autre chose. Quoi ? Et bien quelque chose de simple de digne et de pratique qui est l’association, il s’agissait bien là aussi d’un projet politique, avec toujours la recherche de la troisième voie.

Volontairement, sur le triptyque de la participation annoncée : Participation des travailleurs à l’activité de leur entreprise, participation aux résultats et au capital, et participation aux décision, seule la participation aux résultats a été retenue, celle que certains appellent l’intéressement.

Et pourtant le Général désirait autre chose écoutons le : Nous prétendons faire de la France ce qu’elle doit être suivant sa vocation, je veux dire un modèle et un guide quant à la condition des hommes. Participer activement à son véritable destin, voilà la grande réforme française de notre siècle a t-il dit :

· La participation ne pouvait être seulement un cadeau distribué ça et là, elle devait changer les structures de notre société. Très éloignée du matérialisme scientifique des marxistes, et de l’égoïsme et de la concurrence perpétuellement organisée par les capitalistes favorisant la loi du plus fort et l’asservissement du monde du travail . Il fallait combattre l’exploitation de l’homme par l’homme et l’éternel abus. Le 27 avril 1969, le Général a trébuché sur son projet, mais Pierre Lefranc me disait que l’idée de la Participation avait fait son chemin et que certaines réalisations avaient été accomplies.

Car c’est certainement cette œuvre inachevée de la Participation, qui au fil du temps ; s’inscrira dans l’histoire comme.

La plus grande œuvre du général de Gaulle.

Henri Fouquereau 

 

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