La vie dissolue de l’UMP

Je suis sourd, mais pas muet…

« Vous, adhérents, je veux que vous soyez maîtres de votre destin. Les grandes décisions politiques du mouvement nous les prendrons ensemble. Pour cela je ne connais qu’une seule formule : celle du vote démocratique, ouvert à tous. Ceux qui ont des choses à dire les diront. Une fois le vote acquis celui-ci s’imposera à tous et chacun aura à cœur de respecter la ligne commune.

… Je veux que chaque adhérent ait un rôle à jouer, que son avis soit sollicité, que par-dessus tout il se sente respecté. »

Le 28 novembre 2004, devant 40.000 adhérents, le nouveau président de l’UMP s’est ainsi engagé à établir en son sein la plus élémentaire des démocraties, pouvant aller jusqu’au référendum interne sur les sujets les plus importants. Cet engagement a été particulièrement apprécié par les congressistes.

Le projet de constitution européenne et les négociations relatives à l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne revêtent une importance primordiale pour l’avenir de la France. Pourquoi alors refuser aux adhérents de l’UMP le droit de débattre et de choisir librement quelle Europe ils souhaitent et avec qui ils entendent la construire ? Le débat tant espéré par tous n’aura pas lieu au sein de l’UMP. Le choix entre deux conceptions de l’Europe ne fera l’objet d’aucune discussion. L’option qui reste est celle de dire OUI ou NON au projet fédéral ; les défenseurs de l’Europe confédérale, celle du général de Gaulle, n’ont aucun droit.

Le constat est amer. Une fois de plus, malgré des promesses solennelles, l’UMP écarte les militants du débat et du choix démocratique. Une messe aura bien lieu le 6 mars, mais elle ne sera que la rediffusion de celle du 9 mai 2004.

Est-ce à dire que la « désignation » du futur candidat à l’Elysée en 2007 est plus importante que la perte de la souveraineté de la France ? IL semble que oui. Les débats sont nombreux : la jet set politique reprend du service sans se rendre compte que les Français s’en amusent et que les militants s’en offusquent. A trente mois des échéances, chacun peut constater que l’instauration du quinquennat a été et restera une blessure profonde à notre constitution. Rappelons néanmoins que, conformément aux fondamentaux de la Ve république, l’élection présidentielle doit rester un moment privilégié de la vie politique et démocratique de la France : la rencontre d’une conscience (celle du candidat) et d’une confiance (celle du peuple).

Mais revenons à l’Europe pour évoquer en quelques mots l’ « affaire Balladur » qu’on peut résumer ainsi : le Parlement français doit-il donner son avis sur les grandes orientations de l’Europe ? Est-ce mettre en péril les équilibres de nos institutions et en cause les prérogatives du Président de la République que de connaître les avis et motivations de la représentation nationale ? 75% des lois discutées et votées par nos parlementaires nationaux sont liées étroitement aux décisions de Bruxelles. Dans ces conditions, n’est-il pas mesquin d’identifier les affaires européennes comme partie intégrante des affaires étrangères ? La vie politique hexagonale est si étroitement liée à l’Europe qu’il devient naturel que le Parlement débatte de ce qui se trame dans les allées du pouvoir européen de plus en plus envahissant.

Face à cette vie dissolue de l’UMP, les gaullistes de conviction se posent la question qui brûle sur toutes les lèvres. Un gaulliste a-t-il encore sa place à l’UMP ? Je le reconnais ; chaque matin, en me rasant, je doute, j’ai envie de claquer la porte mais je résiste, je me console car je ne suis pas le seul. Dans le sillage de Nicolas Dupont-Aignan, je m’accroche, je survis, j’espère … Mais il y a une limite que le Président et la Direction de l’UMP ne doivent pas franchir : demander aux gaullistes de renoncer à leur engagement de toujours pour l’indépendance de la France.

Alain KERHERVE

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